Le grand voyage
nerveuse et impatiente. Demain, ils aborderaient le fameux
glacier dont Jondalar parlait depuis le début.
— Que... qu’y a-t-il ? bougonna Ayla, réveillée en
sursaut.
— Il est temps de se lever, fit Jondalar en brandissant une
torche. Il en enfonça le manche dans les graviers et lui tendit un bol d’infusion
brûlante.
— J’ai fait du feu. Tiens, bois ça.
Il la vit sourire avec plaisir. Elle lui avait préparé son
infusion tous les matins depuis le début du Voyage, et il était heureux de s’être
levé le premier, pour une fois, et de lui servir le breuvage revigorant. En
fait, il avait à peine dormi. Il était bien trop nerveux, impatient, et inquiet
en même temps.
Loup, dont les yeux reflétaient la lumière de la torche,
observait les deux humains. Sentant que quelque chose se préparait, il
gambadait fiévreusement de long en large. Les chevaux, tout aussi impatients, s’ébrouaient,
hennissaient, dégageant de longues bouffées de buée. Grâce aux pierres qui
brûlent, Ayla leur fit fondre de la glace et leur donna du grain. Elle tendit à
Loup une galette, cadeau des Losadunaï, une autre pour Jondalar, et en garda
une pour elle. Ils rangèrent la tente, les fourrures de couchage et le reste du
matériel à la lueur de la torche. Ils abandonnèrent le superflu, un récipient
vide, quelques outils, mais au dernier moment, Ayla récupéra la peau de
mammouth et la jeta sur le canot.
Jondalar ramassa la torche et ouvrit la route. La longe de
Rapide dans une main, il commença l’escalade, mais la torche le gênait. Elle n’éclairait
qu’un étroit périmètre, même lorsqu’il la levait le plus haut possible. La lune
était presque pleine, et il se dit qu’il trouverait aussi bien son chemin sans
la torche. Il la jeta finalement et s’avança dans le noir. Ayla le suivit, et
bientôt ses yeux s’habituèrent à l’obscurité. La torche continua de brûler
tandis qu’ils s’éloignaient.
A la lueur de la lune, à qui il ne manquait qu’un infime
croissant pour être pleine, le monstrueux bastion de glace luisait d’un éclat
sinistre et inquiétant. Le ciel noir était criblé d’étoiles, l’air cassant,
éther amorphe doué d’une vie propre.
L’air glacial semblait se rafraîchir encore à l’approche de la
muraille de glace, mais les frissons qui faisaient trembler Ayla s’expliquaient
surtout par l’exaltation et la crainte émerveillée. Jondalar l’observa avec
tendresse. Haletante, le regard brillant, la bouche entrouverte, elle était
bouleversante. Un désir subit le prit, mais il se contint. Le moment était mal choisi,
le glacier les attendait.
— Il faut s’attacher, conseilla-t-il en prenant une longue
corde dans son sac.
— Les chevaux aussi ?
— Non. Nous pourrons nous retenir l’un l’autre, mais si les
chevaux glissent, ils nous entraîneront dans leur chute.
Bien que l’idée de perdre Rapide ou Whinney lui fît horreur, il
se souciait davantage de la sécurité d’Ayla. A contrecœur, elle finit par
obtempérer.
Ils murmuraient, de crainte de déranger la forteresse
majestueuse, ou de la prévenir de l’assaut imminent, et la glace étouffait leur
voix. Jondalar attacha un bout de la corde autour de sa taille, l’autre autour
d’Ayla, et enroula le mou qu’il maintint sur son épaule. Chacun empoigna
ensuite la longe de sa monture. Loup devrait trouver son chemin tout seul.
Au moment de s’élancer, Jondalar eut un moment de panique. Qu’est-ce
qui lui avait pris ? Pourquoi avoir amené Ayla et les chevaux sur ce
maudit glacier ? Ils auraient dû le contourner, malgré la longueur de la
route, c’eût été plus prudent. Au moins, ils seraient arrivés sains et saufs.
Finalement il se décida à gravir le mur de glace.
Au pied d’un glacier, la terre était souvent séparée de la glace
par une sorte de cavité, à moins que la glace elle-même ne surplombât les
graviers accumulés par le labourage du glacier en marche. Jondalar avait choisi
de gravir un surplomb effondré, ce qui procurait une pente graduelle. De plus,
la glace était criblée de gravier et offrait davantage de prise. L’importante
accumulation de gravier – une moraine traçait un chemin jusqu’au
rebord, et leur permit de le gravir sans trop de mal. Restait le rebord à
escalader. Jondalar ne se rendit pas compte des difficultés avant d’y arriver.
Lorsque Jondalar commença à gravir la pente caillouteuse, Rapide
se déroba. Bien
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