Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le glaive de l'archange

Le glaive de l'archange

Titel: Le glaive de l'archange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
Vom Netzwerk:
constituaient la politique de la cour étaient des vents changeants auxquels il ne comprenait rien, mais ce n’était pas le cas des implications d’une accusation pour haute trahison. On l’avait questionné, et il avait répondu sincèrement ; pour lui, il était inconcevable de dire à ses interrogateurs autre chose que la vérité telle qu’il la connaissait. Mais il avait assez d’esprit pour comprendre que chacun des mots qu’il avait prononcés le condamnait. Aujourd’hui, on les reprendrait pour s’en servir contre lui. Il n’avait nul espoir de se sortir d’affaire.
    Le greffier était assis à une table finement ouvragée et rangeait ses documents. Il leva les yeux, remarqua que le prisonnier le regardait fixement, rougit et s’empressa de détourner la tête. Tomas consacra poliment toute son attention aux murs du prétoire. Un groupe de quatre avocats fit son entrée : splendides dans leurs longues robes de juristes et parlant à voix basse, ils prirent place sur un banc latéral. Deux d’entre eux avaient passé de longues heures, la veille au soir, à interroger Tomas, mais aujourd’hui ils paraissaient à peine remarquer sa présence.
     
    Enfin, la porte s’ouvrit pour permettre l’entrée des juges. La foule bruyante s’empressa de se lever et un silence soudain emplit la salle. Vêtu sobrement de noir et ressemblant à un guerrier qui vient de quitter le champ de bataille, un homme de haute taille entra dans le prétoire et occupa la place centrale. Il était suivi de deux juges parés comme des paons en comparaison. La présidence allait être assurée par Pedro d’Aragon en personne.
    Le juge le plus jeune adressa un signe de tête au greffier :
    — Lisez l’accusation.
    — Votre Majesté, Vos Seigneuries, murmura le greffier avant de lire les formules solennelles accusant Tomas de Bellmunt de trahison pour avoir conspiré avec d’autres personnes anonymes afin de s’emparer de l’héritier du trône.
    — Et que répond le prisonnier ? demanda le roi.
    Un des avocats se leva, consulta une feuille posée devant lui et parla avec toute l’aisance des gens de son espèce :
    — Votre Majesté, le prisonnier jure qu’il est un fidèle et loyal sujet du roi et que sa complicité en cette affaire est entièrement fortuite.
    Il n’avait pas l’air convaincu.
    — Le prisonnier a-t-il fait une déclaration quant au chef d’inculpation ? demanda le plus jeune juge.
    Un deuxième avocat se leva et s’inclina.
    — Oui, il en a fait une, Votre Majesté, messeigneurs, dit-il avant de se mettre à lire le récit péniblement détaillé que Bellmunt avait fait de l’affaire.
    Tomas se sentait étonnamment loin de tout cela. Hormis quelques imprécisions çà et là, c’était une relation admirable de ce qu’il avait dit. Il percevait avec une brutale lucidité le poids de l’accusation lancée contre lui. Eût-il été un étranger en ville, venu par curiosité assister à ce procès, il en aurait conclu que le prisonnier était soit un imbécile, trop dangereux pour vivre, soit un fieffé coquin, si endurci qu’il se moquait des conséquences de ses actes. Il se demanda brièvement si quelque chose aurait pu atténuer l’impact des faits. Peut-être que, si la cour avait vu Doña Sanxia, ses yeux, sa chevelure envoûtante, elle aurait compris comment il avait pu accéder si facilement à sa requête. Mais Doña Sanxia était morte. Et il savait aujourd’hui que, même vivante, elle n’aurait jamais risqué sa propre tête pour sauver la sienne.
    De plus, Tomas n’avait supprimé que deux faits dans sa longue déclaration, et leurs relations constituaient l’un d’eux. Comme quelque chevalier d’antan, il était décidé à la protéger, même dans la mort, des ricanements grossiers de la foule. Il refusait d’admettre son péché et sa folie en un lieu public au cas où dame Isabel l’entendrait et en viendrait à le mal juger. Il avait également passé sous silence le rapport entre son oncle et Romeu. Ce n’était pas un secret, mais cela n’aurait pu que nuire à son protecteur, le propre frère de sa défunte mère. Il irait à la mort, songeait-il amèrement, en acceptant la responsabilité de ses propres actions mais sans entraîner qui que ce soit, vivant ou mort, dans sa chute.
    À son grand étonnement, la déclaration s’acheva sur la découverte du corps de Doña Sanxia et son retour tardif à Barcelone. Pas un mot sur dame Isabel, Montbui

Weitere Kostenlose Bücher