Le marquis des Éperviers
prier, murmura-t-elle en lui plaçant une pomme couleur de sang entre les yeux pour ne pas montrer qu’elle rougissait.
À minuit passé, carré sur Joseph qui avait pris un furieux galop, Joséphine suivant derrière attachée à sa selle, Victor redescendait le chemin du Roule. Il était au comble de la félicité et clamait à tue-tête cette strophe de Tancrède dont il avait retenu l’air :
« C’est vous belle princesse
C’est vous qui dans ces lieux volez à mon secours
Vous êtes de ma mort souveraine maîtresse
Disposez de mes jours. »
La nuit pailletée d’étoiles buvait son chant allègre comme un flot limpide. Elle s’était faite douce et légère, enveloppante et soyeuse, ainsi qu’une vieille complice.
Notes
150 . Moines de l’abbaye de Sainte-Geneviève.
151 . Sorte de collier.
152 . Seigneur accordez la vie éternelle à tous ceux qui nous font du bien !
153 . Alors lieutenant de police de Paris.
154 . Espions.
155 . Le thé introduit au Portugal en 1610 n’est pas d’un usage courant en France. La faculté après avoir commencé par le déclarer dangereux ne le recommande que pour « les fluxions particulières, les maladies vaporeuses… qui sont suite de la débauche et de l’incontinence ».
156 . En costume d’apparat.
157 . Jeunes gens à la mode.
158 . Signe distinctif des jeunes chevaliers de Malte.
159 . Instruments produisant un grand bruit.
160 . Monseigneur (sans autre précision) : titre qu’on donnait au dauphin.
161 . Invertis.
162 . Galeries du cintre.
163 . Nom qu’on donnait aux gens payés pour faire la claque.
164 . L’un des six gentilshommes chargés d’accompagner et d’instruire le dauphin.
165 . Les mousquetaires sont noirs ou gris non par la couleur de leur costume mais par celle de la robe de leurs chevaux.
166 . Virtuose italien de la perspective et de la féerie théâtrale qui a travaillé à Venise et a été appelé à Paris par Mazarin pour aménager les salles du Palais-Royal et du Petit-Bourbon.
167 . Jérôme Phélypeaux, comte de Maurepas (1674-1747), fils du chancelier et secrétaire d’État depuis l’âge de dix-neuf ans. Il a dans son département la marine, la maison du roi et le clergé.
168 . Agents subalternes chargés de prêter main-forte aux officiers de justice.
169 . Grâce au ciel, la méchante prophétie du père Joseph ne prit pas corps puisque le petit Arouet, jeune paroissien de Saint-André et futur Voltaire, dispose, au moment où il paraît dans cette histoire, de soixante-quinze bonnes années à vivre.
170 . Montée qui correspond à nos actuels Champs-Élysées.
171 . Les menus à prix fixe sont une nouveauté de la fin du XVII e siècle.
172 . Titre qu’on donnait au frère du roi. Ici le défunt duc d’Orléans, frère unique de Louis XIV et mari de la Palatine.
173 . Clients.
174 . Laiton tréfilé qui servait d’armature aux fontanges.
CHAPITRE QUATRIÈME
Où se lève le souffle du Prince des Vents de Mort
L’Hôtel de Fontalon, austère construction de la rue Saint-Antoine, ne présentait à la vue des passants qu’un mur rugueux, couronné, à l’imitation des palais florentins, d’un attique surmonté d’un large entablement saillant. Son portail restant la plupart du temps fermé, la vie paraissait s’y confiner derrière la chatière d’une porte latérale qui ouvrait sous une voûte dévorée par l’ombre dont la noirceur masquait le déploiement d’une de ces vastes cours conçues d’ordinaire pour étaler le train des opulentes maisonnées. Nulle part ne se remarquaient de ces nudités hellénistiques apostées dans des niches, pas un non plus de ces amours joufflus qui, n’importe où ailleurs, sur la moindre corniche de la plus modeste maison à la mode, polissonnaient et gambadaient à donner le vertige.
Ceux qui pénétraient là pour la première fois, sans rien savoir encore de la vieille lignée des Fontalon, n’étaient jamais surpris d’apprendre que le constructeur de l’hôtel avait été, sous Richelieu, l’une des grandes figures du parti huguenot. Par religion et par goût il s’était attaché à constituer ce décor sans jour ni fioriture qui devait le flatter de quelque réminiscence de la chrétienté des catacombes ou lui rappeler le dépouillement du temple protestant de Paris sis alors à Charenton. Bien avant la révocation de 1685, les deux fils de ce personnage avaient abjuré une foi que la rigueur de leur père n’avait pas su
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