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Le jour des barbares

Le jour des barbares

Titel: Le jour des barbares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alessandro Barbero
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général de son temps. Il avait rapidement fait carrière, car
l’empire avait un grand besoin de soldats de valeur, et en règle générale les
individus capables étaient remarqués. Sébastianus était un homme qui n’avait
pas de vices et ne vivait que pour la guerre ; il était soucieux du
bien-être de ses soldats, mais ne s’encanaillait pas avec eux, nous dit Eunape,
et il exigeait une discipline rigoureuse ; comme toujours dans ce genre de
cas, il était admiré mais n’était pas aimé. Il était étranger à la corruption
et ne s’était jamais enrichi, et cela aussi indisposait beaucoup de gens. Les
eunuques qui contrôlaient toute la vie de la cour impériale et supervisaient
les promotions le détestaient ; et comme il était pauvre, se débarrasser
de lui n’avait été qu’un jeu d’enfant : à la première occasion, ils lui
avaient retiré le commandement et l’avaient mis d’office à la retraite. Mais
lorsque la révolte des Goths éclata, Sébastianus, parti mener une vie paisible
en Italie, demanda à reprendre du service, et Valens, pour une fois, n’écouta
pas ses eunuques et le rappela auprès de lui.

4.
    Sébastianus, donc, fut chargé de mettre sur pied une force d’intervention
mobile et de commencer les opérations de harcèlement contre les Goths pour les
affaiblir peu à peu, en attendant que les deux armées impériales, celle de
Valens et celle de Gratien, aient réalisé leur jonction. On lui demanda combien
d’hommes il voulait, et il répondit qu’il ne lui en fallait que deux mille, pourvu
qu’il puisse les choisir lui-même. Valens fut agréablement surpris : il n’avait
eu affaire jusqu’alors qu’à des généraux qui se plaignaient d’avoir trop peu de
troupes et demandaient constamment des renforts. Sébastianus expliqua que, si
les choses se passaient comme il l’entendait, les soldats des autres régiments
ne tarderaient pas à se porter volontaires et ne seraient que trop contents de
venir combattre sous ses ordres, car il n’était pas vrai, comme le croyaient
les eunuques, qu’il était indifférent à la richesse : avec lui, ceux qui
se battaient bien et obéissaient aux ordres s’enrichissaient – mais avec le
butin pris à l’ennemi, et non grâce à des pots-de-vin ou à des extorsions
commises aux dépens des civils, comme c’était le cas dans les autres régiments.
    Cette réponse nous aide à comprendre pourquoi Sébastianus
était si peu apprécié de ses collègues. Mais on vit tout de suite que ses
propos n’étaient pas une simple vantardise et qu’il était vraiment un général
hors pair. Toutes les informations disponibles indiquaient que les barbares
avaient constitué deux grands campements fixes, composés chacun de plusieurs
milliers de chariots ; l’un très au nord, près du Danube, l’autre en deçà
des Balkans, à Béroé – l’endroit même où, l’année précédente, l’armée de
Frigéridus s’était installée, et d’où l’on dominait aussi bien les routes dirigées
vers le nord que celles qui conduisaient vers l’ouest, c’est-à-dire vers l’empire
d’Occident. On aurait dit que les barbares s’organisaient pour transformer le
pillage de la Thrace, qui n’avait été jusqu’alors qu’une activité improvisée, en
une espèce d’industrie permanente : ces campements fixes étaient comme
deux relais de poste, fortifiés et imprenables, permettant d’acheminer vers le
nord, vers le pays des Goths, le butin et les esclaves. Les bandes de pillards
sortaient régulièrement de ces enceintes fortifiées pour razzier la campagne, un
secteur après l’autre, et revenaient chargées de butin. L’une de ces colonnes
de pillards s’était aventurée très au sud, jusqu’à la région d’Andrinople ;
mais là, les prisonniers avaient révélé que l’empereur s’approchait à la tête d’une
forte armée, et les Goths étaient aussitôt repartis se mettre en sûreté dans
leurs campements.
    Sébastianus recruta ses deux mille hommes en en
sélectionnant une centaine dans chacun des meilleurs régiments. Et à la tête de
cette task force, comme nous l’appellerions aujourd’hui, il partit à
marches forcées à la poursuite des Goths. Ces derniers avaient quelques jours d’avance ;
leur colonne était toutefois si lente, à cause du butin qu’ils transportaient, que
Sébastianus avait toutes les chances de les rejoindre et de les mettre en
pièces. Mais quand ses hommes, lancés à

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