Le Maréchal Jourdan
accompagnée du roi de Rome, allait bientôt le rejoindre. Aussi, Jourdan (et il
n’était pas le seul) se demandait s’il n’était pas de retour
pour une très longue période. En n’allant pas lui faire allégeance, ne risquait-il
pas de perdre une nouvelle fois tous les avantages attachés à sa fonction ? On est
toutefois étonné de ce que, se remémorant la manière dont il avait été traité par
l’empereur, le maréchal pensa pouvoir croire que Napoléon serait plus équitable avec
lui dans l’avenir.
Si quelqu’un avait dû se détourner de l’empereur, c’était
bien lui. Il est possible qu’inconsciemment ait joué en lui le vieux réflexe
anticlérical, car il trouvait qu’il y avait vraiment trop de prêtres autour du roi.
Sa perplexité devait être grande, car il attendit tout de même quatre jours avant de se
présenter aux Tuileries, ne voulant pas donner à son nouveau revirement un caractère trop
hâtif. Napoléon, qui avait vu un certain nombre de personnages sur lesquels il comptait lui
faire grise mine, se montra plutôt aimable avec Jourdan, lui promettant de faire appel à ses
services. Après quoi, il le fit attendre et Jourdan, quelque peu revenu de ses illusions, ne
mit de son côté aucun empressement à solliciter de nouvelles fonctions. Très vite, il en arriva
à se demander s’il n’avait pas commis un pas de clerc.
Il était entré de nouveau en rapport avec Fouché qui rassemblait autour de lui un certain
nombre d’anciens Jacobins, lesquels avaient tous beaucoup évolué. Le ministre
conseilla au maréchal de prendre ses distances et, tout en servant le régime,
d’éviter les excès de zèle. Jourdan, qu’avaient agacé les mensonges de
Napoléon à propos de sa collusion avec Metternich, comprit le sens profond des paroles de
Fouché et, comme les promesses de l’empereur ne se concrétisaient pas, il
n’entreprit aucune démarche pour obtenir un poste et se retira au Coudray. Il ne put
toutefois éviter de faire acte de présence avec les autres maréchaux à la cérémonie du Champ de
Mai qui se ttit le 2 juin. Le même jour, il était nommé pair de France mais se garda
bien de faire acte de présence à cette assemblée ni même d’entreprendre les
démarches qui accompagnaient une telle nomination.
Deux jours plus tard, le 4 juin, il apprit que l’empereur
l’avait enfin désigné comme commandant de la 6 e région militaire
avec siège à Besançon. Le poste était d’importance, car la place était un verrou qui
garantissait la frontière française et il était à craindre que, dans le cadre de la nouvelle
coalition contre la France, les Autrichiens ne cherchent à le forcer. Toutefois, faisant
siennes les recommandations de Fouché, Jourdan ne mit aucune hâte à gagner cette ville et y
parvtit juste deux ou trois jours avant Waterloo. Il y était encore le 26 du mois, alors que
Napoléon avait une nouvelle fois abdiqué depuis quatre jours. Fouché, qui avait pris la tête du
gouvernement provisoire afin d’être en mesure de négocier avec Wellington en
attendant le retour du roi, le nomma à la tête de l’armée du Rhin à la place de
Rapp, qu’il jugeait trop bonapartiste. Rapidement, Jourdan se rendit compte que
cette armée n’existait que sur le papier et il ne quitta pas Besançon.
Quoique son sort lui parût désormais assez incertain, car Louis XVIII et son
entourage semblaient assez mal disposés vis-à-vis de ceux pour qui ils n’avaient eu
que des bontés et qui, malgré cela, s’étaient remis au service de
l’usurpateur, Jourdan écrivit le 22 juillet au ministre de la Guerre,
demandant l’autorisation de venir à Paris afin de « présenter moi-même au
roi l’hommage de mon respectueux dévouement et de mon inviolable
fidélité » !
C’était se comporter avec une certaine impudence. Pour seule excuse, il
n’était pas le seul à avoir agi de la sorte et à tout prendre, son rôle pendant les
Cent-Jours avait été des plus minces. Le roi, comme avec beaucoup de ses camarades bien
davantage compromis que lui, se sentit obligé de jouer la clémence, d’autant que,
dans les circonstances troublées du moment, il pourrait être amené à faire appel aux services
du maréchal. Le 31, ce dernier reçut donc par retour du courrier l’autorisation
demandée, sous la seule réserve qu’il laisserait en son
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