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Le glaive de l'archange

Le glaive de l'archange

Titel: Le glaive de l'archange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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Quelqu’un a dû me l’emprunter.
    — Si vous l’aviez laissé dans la bibliothèque, qui est sa place naturelle, il n’aurait pas été perdu, Agnete.
    — C’est vrai, ma mère, dit-elle, l’air soumis.
    Ses mains étaient crispées sur le petit ouvrage.
    — Je vais le ranger. Où l’a-t-on retrouvé ?
    — Dans un coffre servant à conserver de vieux habits. Le coffre dans lequel vous avez pris deux tenues tout élimées pour que deux religieuses de haute taille puissent les porter.
    Agnete regarda l’abbesse droit dans les yeux avant de baisser la tête.
    — Oh non, ma mère, fit-elle doucement. Je n’aurais jamais donné ces habits à qui que ce soit sans votre permission. Et jamais à quelqu’un qui puisse vouloir du mal à l’une de nos pupilles.
    — Comment expliquer que votre livre soit arrivé là ?
    — Je l’ignore, ma mère, fit-elle en secouant la tête, l’air étonné. Quelqu’un a dû le prendre et…
    — Qui aurait pu faire cela, Agnete ? Où l’aviez-vous laissé ?
    Les mains croisées de Sor Agnete se mirent à trembler. Ses joues pâles devinrent toutes rouges et elle releva le menton pour défier du regard l’abbesse.
    — Pourquoi était-il dans ce coffre ?
    Trente ans de déférence tombèrent comme la mue d’un serpent, et sa voix se fit glaciale et arrogante.
    — Parce que je ne pouvais porter les habits et le livre en même temps, dame Elicsenda. Malheureusement, j’ai oublié qu’il était là.
    Soudain, comme si cet instant de rébellion avait été trop fort, elle enfouit son visage dans ses mains.
    — Les larmes ne vous serviront pas à grand-chose, dit sèchement Elicsenda. Vous êtes maintenant dans l’obligation de me dire qui vous a impliquée dans ce complot et lesquelles de vos sœurs étaient également au courant.
    Agnete se redressa, les yeux secs.
    — Je n’éprouve ni culpabilité ni remords pour ce que j’ai fait. C’était juste et bon – sauf que j’ai été contrainte de mentir, dit-elle avec la même arrogance glaciale. Notre pays est saccagé par des paysans avides. Vous ne le voyez peut-être pas, mais si vous saviez comment cela se passe dans le monde, comment cela s’est passé pour ma propre famille…
    Elle se pencha vers l’abbesse.
    — Nos terres sont appauvries, nos récoltes sont mauvaises. Mon frère doit jusqu’à son âme à des prêteurs juifs. Nous sommes nobles, madame, aussi nobles que vous-même, mais les marchands et les négociants – des bâtards de traînées, tous tant qu’ils sont, élevés dans la fange ! – nous ont sucé notre sang, ils nous ont volé nos biens et notre place à la cour !
    L’abbesse ne répondit rien.
    — Qu’allez-vous faire, ma mère ? demanda alors Agnete.
    — Rien. Pour l’heure, tout au moins. J’attendrai que vous me disiez qui d’autre est impliqué. Entre-temps, vous prierez, travaillerez et espérerez l’amendement dans cette vie et le pardon dans l’autre. Je connais mieux le monde que vous ne l’imaginez, et peu importe que vous pensiez avoir été provoquée, ce que vous avez fait est mal.
    Elle se leva pour lui signifier que l’entretien était terminé, et Sor Agnete sortit rapidement de la pièce.
     
    — Ainsi donc c’était Sor Agnete, dit Berenguer. Je suis stupéfait.
    — Je l’ai aussi été, répondit l’abbesse. J’aurais dû penser à la situation de sa famille. Agnete et la mère de Sanxia étaient amies, si je m’en souviens bien, et vaguement cousines. Bien qu’elle ait apporté avec elle une dot substantielle en entrant au couvent, dit-elle avec l’air d’une personne dont la fortune était bien plus importante, la sécheresse, la pauvreté et la peste ont depuis lors presque détruit sa famille. Ils ont dû regretter amèrement cette dot, ajouta-t-elle avec cynisme. Elle semblait si efficace et d’un tempérament si égal que je n’ai jamais pensé qu’elle pût éprouver quelque ressentiment. Ce fut négligent de ma part.
    — Nous ne pouvons voir dans le cœur d’autrui, dame Elicsenda, lui dit l’évêque. Et c’est bien mieux ainsi, la plupart du temps. Le médecin doit-il venir ? Je comptais lui parler cet après-midi.
    — Il est ici, dit l’abbesse en recouvrant tout son calme. Il souhaitait voir dame Isabel et s’assurer qu’elle est en bonne santé après tout ce qu’elle a enduré. Je lui ai demandé de se joindre à nous dès qu’il aura fini.
    Un coup fut discrètement frappé à la

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