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Le lacrima Christi

Le lacrima Christi

Titel: Le lacrima Christi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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réfléchir. Gurnell laissa retomber sa main et recula.
    — Allez-vous bien, Maîtresse ? s'enquit-il, l'air perplexe.
    — Oui, Maître Gurnell. Mon sommeil a été troublé mais j'ai l'esprit clair. C'est pour que nous venions tous ici découvrir la tête fichée sur le piquet qu'on a allumé ce feu ; c'est donc l'assassin qui l'a déclenché. C'est bien ce que vous faites à la guerre, n'est-ce pas ? Planter les têtes des traîtres sur le Pont de Londres ? Nous en avons eu notre bonne part à Cantorbéry.
    Elle s'interrompit.
    — Et à Towton. Vous serviez les Lancastre, je crois ?
    Le capitaine ne broncha pas.
    — Je serai aussi honnête et franc que vous, Maîtresse Swinbrooke. Je suis un soldat, un mercenaire, je l'admets.
    Je me bats pour gagner or et argent et, lorsqu'ils s'épuisent, moi aussi. Peu me chaut que ce soit le grand Khan de Tartane qui monte sur le trône d'Angleterre, cracha-t-il. Je suis un des vers de la terre, fils de paysan, petit-fils de paysan. J'avais deux options dans la vie : me rompre l'échiné sur une araire ou prendre l'épée et me battre.
    Il essuya sa gorge en sueur.
    — C'est vrai, j'étais à Towton. Et je n'ai pas volé ma solde. Les rangs des partisans de Lancastre se sont rompus et ce fut la débandade. Édouard d'York avait ordonné de tuer les nobles et d'épargner la piétaille. C'est pour cela que je suis ici aujourd'hui.

    Il s'approcha.
    — On m'a laissé le choix : changer de camp et recevoir un habit neuf, un repas chaud et quelques piécettes ou être pendu à un orme tout proche. Vous, Madame le médecin, qu'auriez-vous fait ?
    Il parlait avec passion et ses yeux brillaient de larmes.
    — Je suis navrée, s'excusa Kathryn en tendant la main.
    Mon univers est moins implacable que le vôtre, Gurnell ; je l'oublie parfois.
    Un sourire fendit soudain les traits durs du capitaine et il serra la main de la jeune femme.
    — Vous ne mâchez point vos mots, Maîtresse Swinbrooke. J'espère que vous êtes aussi brusque avec cet Irlandais qu'avec moi.
    — Même davantage.
    Gurnell se mit à rire et, la guidant avec douceur par le coude, la ramena au château. Kathryn leva les yeux vers le ciel.
    — Quelle belle nuit d'été ! murmura-t-elle. Regardez le ciel, Gurnell, c'est la pleine lune.
    Elle entendit du bruit au fond de la prairie. Un renard roux, la tête haute, un connil dans la gueule, se dirigeait en silence vers les arbres.
    — Pourtant la mort rôde tout autour de nous.
    Elle jeta un coup d'œil derrière elle. De la fumée tourbillonnait encore ; une étincelle fusait de temps en temps ; des cendres, flottant dans la brise nocturne, leur souillaient visage et vêtements.
    — Je voudrais un peu de vin.
    Gurnell toussa et l'entraîna.
    — Pour vous répondre, Maîtresse, je dois dire que ficher des têtes sur des piques était chose commune. Quand le père et le frère du roi ont été occis à Wakefield, les Lancastre ont planté leurs têtes sur Micklegate Bar, à York, et les ont coiffées de couronne de papier. Après Towton, Édouard les a fait enlever et les a remplacées par celles des partisans des Lancastre.
    La jeune femme s'arrêta au bas des marches. Lady Elizabeth s'était retirée et il n'y avait plus que deux hommes de Gurnell qui, munis de torches et épée au clair, gardaient l'entrée arrière du manoir.
    — Où est Mawsby ? s'enquit l'apothicaire.
    Gurnell posa la même question à l'une des sentinelles.
    — Oh, il est occupé avec Lady Elizabeth ! répondit cette dernière en désignant la maison du menton. Elle lui a demandé de rester. Ils sont rentrés à présent et prennent du vin chaud épicé dans le solar. Lady Elizabeth pleurait.
    — Allons-nous les rejoindre ? proposa Gurnell.
    Kathryn monta l'escalier. Gurnell lui tenait toujours le coude, geste d'amitié qu'elle apprécia.
    — Non, déclara-t-elle. J'ai besoin de réfléchir, Maître Gurnell, mais j'ai fort envie d'un gobelet de ce vin épicé.

    Ils pénétrèrent dans le château et le capitaine lui fit emprunter des couloirs jusqu'à une petite pièce chaulée.
    Une jonchée propre couvrait le sol. Au centre se trouvait une table sur tréteaux encadrée de bancs. On avait cloué un crucifix sur le mur du fond et, dessous, installé un vaisselier délabré garni d'un pichet d'étain et de quelques coupes.
    — C'est là que les paysans déjeunent quand il fait mauvais temps, expliqua Gurnell.
    Kathryn s'assit sur un banc. Gurnell sortit et revint avec un pichet de

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