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Le Hors Venu

Le Hors Venu

Titel: Le Hors Venu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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d’olive...
    Comme à bord de l’esnèque, Eleonor, oubliant les mises en garde d’Hugues, se laissa prendre au charme du chevalier qui était un hôte charmant, attentif et cultivé. Il lui décrivit Palerme, lui vanta la beauté du palais royal, les charmes du tiraz , la douceur du palais de Maredolce, l’intelligence et les talents de son futur époux. Eleonor se prenait à rêver, s’imaginant à la Cour, aux côtés du roi normand avec son mari.
    — C’est celui que portait Hugues de Tarse. Il lui venait de sa mère et il disait qu’il ne s’en séparerait jamais, déclara abruptement le chevalier. Je comprends mieux le trouble que vous avez éprouvé quand nous l’avons croisé dans Palerme. Mais pardonnez-moi, tout ceci ne me regarde en rien.
    Eleonor se trouva incapable d’articuler un mot. Qu’aurait-elle pu dire qui n’aurait trahi leur amour ?
    — Vous devez vous demander comment je connais ce pendentif ?
    — Je ne me demande rien, bégaya la jeune femme.
    — Le sire de Tarse ne vous a pas dit que plus que frères d’armes, nous étions frères de sang ?
    — Non.
    — « À la vie, à la mort » était notre serment. Et puis, il devait...
    Comme s’il éprouvait une soudaine et terrible douleur, il porta la main à son cœur, le visage très pâle.
    — Cela ne va pas, messire ?
    — Si, si, souffla-t-il.
    — Qu’alliez-vous dire ?
    — Rien.
    Il regarda la table encore chargée de mets, les coupes pleines.
    — Mais je manque à tous mes devoirs, vous n’avez presque rien mangé, damoiselle. Sans doute préférez-vous que nous passions aux douceurs ?
    Il frappa dans ses mains.
    Blanc-manger au miel, confit de pétales de rose, salade d’orange à la cannelle et aux amandes se succédèrent. Dame Elvire avait disparu, remplacée par Marco qui leur servit un vin coupé d’eau fraîche. Le cœur n’y était plus. Eleonor gardait le silence et Bartolomeo, le visage sombre, ne ressemblait plus à l’hôte joyeux qu’il était au début du repas. Soudain, il parut se décider.
    — Marco, allez allumer chez demoiselle Judith ! ordonna-t-il.
    L’homme s’inclina sans mot dire et sortit. Un moment passa, on entendit des pas dans l’escalier.
    — Tout est prêt, messire.
    — Venez ! fit d’Avellino. Vous allez comprendre.
    Il se leva si brusquement que sa chaise tomba.
    Quelques instants plus tard, il poussait la porte de la chambre voisine de celle d’Eleonor.
    — Entrez, je vous en prie, fit-il en se rangeant pour la laisser passer.
    Eleonor s’avança et se sentit aussitôt prise à la gorge par l’odeur trop sucrée de l’essence de rose. La lumière des candélabres éclairait un lit immense entouré de colonnes de bois sculpté. Il était paré de fourrures, d’oreillers et de draps de soie. Dans un angle, elle aperçut une baignoire de bois recouverte d’un linge d’une blancheur immaculée. Sur un coffre étaient posés un miroir d’argent, une brosse à cheveux à manche d’ivoire, un peigne et un long voile blanc... Des églantines, des roses de Damas et des feuilles de menthe étaient disposées dans une corbeille au pied du lit.
    — Tout est resté tel qu’elle l’a laissé, murmura d’Avellino. Il y a seize ans.
    — Seize ans ! Vous voulez dire...
    Elle hésitait sur le choix des mots. Était-ce là la chambre de la sœur morte dont le chevalier lui avait parlé ? Mais dans ce cas, pourquoi la garder ainsi ? Pourquoi renouveler ces fleurs et allumer ces bougies ? Pourquoi continuer à faire ce lit comme si l’on attendait son retour ou qu’on la révérait comme une idole païenne ?
    Le chevalier n’avait rien ajouté. Un mur de mosaïque occupait le fond de la pièce. Eleonor s’approcha. Une petite lampe à huile luisait dans une alcôve, sa clarté donnant un étrange relief au portrait de femme qui était dessiné là. Hautes pommettes, sourire énigmatique et chevelure pâle, elle ressemblait à celle du jardin.
    L’artiste avait placé des reflets d’or et d’émeraude dans ses yeux et quand Eleonor bougea, elle eut l’impression désagréable que le regard la suivait. Elle se tourna vers d’Avellino et fut surprise par l’expression de son visage. Souffrance ou fascination, elle n’aurait su dire quel sentiment l’emportait sur l’autre. Les mots s’étranglèrent dans sa gorge.
    — C’est Judith, finit par murmurer le chevalier. Ma sœur bien-aimée. Morte il y a seize ans. Elle devait épouser mon

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