Le grand voyage
Caverne.
— Alors pourquoi voler et forcer les femmes ? demanda
Ayla. Une Caverne sans femmes dans vos foyers n’est pas une Caverne.
— Nous nous moquons de ce que tu racontes. Nous prendrons
ce qu’il nous plaira, quand il nous plaira... nourriture, femme, tout. Personne
ne nous en a jamais empêchés, ce n’est pas maintenant que ça va
commencer ! Allons-nous-en ! fit-il en se mettant en marche.
— Charoli ! cria Jondalar, qui le rattrapa en quelques
enjambées.
— Que veux-tu ?
— J’ai une surprise pour toi !
Sans crier gare, il expédia un large crochet d’une telle
violence à la face de Charoli qu’il le fit décoller du sol.
— De la part de Madenia ! expliqua Jondalar en jetant
un œil sur le corps affalé au sol.
Sur ce, il tourna les talons.
Ayla observa le jeune homme assommé. Un filet de sang coulait à
la commissure de ses lèvres, mais elle ne fit pas un geste pour lui porter
secours. Deux des siens se chargèrent de le relever. Ayla reporta son attention
sur les autres Losadunaï, les dévisageant chacun leur tour. C’était une bande
de malheureux, hagards, sales et dépenaillés. Leurs visages émaciés reflétaient
la faim et la désolation. Pas étonnant qu’ils fussent obligés de voler. Ils
avaient bien besoin de l’aide et de l’assistance d’une famille, et des amis de
la Caverne. La vie de rapines et d’aventures dans le confort sans contrainte de
la bande de Charoli avait cessé d’exercer sur eux l’attrait enivrant des
débuts, et ils étaient prêts à rejoindre les leurs.
— Les Losadunaï vous recherchent, annonça-t-elle. Ils trouvent
tous que vous êtes allés trop loin. Même Tomasi, qui est pourtant apparenté à
Charoli. Si vous rentrez maintenant dans vos Cavernes et acceptez la punition
qui vous attend, il vous reste une chance de retrouver vos familles. Si vous
attendez qu’ils vous découvrent, vous aggraverez votre sort.
C’était donc pour ça qu’Elle était venue ! Elle nous
accorde une dernière chance, estima Danasi. Si nous rentrons tout de suite et
que nous essayons de nous amender, nos Cavernes nous accepteront-elles ?
Après le départ de la bande de Charoli, Ayla s’approcha du
couple du Clan. Ils avaient assisté avec étonnement à la confrontation entre
Ayla et les hommes, et vu Jondalar assommer l’autre homme d’un coup de poing.
Les hommes du Clan ne se battaient jamais entre eux, mais les hommes des Autres
étaient tellement étranges. Ils ressemblaient parfois à des humains, mais ne se
conduisaient pas toujours en hommes, surtout celui que le géant avait assommé.
Tous les clans connaissaient ses agissements, et le blessé n’était pas
mécontent de l’avoir vu subir une correction. Mais il était encore plus content
de les voir partir.
Il aurait bien voulu que les deux autres s’en allassent aussi.
Leur intervention imprévue l’avait troublé, et il désirait surtout retourner
dans son clan. Mais comment s’y prendre avec sa jambe cassée ?
Mais Ayla leur réservait une surprise de taille. Même Jondalar
devina leur désarroi. Ayla s’assit avec grâce, les jambes croisées, en face de
l’homme du Clan, et fixa le sol avec humilité.
Jondalar n’était pas le dernier surpris. Elle avait déjà adopté
cette attitude avec lui, quand elle voulait lui dire quelque chose d’important
et ne trouvait pas les mots, mais c’était la première fois qu’il la voyait
faire ce geste dans son contexte naturel. C’était un geste de respect. Elle
demandait à l’homme la permission de lui adresser la parole. Mais Jondalar ne
comprenait pas qu’une femme de sa compétence, intelligente et indépendante, pût
approcher ainsi un Tête Plate avec tant de déférence. Elle avait essayé de lui
expliquer qu’il s’agissait de courtoisie, de tradition, et qu’il ne fallait pas
y voir de déshonneur ou d’humiliation, mais Jondalar ne connaissait aucune
Zelandonii, ni aucune autre femme, qui aurait accepté de se conduire de la
sorte avec quiconque, homme ou femme.
Ayla attendait patiemment que l’homme daignât lui toucher l’épaule,
mais elle n’était pas sûre que le langage de ceux de ce clan fût le même que
celui employé par ceux qui l’avaient élevée. La distance qui séparait ces deux
peuples était si grande, et l’aspect de ceux-ci n’était pas le même. Elle avait
bien noté des similitudes de certains vocables, mais plus les distances entre
les peuples étaient grandes,
Weitere Kostenlose Bücher