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Le Pacte des assassins

Le Pacte des assassins

Titel: Le Pacte des assassins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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disparition de son père, l’avocat François Ripert, et de son
frère, Henri Ripert, l’un et l’autre envoyés à la mort par les communistes, et
d’abord Alfred Berger.
    Mais je n’ai jamais reproché à Isabelle Ripert
d’avoir choisi de se taire.
    Elle et moi avions compris, au camp et dans la
souffrance, que le bien le plus précieux est le respect de la liberté de l’Autre. »

45.
    Julia est assise dans la salle où siège le
tribunal de la 17 e chambre correctionnelle de la Seine.
    Elle ne quitte pas des yeux l’avocat Pierre
Doucet qui plaide pour Les Lettres françaises contre Victor Andreïevitch
Kravchenko.
    Maître Doucet s’indigne que l’ingénieur
ukrainien ait intitulé son livre de témoignage J’ai choisi la liberté.
    —  C’est l’Armée
rouge, la libératrice des camps de concentration nazie, qui est le symbole de
la Liberté !, clame-t-il. Vous, en désertant en pleine guerre, vous avez
choisi non pas la liberté, mais la trahison ! Les témoins que vous avez
cités vous ressemblent : ils n’invoquent la liberté que pour masquer leur
culpabilité. Qui peut accorder le moindre crédit à cette Julia Garelli dont le
père a été exécuté par les partisans antifascistes italiens parce qu’il était l’un
des plus proches collaborateurs – et ce, dès 1920 – de Mussolini ? Et l’on
voudrait nous faire croire que cette comtesse Garelli était une communiste
injustement persécutée par le pouvoir soviétique ? Ce n’était qu’une espionne au service du fascisme, puis du nazisme,
démasquée, condamnée à juste titre, expulsée dans son pays d’adoption, l’Allemagne
de Hitler, et continuant son travail d’espionne au service des SS parmi les
déportées de Ravensbrück !
    Maître Doucet tend le bras vers Julia Garelli :
    — Elle est personnellement responsable de
la mort de Karla Bartok, une communiste tchèque, une résistante héroïque, reprend-il.
Comment cette femme-là ose-t-elle parler de liberté ? C’est de trahison qu’il
s’agit, de complicité avec les nazis ! Et vous avez entendu ce que nous a
révélé Alfred Berger…
    Julia tourne la tête
et découvre, placé au premier rang, de l’autre côté de l’allée qui sépare en
deux la salle, Alfred Berger qui se tient assis très droit, les mains posées
sur les genoux.
    Il a invoqué dans son témoignage la liberté
pour laquelle sont morts, a-t-il dit, des dizaines de milliers de communistes
tombés dans la lutte contre l’occupant nazi :
    — Ainsi maître François Ripert, l’une des
gloires du barreau, et son fils, le philosophe Henri Ripert, et si sa santé
brisée à Ravensbrück ne le lui avait pas interdit, Isabelle Ripert serait venue
à cette barre confondre Julia Garelli-Knepper. J’ai connu cette comtesse dans
les années 1930. Nous la soupçonnions déjà d’être au service des Allemands. Nous
savions qu’elle avait été la maîtresse du général Karl von Kleist et, avant lui,
de bien d’autres officiers allemands. Et que dire de Heinz Knepper, son maître
en trahison, lié aux milieux hitléro-trotskistes ? Nous qui avons combattu
pour la liberté de la France et de tous les peuples…
    Etc., etc.
    Julia avait été
surprise de l’indifférence méprisante avec laquelle elle avait su écouter de
tels propos.
    Personne ne réussirait à briser cette liberté
de penser qu’elle avait acquise.
    Peut-être était-ce avec l’arrestation et la
disparition de Heinz Knepper qu’elle avait eu le sentiment d’être enfin libérée,
et ç’avait été comme si, brusquement, après la cécité, elle voyait
distinctement le monde tel qu’il était. Elle était libre, et la liberté
unifiait sa personne.
    Et au mépris qu’elle éprouvait pour Alfred
Berger, pour Pierre Doucet et pour cet autre avocat, Albert Jouvin, un ancien
déporté, se mêlait un peu de compassion.
    Ils ne pouvaient vivre que « divisés ».
Ils ne connaissaient pas cette sérénité que donnent l’Unité de soi, la liberté
de l’esprit.
    Peut-être un jour se briseraient-ils comme l’avait
fait Karla Bartok, se réfugiant dans la folie et la mort pour ne pas s’avouer
qu’elle s’était égarée, enfermée dans ses illusions et ses mensonges ?
    Elle, Julia Garelli, se sentait – se savait – indestructible.
    Oh, elle n’ignorait
pas que la mort était sa compagne la plus proche.
    Et lorsque Arthur Orwett était venu lui rendre
visite à Venise pour l’inviter à témoigner au

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