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Le neuvième cercle

Le neuvième cercle

Titel: Le neuvième cercle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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quelque sorte, presque confortables.
    — Les Juifs, indisciplinés, pleurards, envieux (il est vrai que le sort qui leur est fait est, à part quelques rares exceptions, vingt fois plus effroyable que le nôtre, et nous avons bien vite compris qu’ils nous servaient souvent de « paratonnerre ») se sont précipités en foule et en désordre pour toucher les chaussures. Dans la neige glacée de la place d’appel, beaucoup sont pieds nus.
    — Le chef de block et le Schusher-kapo les prennent en charge et je me suis demandé, dès cet instant, s’ils n’avaient pas été amenés, purement et simplement, dans un traquenard. Gymnastique à coups de « gummi » (morceau de tuyau en caoutchouc) dans la neige, course, reptation, toute la gamme y passe ! Cris, plaintes, écroulement, rien ne peut mettre fin à leur martyre, que la fatigue de leurs bourreaux. Et quand ils se présenteront ensuite à la « Schusterei » – invités à le faire – ils seront reçus à coups de planches qu’on leur cassera sur la tête. Ils repartiront pieds nus dans la neige à leurs blocks et c’est pieds nus, ou avec les innommables galoches que nous avons abandonnées, qu’ils iront à partir du lendemain au travail.
    — Désormais, c’est dans la neige que nous travaillons, et nous devrons attendre le 1 er février 1945 pour connaître une température plus clémente, avec un printemps précoce qui nous ramènera un soleil doux, mais aussi notre vieille et tenace ennemie : la pluie.
    — Le matin, le kommando d’Amstetten qui se lève une heure après le gros du camp ne prend le train que vers 7 heures. Nous devons attendre sur le quai de la gare que ce dernier arrive. Aucun abri, aucune protection, aucun moyen de nous réchauffer, autre que celui de sauter sur place et nous battre les bras ou nous frotter mutuellement le dos. Pendant ce temps, nos anges gardiens, à tour de rôle, se réchauffent au poêle de la salle d’attente. C’est complètement gelés que nous montons dans les wagons pour le voyage d’une heure, en souhaitant que les arrêts nombreux retardent notre arrivée à Amstetten.
    — À partir de janvier d’ailleurs, les relations avec cette dernière gare deviennent plus difficiles. La fréquence des bombardements alliés à l’approche de l’offensive de printemps et parallèlement à l’avance soviétique, le front se resserrant et se rapprochant, apporteront une perturbation sérieuse dans le trafic ferroviaire. Il s’ensuivra pour nous des attentes prolongées dans les gares de Melk le matin, d’Amstetten le soir, du train qui n’arrive pas. Nous n’en allons pas pour autant à l’abri, mais restons debout dans le froid. Quelquefois, cependant, la gare de Melk prévint le camp du retard du train, ce qui nous permit d’attendre une heure, parfois deux, dans notre chambrée.
    — Ces retards, bien entendu, font notre affaire, puisque, de toute façon, la débauche a lieu à 16 h 30. De plus, quelquefois, le train se traîne lamentablement sur les 41 kilomètres de parcours, attendant dans les gares le passage des convois militaires, sanitaires ou de grands rapides plus pressés que nous. Pour aller, cela est bon, mais le soir, ces retards constituent un supplice supplémentaire. Combien de fois, en effet, n’arriverons-nous au camp, au lieu de 7 heures du soir, qu’à minuit ou même 4 heures du matin, au moment du réveil général. Juste le temps de toucher la soupe de la veille, froide et souvent aigre, le pain de la veille, la boisson chaude du matin et, une heure après, nous repartons vers la gare.
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    — Le cix kommando de Melk tient une place particulière dans l’histoire de Mauthausen. Les conditions générales de vie, ou plus précisément de survie, étaient les mêmes que dans les autres kommandos, travaux exténuants, manque de nourriture, brutalité des S.S., manque de sommeil, de soins, etc. Pourtant, les conditions d’existence des Français qui y séjournèrent furent telles que le pourcentage des morts est relativement plus faible qu’ailleurs.
    — Deux facteurs essentiels en sont la cause :
    — a) ce kommando fut créé fin avril 1944 – le premier convoi qui commença par construire le camp autour des casernes S.S. existantes était de cinq cents déportés, presque tous Français, à l’exception de quelques dizaines d’Espagnols et d’Allemands, ces derniers destinés à constituer l’encadrement, mais comprenant un certain

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