Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston
convenait aux vêtements d’une époque où l’orgueil de la beauté
physique et le raffinement de l’art de plaire étaient magnifiés par le costume,
et où les rois rivalisaient de luxe et d’élégance dans leur toilette pour
exprimer leur suprématie. Le pourtour du corsage de la robe était cousu de
médaillons aux motifs floraux et de feuilles d’acanthe, alliances d’or et
d’argent, sertis par des griffes lobées de rubis ronds et de pierres noires
carrées et triangulaires, onyx, obsidiennes, hématites, tous taillés en
cabochons. D’innombrables perles de culture d’une blancheur nacrée, des
milliers peut-être, parsemaient le costume, tandis que le gorgerin et le
bustier étaient couverts d’épaisses broderies au fil noir et doré. Au niveau de
la taille, une large ceinture de velours et de brocart était fermée par une
boucle en or massif de forme circulaire, sur laquelle était ciselé le motif du
dragon. Un pendentif en losange intégré au gorgerin et associant perles, émail
et pierres polychromes, complétait la tenue.
Tous s’étaient figés
devant cette apparition.
– Isis…
La
femme sourit, d’un sourire lent, énigmatique. Effrayant aussi.
– Non, je ne suis pas
Isis. Mon nom est Cornelia.
Clayton fit un pas vers
elle et jeta un coup d’œil à la dépouille dans le cercueil.
– Vous lui ressemblez
trait pour trait… Qui êtes-vous ?
– La gardienne du Livre
d’émeraude…
– …
Et surtout la Dame Noire. C’était vous chez sir Francis Abernathy !
Sans
répondre, Cornelia fit à pas lents le tour du cercueil, sa main blanche
effleurant le rebord, ses prunelles couleur d’ambre fixées sur le visage
d’Isis.
– Vous
connaissez son histoire, n’est-ce pas ? Isis a été condamnée à mort par la
Sainte-Vehme pour sorcellerie. Mais ce que ses juges recherchaient en réalité,
c’était son précieux manuscrit. Ils ont essayé de le lui soutirer par la
torture, mais elle n’a jamais parlé. Depuis des siècles, il était caché ici, à
l’abri des convoitises…
À
l’étonnement de Cassandra et ses compagnons, une expression d’une infinie
tendresse vint adoucir ses traits hiératiques.
– Isis
a subi le supplice de la vierge de fer, mais nous avons pu restaurer son corps.
– Nous ?
Ce
fut ce moment que choisit un grand jeune homme blond aux prunelles ambrées
comme celles de Cornelia pour faire son apparition, tout sourire et l’air
surexcité. Il semblait également tout droit sorti du XVI e siècle avec son costume chatoyant
surchargé d’or, d’argent, de perles et de joyaux. Il portait une fine chemise
blanche et, au-dessus, un pourpoint sans manches en brocart gaufré et velours
noir et brun. Sur les boutons de métal doré qui l’ornaient était gravée là
encore l’image du dragon d’Isis.
– Quel
bonheur de vous voir ! s’exclama-t-il avec jovialité en leur serrant à
tous chaleureusement la main. Vous ne pouvez savoir à quel point je vous suis
reconnaissant de nous avoir délivrés de cette mission ingrate. Allons boire
pour fêter cela ! Mais je ne me suis pas présenté, ajouta-t-il devant
leurs mines interloquées. Mon nom est Vladislav, mais vous pouvez m’appeler
Vlad.
– Mais… qui êtes-vous ?
balbutia Cassandra.
– L’autre
gardien du Livre d’émeraude, répondit Vlad avec une grimace d’ennui. Une tâche
assommante…
– Vladislav, intervint
Cornelia d’un ton de reproche.
Celui-ci
la gratifia d’un geste désinvolte de la main. Au même moment, une porte
jusque-là invisible s’ouvrit dans l’un des murs, dévoilant le début d’un
escalier. Vlad s’y engagea, faisant signe aux autres de le suivre. Abasourdis,
Cassandra et ses compagnons hésitèrent un instant avant de lui emboîter le pas.
Les marches les menèrent dans la salle du château où ils avaient passé la nuit
précédente. Mais elle n’était plus vide à présent : des tapisseries et des
tableaux étaient apparus sur les murs durant leur absence, ainsi que des
chaises et une longue table rectangulaire couverte de chandeliers et d’une
abondance de mets d’aspect succulent : poissons frits et grillés,
volailles rôties, pommes de terre, filets de lapin et de bœuf, légumes,
potages, salades, entremets, glaces, sorbets et plateaux de fruits.
Cornelia prit place à un
bout de la table, Vladislav à l’autre.
Jeremy
s’empressa de les imiter. Il déplia sa serviette et en glissa un coin dans
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