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Le jardin d'Adélie

Le jardin d'Adélie

Titel: Le jardin d'Adélie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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hésitante du bourgeois qui était resté.
    Magister consentit à faire une pause. Il demanda :
    — Vaut-il donc quelque chose ?
    L’homme regarda Firmin.
    — À vrai dire, je n’en sais rien, dit ce dernier en souriant. Magister fit un vague signe de tête. Il se planta devant le supplicié et le toucha.
    — Tourne-toi, Louis. Regarde ton maître.
    L’adolescent rouvrit péniblement les yeux. Ses bras couverts de sang se tordirent un peu.
    — Louis, quelqu’un demande merci pour toi. Mérites-tu ma grâce ?
    Louis déglutit et serra les mâchoires. Il était piégé, quoi qu’il pût répondre. Car un oui voulait dire qu’il acceptait de s’humilier et de se soumettre, alors qu’un non signifiait que les tourments allaient se poursuivre. Or, il ne pouvait concevoir ni l’un ni l’autre. Magister reprit, d’une voix douce :
    — Le démon se meurt en toi, mon fils. Je vais devoir te fouetter encore un peu pour l’achever. Crie merci et tu seras sauvé, car cela me montrera que Lucifer a bel et bien quitté ton corps.
    « Parce qu’il me faut bien le ménager un peu si je veux qu’il rapporte », se disait-il.
    Les yeux de Louis avaient tendance à se révulser et il dodelinait de la tête. La terre autour de lui s’était teintée de rouge. Le monde s’éteignait et réapparaissait sans cesse. C’était étourdissant. Il n’arrivait plus à saisir ce qu’il percevait comme des marmonnements de la part de l’homme penché au-dessus de lui. Le scorpion lui mordit une épaule à deux reprises. Il se raidit. Seule une plainte lui échappa. Une limace rouge glissa en direction du sein.
    — Crie merci, Louis.
    Le prêtre l’empoigna par les cheveux pour l’empêcher de perdre de nouveau conscience. L’adolescent cligna des yeux et put distinguer son tortionnaire. Sa bouche ouverte ne laissa passer qu’un souffle tremblant.
    — Je t’écoute, dit Magister.
    — Pardon, Églantine, dit Louis.
    Personne ne comprit ce qu’il avait voulu dire. Desdémone grimaça en entendant ce nom. Louis s’effondra contre la grille. Un second seau d’eau le ranima à peine.
    Quelque chose brilla au haut de la muraille du monastère, à un endroit que le lierre avait envahi. Cela tomba dans les broussailles en produisant un son mat. Une ombre disparut derrière l’un des bâtiments de service que protégeait le rempart.
    — Bigre, c’est que ça brillait comme de l’or, dit Godefroy.
    Il avait pu distinguer le grand moine qui avait lancé l’objet.
    — Ça suffit, dit Magister. Béni soit Dieu, l’âme de notre brebis égarée est purifiée.
    Louis, inconscient, fut détaché et remis à Desdémone.
    — Il est plus solide que je ne le pensais, dit le prêtre à Firmin avec un sourire satisfait.
    Le père de Louis lui avait ramené des buissons une tiare qui eût suffi à lui acheter une charge d’évêque.
    *
    Les jours qui suivirent la prestation de Magister, Louis fut traité avec tous les égards. La nuit, il fut installé sous la tente et, le jour, il voyagea dans une litière que les prisonniers avaient fabriquée pour lui. Il ne se souvint de rien, pas même d’avoir été grossièrement recousu par Godefroy qui possédait quelques notions de médecine. La fièvre ne commença à baisser qu’à la fin du cinquième jour. Firmin jubilait. Tel que prévu, il était désormais devenu un membre influent de la communauté. On ne prenait plus ses suggestions à la légère.
    — Nous sommes riches, désormais, dit Magister alors qu’ils s’étaient installés autour du feu pour souper.
    Le vin était bon et les victuailles, abondantes, du moins pour eux. Magister avait instauré un jeûne expiateur pour les autres.
    — Nous voilà prêts à prendre le départ pour Avignon. En chemin, nous vendrons une par une les gemmes de cette tiare. Ainsi, personne n’en reconnaîtra la provenance. Une fois que nous serons là-bas, je me mettrai au service du pape. Notre fortune est faite, les amis, et tout cela, c’est grâce à toi, le Gros. Je te fais la promesse que tu en seras le premier récompensé.
    Pendant ce temps, Desdémone tournait en rond dans le camp. Elle n’arrivait à fixer son attention sur rien. Louis lui manquait trop. Elle l’avait veillé presque sans arrêt et avait pansé ses blessures avec une tendresse qu’elle n’avait jamais éprouvée lorsqu’il était conscient. Cela lui fit réaliser qu’elle s’était mise à l’aimer vraiment, du moins d’un

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