Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston
seule une telle affaire. Enfin, une jeune fille comme il faut,
ajouta-t-il, perfide, mais Megan ignora superbement le sous-entendu.
Il se tourna alors vers
Gabriel, toujours inexpressif.
– Si
Victoria ne vous connaît pas, pourquoi ne cesse-t-elle de vous dévisager
ainsi ? interrogea-t-il, contrarié.
– Je
crois qu’elle le trouve très séduisant, avança Megan d’une voix suave.
Jeremy
et Gabriel la contemplèrent avec horreur, mais aucun des deux n’eut le temps de
protester puisque Victoria revint à ce moment. Avant de se rasseoir, elle leur
reversa du thé, et comme par inadvertance, sa main frôla celle de Gabriel qui
la retira vivement.
Cette tâche accomplie,
elle fixa Jeremy avec gravité.
– Alors,
Mr. Shaw, m’aiderez-vous à lever le voile sur l’Astrum et la mort de mon
père ?
– Naturellement,
acquiesça le journaliste avec morgue. Du reste, j’ai déjà commencé à y
travailler…
Et
Jeremy entreprit de raconter leur expédition au Pays de Galles.
X XX
Durant
tout le voyage jusqu’à Paris, Cassandra garda son fils près d’elle, terrifiée à
l’idée qu’il puisse de nouveau disparaître. Sans cesse sa pensée revenait à
Angelia et au sourire triomphant qu’elle lui avait adressé. Était-ce un
avertissement ? Comment avait-elle pu être naïve au point de croire qu’Angelia
ne connaissait pas l’existence d’Andrew ? Une fois encore, l’image de son
époux défunt la traversa, et elle serra plus fort son fils contre elle.
Sur
le bateau, une fois remise en partie de ses émotions, elle relata à Julian
l’entretien qu’elle avait eu avec lord Westbury à propos de Sarah Ellison. Elle
n’avait pas encore abordé le sujet avec lui, et souhaitait connaître son point
de vue sur la question.
– Sarah
Ellison ? répéta Julian quand elle eut achevé son récit. Je n’ai jamais
entendu ce nom. Quant à imaginer mon père amoureux, cela dépasse les limites de
mon imagination ! J’essaierai d’en apprendre davantage auprès de ma mère,
mais s’il lui a interdit d’en parler, elle n’osera pas désobéir. Pensez-vous
que Sarah Ellison, ou quel que soit son vrai nom, pourrait vous être
apparentée ?
– Je
n’ose y croire, répondit Cassandra en secouant doucement la tête.
Ils
traversèrent la Manche de nuit et arrivèrent à Paris en milieu de matinée. Le
chemin de fer les déposa à la gare du Nord, alors en pleine reconstruction par
l’architecte Jacques Hittorff.
Depuis
l’avènement du Second Empire en 1852, Paris se transformait de manière
radicale. Sous l’impulsion de l’empereur Napoléon III, Georges Eugène
Haussmann, préfet de la Seine, s’employait à moderniser et embellir la capitale
en créant de grands axes de circulation, des places dégagées, des parcs et des
jardins.
Aux
ruelles étroites et insalubres s’étaient ainsi substituées des avenues
rectilignes, spacieuses et aérées, à l’image des boulevards de Magenta, de Strasbourg
et de Sébastopol qu’emprunta le fiacre de Julian et Cassandra. Derrière les
vitres défilait une suite ininterrompue d’immeubles en pierre de taille de cinq
ou six étages avec porte cochère, décoration sculptée, balcons, corniches,
mansardes et toiture en ardoise, caractéristiques du Paris haussmannien.
Après
avoir descendu les boulevards, l’attelage déboucha sur la place du Châtelet,
qui avait également changé de visage avec la construction récente en vis-à-vis
de deux théâtres d’inspiration Renaissance italienne, le théâtre impérial du
Châtelet et le Théâtre-Lyrique.
Le
fiacre bifurqua ensuite rue de Rivoli, qu’il longea jusqu’à la place du
Palais-Royal. Là, des chambres avaient été réservées à l’hôtel du Louvre,
établissement de prestige situé face au musée du même nom.
Le
temps d’installer enfants, domestiques et gouvernantes dans quelques-unes des
sept cents chambres que comptait l’hôtel, et Cassandra repartait déjà.
– Je
connais des personnes qui pourront certainement m’indiquer l’emplacement actuel
du tableau de Bosch.
– Vos
amis receleurs et cambrioleurs, je suppose ? fit Julian, affectant une
mine sévère.
– Exactement,
confirma Cassandra avec un sourire. Malheureusement, vous ne pouvez venir avec
moi.
– Je
m’en passerai fort bien, ne vous inquiétez pas. Plonger dans le monde de la
criminalité ne fait pas partie de mon programme parisien. Je vais plutôt
emmener Laura visiter le
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