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Le jour des barbares

Le jour des barbares

Titel: Le jour des barbares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alessandro Barbero
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leurs trousses, arrivèrent sous les
murs d’Andrinople, un incident se produisit qui nous donne la mesure du climat
de panique et d’hystérie collective qui sévissait depuis le début de l’invasion
gothique : les habitants refusèrent d’ouvrir les portes aux soldats, redoutant
on ne sait quelle trahison, et ce n’est qu’après avoir longuement parlementé qu’ils
acceptèrent de faire entrer dans la ville le seul Sébastianus ; les
soldats durent rester dehors et bivouaquer au pied des murs.

5.
    C’étaient ces mêmes citoyens d’Andrinople qui, aux premiers
jours de l’insurrection, s’en étaient pris à un détachement de mercenaires
goths de l’armée impériale qui avaient depuis longtemps leurs quartiers dans la
ville, avec ce beau résultat que ceux-ci, au lieu de partir pour la Mésopotamie,
s’étaient unis aux rebelles. Maintenant, en revanche, après avoir vu depuis les
remparts les bandes de pillards barbares dévaster leur contrée, ils étaient si
terrorisés qu’ils refusèrent d’ouvrir les portes pour laisser entrer les
troupes régulières commandées par Sébastianus. Le rapprochement entre ces deux
épisodes nous montre l’ampleur de la déstructuration sociale provoquée par ces
deux années de guerre qui, par certains aspects, était presque une guerre
civile. D’un côté il y avait les Goths, qui n’étaient pas, rappelons-le, des
envahisseurs, mais des immigrés et des réfugiés qui s’étaient révoltés à cause
de la manière honteuse dont ils avaient été traités, et qui avaient accueilli
dans leurs rangs une multitude de déserteurs, de hors-la-loi et d’esclaves
fugitifs. De l’autre côté il y avait les soldats de l’armée impériale, eux aussi
recrutés, pour la plupart, parmi les barbares et les immigrés, et qui se
signalaient régulièrement par l’arrogance et la brutalité dont ils faisaient
preuve à l’égard des civils. Entre les premiers et les seconds, la population d’une
grande cité de l’empire ne savait presque plus lesquels valaient mieux, et
finissait par détester de tout cœur les uns comme les autres.
    Tant bien que mal, la nuit se passa, et à l’aube Sébastianus
remit ses hommes en marche. Ils marchèrent durant tout le jour, et vers le crépuscule
ses éclaireurs vinrent l’avertir que les Goths s’étaient installés pour la nuit
à peu de distance de là, sur les bords de la Maritza, dont la vallée remonte
vers l’ouest à travers les monts du Rhodope. Les Romains s’approchèrent sans
bruit du campement ennemi. Sébastianus fit descendre une partie de ses hommes
le long du lit du fleuve, à l’abri des regards, sous le couvert des
broussailles ; puis il attendit une heure avancée de la nuit, et il
attaqua. Surpris dans leur sommeil, les Goths furent massacrés ; cette
fois il n’y eut pas de prisonniers, et l’énorme butin que la bande avait
accumulé au cours de plusieurs semaines de razzias fut récupéré.
    C’est le seul épisode de ce genre qu’Ammien Marcellin
raconte en détail, mais Sébastianus a probablement mené ses opérations de
harcèlement longtemps et avec succès, pendant que les armées des deux empereurs
se constituaient et se mettaient en marche. Au cours de l’été, Fritigern et les
autres chefs goths, qui supervisaient les mouvements de leurs hommes depuis les
deux camps fortifiés, durent commencer à se rendre compte que quelque chose n’allait
pas. Le pays n’était plus aussi sûr pour les Goths qu’il l’avait été jusqu’alors ;
certaines bandes de jeunes hommes partis pour une razzia ne revenaient plus, certains
campements isolés étaient attaqués par surprise et détruits, et l’afflux de
butin commençait à diminuer. De toute évidence, il y avait un problème. Même si
les espions et les déserteurs rapportaient que l’armée de Valens était encore
loin, Fritigern décida de ne pas courir de risques. Il suspendit les razzias, rappela
les bandes et ordonna aux chefs qui lui obéissaient de lever le camp.

6.
    Les Goths démontèrent leurs campements fortifiés et se
mirent en marche à travers toute la Thrace, pour se réunir à l’endroit indiqué
par Fritigern : la cité de Cabyle, sur le fleuve qu’aujourd’hui les
Bulgares appellent Tundza. Le choix de ce point de rencontre n’était
certainement pas fortuit, mais répondait à une conception stratégique ; c’était
en effet une zone centrale, d’où, en cas de besoin, la horde aurait pu soit

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