Le grand voyage
silex
avant qu’il meure.
— C’est juste, mais il a aussi ramassé une pierre pour
servir de percuteur, et il y a des os dans l’Enclos. Ça suffira pour fabriquer
quelques couteaux et quelques pointes. C’est un bon morceau de silex.
— Tu es tailleur de silex ? demanda Olamun.
— Oui, mais je vais avoir besoin d’aide. Il faudra du bruit
pour couvrir les chocs de la pierre.
— A supposer qu’il fabrique des couteaux, à quoi cela sous
servira-t-il ? remarqua Olamun. Les femmes ont des sagaies.
— Eh bien, on pourra déjà couper les liens de ceux qui ont
les mains attachées, répondit Ebulan. Je suis sûr qu’on trouvera facilement un
jeu très bruyant. Dommage qu’il fasse presque nuit.
— J’ai assez de lumière et je n’ai pas besoin de beaucoup
de temps pour fabriquer les pointes et les outils. Demain, je travaillerai sous
l’auvent où les gardes ne me verront pas. J’aurai besoin d’os et aussi de ces
souches. Il me faut également une planche, mais je l’arracherai à l’auvent. Si
quelqu’un avait un tendon, cela m’aiderait, mais de fines lanières de cuir
feront l’affaire. Ah oui, Ardemun, tâche de me trouver des plumes quand tu
seras dehors, elles me seront très utiles.
Ardemun acquiesça d’un air entendu.
— Tu as l’intention de fabriquer quelque chose qui
vole ? demanda-t-il ensuite. Une sagaie de jet, peut-être ?
— Oui, quelque chose qui vole, approuva Jondalar. Ce ne
sera pas facile à façonner, et ce sera long. Mais je pense pouvoir fabriquer
une arme qui vous surprendra.
28
Le lendemain matin, avant de commencer à travailler le bloc de
silex, Jondalar entretint S’Amodun d’une idée qu’il avait eue avant de s’endormir.
Le souvenir de Darvo apprenant la taille des silex dès son plus jeune âge lui
était revenu et il avait pensé que les deux jeunes invalides pourraient
apprendre une technique – tailler le silex, par exemple – qui
leur permettrait de mener une vie utile et indépendante.
— Avec quelqu’un comme Attaroa, crois-tu vraiment qu’on
leur laissera cette chance ? demanda S’Amodun.
— Elle accorde davantage de liberté à Ardemun qu’à personne
d’autre. Elle peut en arriver à considérer que les deux garçons ne constituent
plus une menace et les laisser sortir de l’Enclos plus souvent. Même Attaroa
est sensible à une certaine logique, elle comprendra vite l’intérêt d’avoir de
bons tailleurs de silex dans son Camp. J’ai pu me rendre compte combien les
armes de ses chasseresses étaient de piètre qualité. Et qui sait ? Elle ne
gardera peut-être plus sa place très longtemps.
Le vieillard considéra le géant blond avec intérêt.
— Saurais-tu quelque chose que j’ignore ?
interrogea-t-il. En tout cas, j’encouragerai les garçons à venir te regarder
travailler. Jondalar avait travaillé hors de l’auvent la nuit précédente, afin
que les éclats de silex qui jaillissaient inévitablement au cours de la taille
ne fussent pas accumulés autour de l’abri. Il s’était installé derrière un tas
de pierres, près des lieux d’aisance, la partie de l’Enclos que les gardes
surveillaient le moins, à cause de l’odeur.
Les lames qu’il avait rapidement détachées de la gangue de
pierre étaient environ quatre fois plus longues que larges, avec un bout
arrondi. Ces ébauches d’outils au tranchant comme celui d’un rasoir découpaient
le cuir aussi aisément que de la graisse gelée, au point qu’il fallait parfois
en émousser le fil pour éviter de se blesser en les utilisant.
Dès son réveil, Jondalar avait choisi un endroit sous l’auvent,
éclairé par une fissure du plafond. Il avait ensuite découpé un morceau de cuir
dans sa cape de fortune et l’avait disposé sur le sol pour recueillir les
débris de silex. Entouré des deux jeunes infirmes et de plusieurs autres, il
leur montra comment utiliser une pierre arrondie, ou un os, pour fabriquer des
outils en silex, lesquels à leur tour serviraient à confectionner des objets en
cuir, en bois ou en os. Ils prenaient soin de ne pas attirer l’attention, se
levant de temps en temps pour vaquer à leurs occupations habituelles, et
revenant se blottir les uns contre les autres pour se réchauffer, et cachaient
ainsi Jondalar à la vue des gardes. Mais tous observaient le travail du
tailleur de silex avec fascination.
Jondalar ramassa une lame et l’examina d’un œil critique. Il
avait plusieurs outils en
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