Le Maréchal Jourdan
adjudants généraux qu’il avait amenés avec
lui, commença-t-il, en plein accord avec Duquesnoy, par remettre de l’ordre
« dans la boutique ». Après quoi, ayant deviné ou à peu près quelles
étaient les titentions de son adversaire, il s’appliqua à dresser un plan de
campagne assez ambitieux qu’il soumit au Comité de salut public
(29 septembre). On voit qu’il apprenait vite les arcanes de son métier. En
agissant de la sorte, il allait au-devant des désirs de Carnot qui souhaitait le voir prendre
le plus rapidement possible l’offensive pour libérer Maubeuge.
Le général autrichien, maître depuis l’été de la vallée de l’Escaut,
s’y était solidement retranché et comptait partir de cette base pour attaquer
Maubeuge, préliminaire indispensable aux opérations ultérieures. Jourdan proposa donc
d’agir avec deux armées d’environ soixante mille hommes chacune pour
prendre les Autrichiens en tenailles. Afin d’être en mesure de concrétiser ce plan,
il réclama des renforts, environ vingt mille hommes, surtout de la cavalerie, car celle des
Autrichiens passait pour particulièrement puissante et redoutable alors que la sienne était des
plus faibles.
Carnot jugea bon le plan de Jourdan mais estima avec raison qu’il
n’avait pas les moyens de l’exécuter, d’autant que les
fortifications de campagne élevées par les Autrichiens dans la vallée de l’Escaut
lui semblaient difficiles à enlever par une armée qui manquait de pratique. Il se contenta donc
de programmer une offensive limitée à droite dans la vallée de la Sambre, avec pour objectif de
se porter au secours de Maubeuge, située sur cette rivière. Comme renfort, le comité fit savoir
à Jourdan qu’il mettait son ancienne armée des Ardennes à sa disposition. Ainsi,
celui-ci disposerait de quarante-quatre mille hommes, articulés en cinq divisions. Mais, malgré
ses demandes réitérées, il n’avait sous ses ordres que six mille cavaliers. Par
contre, il était particulièrement bien pourvu en artillerie.
Bien qu’il eût déclaré à plusieurs reprises qu’il avait toute confiance
en lui, Carnot estima avec sagesse qu’il avait besoin d’un soutien
personnel et moral et, quoiqu’il eût déjà sur place le représentant Duquesnoy qui
avait montré son efficacité, il décida de se rendre lui-même au quartier général. Il y arriva
dans la première quinzaine d’octobre et se déclara favorablement impressionné par
l’ordre et le travail méthodique qu’il y découvrit dans une lettre
adressée le 14 du même mois, à la veille de la bataille, au Comité de salut public.
Si Jourdan, ce qui pouvait paraître bien naturel, faisait montre d’une certaine
timidité devant les énormes responsabilités qui étaient à présent les siennes, le prince de
Saxe-Cobourg, par contre, péchait plutôt par excès de confiance. Il disposait de près de
quatre-vingt mille hommes, soit le double de ses adversaires qu’il savait commandés
par un général qu’il considérait comme un novice.
Estimant les troupes françaises qui allaient tenter de se porter au secours de Maubeuge de
faible valeur et voulant précipiter la reddition de la place, il commença par laisser un corps
de siège beaucoup trop important devant la ville : trente-trois mille hommes,
commandés par Clerfayt, ce qui n’accéléra en rien les opérations du siège proprement
dit. Ensuite, il ne se dépêcha pas de demander au duc d’York, avec qui, depuis
l’affaire de Dunkerque, il était en froid, de venir le renforcer avec son corps
d’armée. Il dispersa encore vingt mille soldats à occuper divers potits stratégiques
en direction de Beaumont et de Philippeville, si bien qu’il ne lui en restait
qu’un peu plus de trente mille pour affronter Jourdan.
Il est vrai qu’en tacticien aguerri, décidé à jouer un jeu purement défensif, il
prit position sur la rive droite de la Sambre, occupant une série de hauteurs et de bois,
couronné par les villages de Satit-Vaast, Satit-Rémy, Dourlens et Wattignies, qu’il
se dépêcha de faire fortifier. Disposant d’une importante artillerie dont les
batteries croisèrent leurs feux, il aurait déclaré aux officiers de son état-major, en riant,
après avoir longuement inspecté ses positions : « S’ils
viennent ici, je me fais sans-culotte ! »
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