Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston

rauque de sa respiration et le grésillement de sa lampe. Il était comme
seul au monde, enterré vivant dans les profondeurs glacées de la forteresse.
    Il
continuait de ramper cependant, les dents serrées. Enfin, la voûte du boyau
s’éleva et Nicholas put se mettre à genoux. Il brandit sa lampe devant lui pour
percer les ténèbres ; aussitôt, la flamme baissa.
    –  Le
même phénomène que lors des meurtres de la Dame Noire, marmonna-t-il. Pourvu
qu’un cercueil ne m’attende pas au bout du chemin…
    Il
progressa encore de quelques pouces et réussit à se mettre debout. La flamme,
qui était devenue minuscule, rendit son dernier souffle. Nicholas se retrouva
dans le noir. C’est alors qu’il se rendit compte qu’il tremblait sans pouvoir
se maîtriser. Des élancements commencèrent à lui vriller le crâne, et il porta
une main à son front humide de sueur. Il avait très froid soudain. Il ouvrit la
bouche pour appeler ses compagnons à l’aide, mais ne put proférer un mot.
Chaque inspiration lui déchirait le ventre. La douleur qui avait débuté dans
son crâne crépitait à présent dans tous ses membres, de plus en plus vive, de plus
en plus aiguë, jusqu’à devenir insoutenable.
    Le
tremblement qui secouait son corps parut se propager dans le sol sous ses
pieds. Ses doigts gourds lâchèrent la lampe qui alla se briser sur les pierres.
    Incapable de lutter davantage,
il perdit connaissance.
    *
    Lorsque
Nicholas reprit conscience, Megan était penchée au-dessus de lui, blême et
décoiffée. Les autres étaient là aussi, offrant un piteux spectacle avec leurs
vêtements couverts de terre, quand ils n’étaient pas déchirés.
    Nicholas
se redressa sur ses coudes, ce qui lui arracha une plainte. Même si la douleur
était redevenue supportable, sa tête le faisait toujours souffrir et ses
membres ankylosés semblaient s’être changés en plomb.
    –  Que
s’est-il passé ? l’interrogea Cassandra. Avez-vous vu quelque chose ?
    –  Non…
marmonna-t-il, juste l’obscurité… Où sommes-nous ?
    –  Dans
une salle creusée au sein même de la montagne, répondit Julian qui faisait
lentement le tour de la pièce, une main posée sur la paroi rocailleuse. On dirait
qu’il n’y a pas d’autre issue que le tunnel par lequel nous venons d’arriver.
Approchez vos lampes des murs que nous y voyions plus clair.
    Demeurée
seule avec Nicholas, Megan lui chuchota d’une voix que l’angoisse
altérait :
    –  Ce
n’est pas la première fois que cela se produit, c’était encore une de vos
crises, n’est-ce pas ? Votre état s’aggrave…
    Nicholas se força à
sourire.
    –  Ne vous inquiétez pas,
je vais bien à présent.
    Il
se releva en réprimant une grimace et rejoignit les autres. Ils tâtonnèrent
quelques minutes, jusqu’à ce que Cassandra crie :
    –  Ici, il y a un
passage !
    Dissimulée
dans les replis de la muraille s’ouvrait en effet une fissure suffisamment
large pour laisser passer un homme.
    –  Je
suppose que nous n’avons pas d’autre choix que de continuer, soupira Julian,
hormis celui de faire demi-tour.
    Le
passage s’élargissait après quelques yards, mais il y régnait là encore une
obscurité dense. Un silence pesant emplissait l’espace voûté, tandis qu’une
buée froide semblait sourdre des vieilles pierres humides. Tout à coup, les
flammes des lampes commencèrent à décliner et une sensation désagréablement
familière fit tressaillir Clayton et Jeremy.
    –  Les
ténèbres, gémit le journaliste. Comme chez sir Francis Abernathy…
    Déjà,
elles se refermaient sur eux, sournoises, compactes, implacables. Comme dans le
cauchemar de Cassandra, elles les paralysèrent en s’enroulant autour de leurs
corps tels des serpents. Mais cela ne dura pas. Un cri de douleur se fit
entendre dans le passage. Presque aussitôt, les ténèbres commencèrent à se
diluer et les lampes se ranimèrent, révélant Julian qui se tenait le bras.
    Une
longue entaille déchirait ses vêtements du coude au poignet et le sang coulait
sur le sol.
    –  Qui vous a fait
cela ? s’alarma Cassandra.
    –  Je
l’ignore… J’ai dû m’écorcher lorsque nous avons rampé… Mais la blessure est
sans gravité.
    Le
temps de panser la plaie de Julian et ils poursuivaient leur chemin, davantage
encore sur leurs gardes, jusqu’à déboucher dans une grande salle circulaire aux
murs nus. Quatorze statues représentant des silhouettes sans visage