Le maréchal Ney
de Berlin, qu’il recevait régulièrement, se montrait tout d’un coup belliqueuse, ne cessant de proclamer : « L’Allemagne aux Allemands. »
Tout de même, Ney désirait voir sa famille et il sollicita une permission. Berthier commença par la lui refuser, puis à la fin de l’été elle lui fut accordée afin de lui permettre d’assister à la naissance de son deuxième fils. Il quitta son quartier général à la fin d’août 1806, sans savoir qu’une nouvelle coalition s’était nouée le mois précédent entre l’Angleterre, la Russie et la Prusse. Prévu pour un mois, le congé ne dura que huit jours. Arrivé à Paris le 13 septembre, Ney en repartit le 20 pour rejoindre son corps d’armée. L’armée prussienne était en pleine mobilisation.
Une nouvelle guerre commençait.
C HAPITRE V
ENCORE DES BATAILLES, TOUJOURS DES VICTOIRES
(1806-1807)
Se croyant toujours au temps de Frédéric II, l’état-major prussien se berçait d’illusions sur la valeur réelle de son armée. S’ils avaient lutté avec plus ou moins de succès contre les troupes françaises de la Révolution, jamais les généraux du roi Frédéric-Guillaume ne s’étaient trouvés en face de Napoléon. À la cour de Berlin, un parti de la guerre, mené par la reine Louise et le prince Louis-Ferdinand, prenait de plus en plus d’importance et influait chaque jour sur la médiocre personnalité du souverain. Incurablement romantique, la reine, qui avait ébauché un amour platonique avec le tsar Alexandre, s’imaginait qu’ils avaient tous deux reçu la mission divine de débarrasser l’Europe du « monstre français ».
À ces rêves s’ajoutaient des considérations plus matérielles, telle la perte du Hanovre que Napoléon envisageait de rendre à la Grande-Bretagne. La présence des divisions françaises en Allemagne, avec les conséquences économiques qu’elle entraînait, était aussi déterminante.
Une seule personnalité en Prusse n’était pas favorable au conflit. Situation paradoxale, c’était le chef d’état-major général de l’armée, son véritable commandant en chef, le duc de Brunswick. Déjà âgé et se méfiant d’un état d’esprit qui cédait à l’emballement et multipliait les provocations, il avait quelques doutes sur les chances d’affronter victorieusement les troupes napoléoniennes. Ou alors il fallait attendre que l’aide des Russes soit effective, ce qui n’était pas le cas. En effet, dès le 25 septembre, le roi de Prusse avait adressé un ultimatum au gouvernement français, le sommant d’évacuer l’Allemagne. C’était la guerre.
Dans sa majorité, l’armée française était encore cantonnée en Allemagne du Sud. En revanche, les corps d’armée, pour des facilités de subsistance, se trouvaient assez éloignés les uns des autres. De plus, certains régiments tenaient garnison à une grande distance du futur terrain d’un conflit. Par exemple, une division de cavalerie légère bivouaquait en Hollande. Aussi, avant toute chose, l’empereur concentra-t-il ses forces en basse Bavière, vers Ulm, où Ney vint précisément s’établir.
La Grande Armée comprenait toujours sept corps et Ney commandait le sixième. Le second de Marmont n’allait jouer aucun rôle actif, assigné, au moins dans un premier temps, à observer les Autrichiens.
L’idée directrice de Napoléon était de marcher sur Berlin. Deux voies s’offraient à lui : soit passer par les plaines du Nord de l’Allemagne en poussant vers l’est droit devant lui, mais il risquait de voir alors les Prussiens battre en retraite jusqu’à ce qu’ils se joignent aux Russes avant de contre-attaquer. Soit, en partant de Bavière, entreprendre un vaste mouvement tournant qui lui permettrait de couper l’adversaire de ses bases. Ce fut à cette dernière solution qu’il s’arrêta.
De son côté, l’état-major prussien comptait se porter sur les Français sans attendre les Russes et accablernos divisions une par une, avant qu’elles n’aient pu se réunir. Une telle manoeuvre exigeait de la résolution et de la rapidité, qui manquaient à l’adversaire. Toujours est-il qu’en entendant réaliser leur dessein, les forces opposées s’avancèrent à la rencontre les unes des autres sans être parfaitement éclairées.
En gros, les Français remontaient suivant un axe sud-nord-est. Ils avançaient en trois colonnes distantes d’environ un jour de marche. La plus forte, celle du
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