Le grand voyage
Plaisirs en
torturant les autres, et en les regardant souffrir. En l’observant bien, on se
rend compte à quel point cela l’excite.
— J’en arrive à la plaindre, déclara Jondalar.
— Plains-la si tu veux, mais ne lui fais jamais confiance,
recommanda S’Armuna. Elle est folle. Elle est possédée par un puissant démon.
Je ne suis pas sûre que vous puissiez comprendre. Avez-vous jamais haï au point
d’en perdre la raison ?
Les yeux dilatés, Jondalar fut bien obligé de l’admettre. Oui,
il connaissait cette haine. Un jour, il avait frappé un homme sans pouvoir s’arrêter,
même lorsque l’autre gisait, inconscient.
— On dirait que cette haine maladive ne quitte jamais
Attaroa, expliqua S’Armuna. Elle réussit parfois à le cacher – on
peut même dire qu’elle y excelle – mais c’est la haine qui la
gouverne. Elle est incapable de penser comme tout le monde. En fait, elle n’est
plus humaine.
— Il doit bien lui rester des sentiments humains ? fit
Jondalar.
— Te souviens-tu des funérailles qui ont suivi ton
arrivée ? demanda S’Armuna.
— Oui, celles des trois jeunes gens. Il y avait deux
garçons, mais je n’ai pas pu définir le sexe du troisième. Je me souviens m’être
demandé de quoi ils étaient morts. Ils étaient si jeunes.
— C’est Attaroa qui est responsable de leur mort, affirma S’Armuna.
Et celui dont tu n’as pu définir le sexe, c’était son propre enfant.
Un bruit soudain leur fit tourner la tête vers l’entrée du foyer
de S’Armuna.
31
Une jeune femme se tenait sur le seuil, l’air très agité.
Jondalar remarqua que c’était encore presque une fillette, et Ayla qu’elle
était au terme de sa grossesse.
— Qu’y a-t-il, Cavoa ? demanda S’Armuna.
— Epadoa vient de rentrer avec ses Louves, et Attaroa est
en train de la réprimander.
— Je te remercie de m’avoir prévenue, déclara la vieille
femme, avant de se retourner vers ses invités. Les murs de ce foyer sont si
épais qu’il est presque impossible d’entendre ce qui se passe dehors, leur
dit-elle. Nous devrions aller voir.
Ils se précipitèrent dans l’étroit passage, et la jeune femme s’effaça
pour les laisser passer.
— Pas longtemps attendre, lança Ayla en s’armunaï, avec un
sourire complice.
Cavoa eut un petit rire nerveux, et baissa les yeux.
Ayla se demandait ce qui effrayait la jeune femme et lui donnait
cet air malheureux, alors que les futures mères étaient plutôt épanouies d’habitude,
mais elle se rappela ensuite que le premier bébé était souvent attendu avec
angoisse. Dès qu’ils furent dehors, les hurlements d’Attaroa leur parvinrent.
— ... que tu as trouvé leur campement. Tu as laissé passer
ta chance ! Tu te prétends Louve et tu n’es pas capable de retrouver une
piste ! s’égosillait-elle, ponctuant ses cris de ricanements moqueurs.
Des flammes de colère brillaient dans le regard d’Epadoa, qui
serra les dents mais ne répondit pas. Une petite foule s’était rassemblée, et
les observait à distance. La femme revêtue de peaux de loups remarqua alors que
tous les regards convergeaient vers le foyer de S’Armuna, et découvrit avec
stupeur la jeune femme blonde qui venait vers elle, suivie, ce qui la surprit
encore plus, par le géant. Jamais aucun homme n’était revenu
volontairement !
— Que faites-vous ici ? lâcha Epadoa.
— Je viens de te le dire. Tu as raté ta chance, ricana Attaroa.
Ils sont revenus d’eux-mêmes.
— Pourquoi es-tu surprise de nous trouver là ? fit
Ayla. N’étions-nous pas conviés à un festin ?
S’Armuna traduisit.
— Le festin ne sera pas prêt avant ce soir, dit Attaroa d’un
ton cassant, pour signifier leur congé aux visiteurs. Viens Epadoa, j’ai à te
parler.
Elle tourna le dos aux curieuses qui s’étaient attroupées, et
rentra dans son habitation. Epadoa dévisagea Ayla, l’air mauvais, et rejoignit
la Femme Qui Ordonne.
Après son départ, Ayla scruta le pré avec appréhension. Après
tout, Epadoa et ses Louves avaient la réputation de chasser les chevaux. Ayla
poussa un soupir de soulagement en voyant Whinney et Rapide au bout du pré en
pente, dont l’herbe sèche et cassante les nourrirait tout de même. Elle tourna
la tête du côté des bois accrochés au versant de la colline qui descendait vers
le Camp, espérant apercevoir Loup et se montrer dans son champ de vision pour
qu’il ne se sente pas abandonné.
En
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