Le maréchal Ney
permettrait à celui qui l’occuperait, tout en surveillant la vallée en contrebas, de s’établir lui-même à contre-pente. Dès lors, il serait aisé d’y attendre les assauts de l’infanterie puis de la cavalerie adverses, sans que ses propres forces aient été entamées par l’artillerie ennemie qui ne les verrait pas.
Le lieu présentait aussi un inconvénient majeur : il était adossé à la forêt de Soignes, traversée par une seule route carrossable. En cas de défaite, la retraite serait difficile. Tenant compte du rapport des forces qu’il connaissait à présent, c’était une bataille purement défensive, destinée à lui faire gagner du temps, que Wellington entendait livrer. Malgré l’avantage de la position, était-il en mesure de combattre seul l’armée française ? Vers deux heures du matin, le 18, il reçut un message de Blûcher l’assurant que, malgré sa défaite de l’avant-veille, il marchait à son secours. Cette nouvelle confirma l’Anglais dans son désir de combattre. Il était néanmoins conscient du fait que son allié s’était fait administrer « une sacrée fessée ». Évidemment, tous deux ignoraient que Napoléon avait détaché deux corps d’armée, les 4 e et 5 e , aux ordres de Grouchy, pour barrer la route aux Prussiens et empêcher la jonction.
Voulant éviter d’être surpris par un mouvement tournant sur sa droite, tactique typiquement napoléonienne, Wellington positionna assez loin, au-delà de Braine-l’Alleu, la brigade hollando-belge, en laquelle il n’avait qu’une confiance limitée. De ce fait, celle-ci n’intervint pas. Afin de compléter son dispositif, le commandant en chef britannique fit descendre dans le vallon plusieurs bataillons, qui occupèrent, de gauche à droite, la ferme de Hougoumont et les fermes de La Haye-Sainte et de Papelotte, les transformant en autant de fortins destinés non pas à arrêter les assauts français, mais à les fragmenter.
Lorsqu’il parvint le 17 au soir face aux Anglais, Napoléon installa son quartier général à la ferme de la Belle-Alliance, au sommet de la colline, de l’autre côté du vallon. De là, il reconnut la puissance de la position adverse. Néanmoins, il jugea la situation à son avantage ; il avait raison, possédant une supériorité dans les trois armes. Pourtant, ayant détaché Gérard et Grouchy, il n’avait plus sous la main que trois corps d’armée, dont deux s’étaient battus les jours précédents.
Le sol, à présent transformé en bourbier par suite de l’orage, rendait les mouvements pénibles. Les roues enfonçaient dans le terrain fangeux et l’artillerie, de ce seul fait, ne put être mise en position le 18 qu’à onze heures du matin. La bataille s’engagea donc plus tard que ne l’avait prévu Napoléon. À cette heure, l’artillerie française ouvrit le feu et la préparation dura deux heures. Mais, en raison de la position des Anglais sur la contre-pente, elle fut de peu d’effet. Par contre, elle négligea les trois points d’appui à vue directe de Hougoumont, La Haye-Sainte et Papelotte. Ce fut une erreur. De son côté, Wellington ne démasqua pas ses batteries, les réservant pour stopper plus tard les attaques de l’infanterie et de la cavalerie.
Quel fut le rôle de Ney dans cet affrontement ? Il prit au début le commandement des unités chargées d’enlever le mont Saint-Jean puis, petit à petit, dans les heures qui suivirent, la direction de la bataille entière, que Napoléon le laissa mener à sa guise. Dès le départ, le maréchal avait compris que son artillerie serait sans effet, mais il eut peut-être le tort de ne pas l’employer davantage pour démanteler les murs de Hougoumont et surtout de La Haye-Sainte. Son objectif était de couper en deux l’armée anglaise en perçant au centre. Tactique simple et efficace.
L’artillerie était en action depuis environ deux heures, ce qui dans des circonstances normales était très suffisant, lorsque le duc d’Elchingen lança à treize heures sa première attaque d’infanterie. Elle aborda bien le plateau, mais fut refoulée par la cavalerie adverse. Ney décida alors de changer de tactique. Après l’avoir soigneusement préparée, il fit donner sa cavalerie lourde vers quinze heures et pour en assurer le succès en prit lui-même la tête. Les escadrons ne purent escalader la pente qu’au trot, tant celle-ci avait été rendue glissante par la pluie et le piétinement de
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