Le Maréchal Jourdan
général de l’armée française, la mésentente régnait entre Houchard et
Duquesnoy, délégué de la Convention. Quant à la stratégie à mettre en oeuvre pour la
libération de Dunkerque, Duquesnoy se faisait le porte-parole de Carnot. Ce dernier, toujours à
Paris, préconisait une action de masse. Il avait prélevé trente-cinq mille hommes à
l’armée du Rhin afin de renforcer celle du Nord, portée ainsi à soixante mille
combattants et, par un pari audacieux, comptait, en attaquant successivement les trois corps
d’York, les écraser l’un après l’autre sans leur laisser le
temps de se réunir. C’était la tactique préconisée autrefois par Frédéric II
qu’appliquera trois ans plus tard Bonaparte en Italie. Houchard aurait préféré
assaillir simultanément les forces de l’adversaire, agissant suivant les règles
préconisées par les manuels. Mais, avant le déclenchement de l’opération, ils
tombèrent d’accord pour renforcer la garnison de Dunkerque. Duquesnoy, qui avait une
totale confiance en lui, chargea Jourdan de cette mission. À la tête de cinq bataillons, il
devait, sans se faire découvrir par l’ennemi, en progressant le long du canal de
Gravelines, pénétrer dans cette ville, l’occuper, puis se porter sur Bergues. Il
devait également tenir cette localité et de là jeter deux bataillons dans Dunkerque. En
définitive, le projet jugé trop hasardeux ne fut pas matérialisé et Jourdan resta à Cassel,
base de départ de l’armée française, avec sa nouvelle division. Mais le seul fait
que l’on ait songé à lui montre à quel potit il jouissait de la confiance des
autorités politiques. Il n’était pas moins bien vu par ses chefs militaires.
Ayant fait triompher son potit de vue, Houchard chargea vers le 20 août la division
Barthel d’attaquer le prince d’Orange. Mal conduite, l’affaire
échoua et Barthel fut repoussé. Le seul résultat fut d’alerter Freytag. Houchard,
espérant redresser la situation, écrivit le 22 août au Comité de salut
public : « Le général Jourdan me marque qu’il marche avec sa
division légère au secours du général Barthel et j’espère qu’il rétablira
les choses et repoussera l’ennemi. »
À la suite de cet échec, Barthel, qui était déjà un homme âgé, fut relevé de son commandement
et Jourdan reçut la responsabilité de tout le centre du dispositif français. Cependant,
Houchard, décidé à poursuivre l’offensive suivant sa méthode, se porta contre
Freytag et l’attaqua le 6 septembre. Il le refoula loin de
l’Yser mais assez maladroitement. Au lieu de le séparer d’York, il le
rabattit sur ce dernier, augmentant sa capacité de défense. Une grande bataille allait donc
suivre s’il voulait délivrer Dunkerque. Elle se déroula le 8 septembre. À
ce moment, Houchard n’avait avec lui que quarante mille hommes sur les soixante
mille que comptait son armée. Il allait devoir enlever par une attaque frontale les villages de
Hondschoote, Killem et Beveren ainsi que plusieurs hameaux ou fermes également fortifiés. Au
centre, Jourdan s’empara de Hondschoote, le perdit, le reprit et à ce moment réussit
à s’y matitenir. Cependant Houchard, devant la résistance vigoureuse des Anglais,
hésitait à poursuivre son offensive. Ce furent Jourdan et le représentant Levasseur qui, se
mettant résolument à la tête de leurs troupes, achevèrent de décider de la journée.
À ce moment, la garnison de Dunkerque, conduite par Hoche, effectua une sortie dans le dos
des Anglais. Découragé, le duc d’York, voyant que Cobourg, sur qui il avait compté
pour réaliser une diversion, ne bougeait pas, décida de battre en retraite et de lever le siège
en direction de Furnes et d’Anvers, abandonnant derrière lui tout son parc
d’artillerie. Dunkerque était sauvée. Incontestablement, le héros de la journée
était Jourdan. Il avait été blessé à la poitrine dans la journée par un éclat de biscaïen,
blessure au demeurant sans gravité.
Ses exploits furent naturellement rapportés dès qu’on les connut dans le Journal du département de la Haute-Vienne . À cet instant, il était vraiment devenu le
personnage le plus important de son département !
Houchard, vainqueur, aurait dû normalement poursuivre l’armée combinée
d’York et de Freytag, mais, les jugeant encore très redoutables,
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