Le pays des grottes sacrées
mesure qu’il
s’affaiblissait, elle assumait de plus en plus les responsabilités de Joconan,
si bien qu’à sa mort les membres de la Caverne voulurent qu’elle continue à
remplir le rôle d’Homme Qui Commande.
— Quel genre d’homme était
Joconan ? demanda Jondalar. Tu dis qu’il était imposant. Je pense que
Joharran l’est aussi. Il réussit généralement à persuader la plupart des gens
d’adopter son avis et de faire ce qu’il souhaite.
Ayla était captivée. Elle avait
toujours voulu en savoir plus sur la mère de son compagnon, mais Marthona
n’était pas femme à beaucoup parler d’elle-même.
— Joharran est un bon Homme
Qui Commande, mais il n’est pas imposant comme l’était Joconan. Ton frère
ressemble plus à Marthona qu’à son compagnon. Joconan pouvait être intimidant,
parfois. Il avait une forte présence. On trouvait facile de le suivre,
difficile de s’opposer à lui. Je crois que certains avaient peur de le
contredire, même s’il ne menaçait jamais personne, du moins autant que je
sache. On disait qu’il était l’Élu de la Mère. Les jeunes hommes, en
particulier, aimaient être près de lui, et les jeunes femmes se jetaient à sa
tête. Presque toutes, paraît-il, portaient alors des franges pour tenter de le
séduire. Pas étonnant qu’il ait attendu d’être âgé pour s’unir.
— Tu penses vraiment que les
franges aident une femme à prendre un homme au piège ? demanda Ayla.
— Cela dépend de l’homme.
Les franges font penser à la toison pubienne et suggèrent que la femme est
prête à l’exposer. Si un homme est facilement excité, ou intéressé par une
femme particulière, des franges peuvent l’émoustiller et il la suivra partout
jusqu’à ce qu’elle décide de le capturer. Mais Joconan savait ce qu’il voulait
et je ne pense pas qu’il se serait intéressé à une femme persuadée qu’elle
avait besoin de franges pour séduire un homme. Marthona ne portait jamais de
franges et elle attirait toujours l’attention. Lorsque Joconan décida qu’il
voulait s’unir aussi à la jeune femme venue d’une lointaine Caverne,
puisqu’elles étaient comme des sœurs, elles furent toutes les deux d’accord. Ce
fut le Zelandoni d’alors qui s’opposa à cette double union : il avait
promis que la visiteuse retournerait au sein de son peuple après avoir acquis le
savoir nécessaire pour être doniate.
La Première se révélait bonne
conteuse et Ayla était émerveillée par son talent mais plus encore par le
contenu de l’histoire.
— Joconan était un grand
Homme Qui Commande, poursuivit la doniate. Ce fut sous sa gouverne que la
Neuvième Caverne devint si nombreuse. Elle avait toujours eu des dimensions
permettant d’accueillir plus de membres que la plupart des autres, mais rares
étaient ceux qui se sentaient prêts à être responsables d’une telle multitude.
Lorsqu’il mourut, Marthona fut accablée de chagrin. Je crois qu’elle songea un
moment à le suivre dans le Monde d’Après mais elle avait un enfant et Joconan
laissait dans la communauté un vide qu’il fallait combler.
« Les gens commencèrent à se
tourner vers elle quand ils avaient besoin de l’aide que fournit un Homme Qui
Commande : régler un différend, organiser une visite à une autre Caverne,
se rendre à la Réunion d’Été, prévoir une chasse et estimer la part que chaque
chasseur devrait céder à la Caverne, dans l’immédiat et pour l’hiver suivant.
Ils prirent le pli de s’adresser à Marthona et elle s’habitua à s’occuper des
problèmes. Leurs besoins et son fils : c’est ce qui lui donna la force de
continuer. Au bout de quelque temps, elle devint une Femme Qui Commande reconnue
et son chagrin finit par s’atténuer, mais elle déclara au Zelandoni qu’elle ne
s’unirait probablement jamais plus. C’est alors que Dalanar arriva à la
Neuvième Caverne.
— Tout le monde dit que ce
fut le grand amour de sa vie, glissa Jondalar.
— Oui, son grand amour.
Marthona aurait presque renoncé pour lui à son rôle de Femme Qui Commande, mais
elle savait que la Caverne avait besoin d’elle. Et au bout d’un moment, même
s’il l’aimait autant qu’elle l’aimait, il éprouva le désir d’exister par
lui-même. Il ne se satisfaisait pas d’être dans l’ombre de Marthona.
Contrairement à toi, Jondalar, son talent de tailleur de pierre ne lui
suffisait pas.
— C’est pourtant l’un des
plus doués que
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