Le grand voyage
pendant le Voyage.
Ce n’était pas parce que Jondalar répondait idéalement aux
canons de son propre peuple qu’Ayla le trouvait beau. C’était surtout la
première fois qu’elle rencontrait un être qui lui ressemblait. Il n’était pas
du Clan, c’était un Autre. Lorsqu’il était arrivé dans sa vallée, elle avait
étudié ses traits minutieusement – effrontément, même – y
compris pendant qu’il dormait. Quel étonnement de voir un visage ressemblant au
sien après tant d’années passées à être seule de son espèce ! Jondalar n’avait
pas d’arcades sourcilières saillantes, ni une nuque plate, ni un grand nez
busqué haut perché au-dessus d’une lourde mâchoire dépourvue de menton.
Tout comme le sien, le front de Jondalar s’élevait, droit et
lisse. Son nez, et même ses dents, étaient petits, et comme elle, il possédait
une protubérance osseuse sous sa bouche, un menton. Elle avait alors compris
pourquoi le Clan lui trouvait la tête plate et le front proéminent. Elle avait
vu son propre reflet dans l’eau, et elle s’était fiée à leur jugement. Certes,
Jondalar la dépassait en taille, tout comme elle dépassait ceux du Clan, et
plus d’un homme lui avait parlé de sa beauté, mais dans son for intérieur, elle
continuait de se trouver laide et trop grande.
Jondalar, parce qu’il était un homme, qu’il avait une ossature
plus forte et des traits plus marqués, aux yeux d’Ayla, ressemblait davantage à
ceux du Clan. Elle avait grandi dans le Clan, appris à mesurer la beauté
suivant leurs canons, et contrairement à ceux de sa race, elle persistait à
juger ceux du Clan plutôt séduisants. Et Jondalar, dont le visage était à la
fois semblable au sien et plus proche de ceux du Clan, représentait pour Ayla
le summum de la beauté.
— Je suis heureux d’apprendre qu’Iza m’aurait accepté,
affirma Jondalar, la mine réjouie. Ah, comme j’aurais aimé la connaître !
Elle, et tous ceux de ton Clan. C’est une chance pourtant que je t’aie
rencontrée d’abord, sinon je n’aurais jamais soupçonné qu’ils étaient humains.
Mais, à t’entendre parler d’eux, on devine que c’étaient des êtres sensibles et
bons. J’aimerais un jour rencontrer l’un d’entre eux.
— Il existe des êtres bons partout. Le Clan m’a recueillie
après le tremblement de terre, quand j’étais petite. Et puis, Broud m’a
chassée, je n’avais plus de peuple, et je devins Ayla de Nulle Part. Alors le
Camp du Lion m’a accueillie à son tour, il m’a offert une place, et je suis
devenue Ayla des Mamutoï.
— Les Mamutoï et les Zelandonii se ressemblent beaucoup,
tu verras. Je crois qu’ils te plairont, et ils t’aimeront aussi.
— Tu n’en as pas toujours été sûr, rétorqua Ayla.
Rappelle-toi, tu avais peur qu’ils ne me rejettent parce que j’avais vécu parmi
le Clan. Et puis, à cause de Durc.
Gêné, Jondalar rougit.
— Tu craignais qu’ils traitent mon fils de monstre, d’esprit
mêlé, de demi-animal – d’ailleurs, tu l’as toi-même appelé de cette
façon, une fois – et tu pensais qu’ils me jugeraient mal pour avoir
enfanté un être pareil.
— Ayla, avant de quitter la Réunion d’Été, tu m’as fait
promettre de ne plus jamais te cacher la vérité. Alors écoute : c’est
vrai, au début, j’étais inquiet. Je voulais que tu m’accompagnes chez les
miens, mais à condition que tu ne racontes rien de ton histoire. Bien que je
déteste les mensonges, je voulais que tu mentes sur tes origines... mais tu n’as
jamais su mentir. Oui, j’avais peur que mon peuple ne te rejette et je connais
la souffrance que l’on éprouve alors, et je désirais te l’éviter. Mais c’était
aussi pour moi que j’avais peur. Peur qu’on me bannisse à cause de toi, et je
refusais d’endurer cette épreuve une deuxième fois. Et pourtant, je ne pouvais
pas supporter l’idée de vivre sans toi. J’étais désemparé, tu comprends.
Ayla ne se rappelait que trop bien l’état de confusion et de
désespoir dans lequel l’avait jetée la dramatique indécision de Jondalar. Elle
n’avait jamais été malheureuse à ce point.
— A présent, je sais ce que je veux, reprit Jondalar. Il m’a
fallu presque te perdre pour comprendre. Pour moi, Ayla, tu comptes plus que
tout. Sois toi-même, dis ce que tu penses, fais comme bon te semble, c’est
comme cela que je t’aime. Et maintenant, je suis sûr que mon peuple
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