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Le piège

Le piège

Titel: Le piège Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emmanuel Bove
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dit l’inspecteur.
Nous, nous ne faisons qu’obéir.
    — Vous ne me quitterez pas...
    Cette parole avait échappé à Bridet. Dans
sa détresse, devant le mystère de ce qui l’attendait dans les locaux de la
police déserts, il n’avait pu s’empêcher de s’accrocher à ces deux hommes qui,
s’ils étaient des indifférents, avaient malgré tout une certaine conscience du
bien et du mal.
    Rue Lucas, les fenêtres étaient obscures.
    — Il y a erreur, dit un inspecteur. C’est
pas possible. Tout le monde est parti. Va voir...
    L’autre inspecteur pénétra dans la maison.
Il revint peu après.
    — Si, si, on nous attend. Ils sont
dans le bureau de Keruel.
    Les deux policiers firent passer Bridet
devant eux, puis refermèrent la porte. Il n’y avait pas de minuterie. À la
lueur d’un briquet, ils s’engagèrent dans l’escalier. Bridet dut s’appuyer un
instant à la rampe.
    — Allez, allez, montez, faites ce que
l’on vous dit, cria Bourgoing qui avait changé brusquement.
    Ce dernier était resté en arrière. Bridet
venait de l’entendre dire à son collègue que Saussier n’était pas content de ce
que, lui, Bourgoing, fût venu demander si l’ordre d’amener le prisonnier avait
été vraiment donné.
    — Salaud, murmura Bridet.
    — Qu’est-ce que vous dites ?
demanda Bourgoing.
    — C’est haut, répondit Bridet.
    — Faites attention. Je vous préviens
que je ne vous manquerai pas, moi.
    Au premier, Bridet s’arrêta.
    — Encore un étage, dit Bourgoing, et
ne faites pas le malin.
    — Alors ils ont toute la maison, s’écria
Bridet. L’entresol, le premier, le deuxième...
    — Ne vous occupez pas de ça.
    L’appartement était obscur. Au fond du
couloir, on apercevait cependant un peu de lumière. Saussier et Keruel étaient
assis dans une petite pièce d’aspect modeste que seule la lampe sur le bureau
éclairait. Ils avaient l’air de paisibles directeurs d’une maison de commerce
qui vérifient les comptes en l’absence des employés.
    — Entrez monsieur Bridet, dit Saussier
avec une amabilité inattendue.
    On eût dit qu’un fait nouveau en faveur de
Bridet s’était produit et que, n’en ayant jamais douté, il était heureux de lui
parler comme il eût toujours voulu pouvoir le faire.
    — Nous venons d’avoir, M. de Keruel,
M. Outhenin et moi une longue conversation avec votre femme, continua Saussier.
    — Avec ma femme ! s’exclama
Bridet.
    — Oui, mais laissez-moi finir. Ce qu’elle
nous a dit concorde parfaitement avec ce que vous nous avez dit vous-même. J’ai
pensé que vous seriez heureux de la revoir dès ce soir, continua Saussier avec
ce respect un peu condescendant qu’ont les officiers pour les devoirs conjugaux
de leurs hommes. C’est pour cela que, malgré l’heure tardive, je vous ai fait
venir, certain que pour un tel motif vous ne m’en voudriez pas. Votre femme est
descendue à l’hôtel, attendez...
    — L’hôtel des Étrangers, dit Keruel.
    — Elle vous attend. La seule chose que
je vous demanderai, monsieur Bridet, c’est de bien vouloir passer demain matin,
pas ici, à l’étage au-dessous. M. Schlessinger, que je n’ai pu prévenir, a
encore certaines petites questions à régler avec vous. D’ailleurs, je serai là.
    — Mais comment se fait-il que ma femme
soit à Vichy ?
    — Vous le lui demanderez vous-même
tout à l’heure. Elle vous le dira mieux que moi, répondit Saussier avec un
sourire plein de sous-entendus. C’était tellement évident que Bridet n’insista
pas.
    — Alors à demain, monsieur Bridet.
Rappelez à votre femme qu’elle nous a promis de venir également.
    Bridet serra la main de tout le monde.
    — Je suis heureux pour vous et pour
moi, dit Bourgoing en le reconduisant jusqu’à la porte de l’appartement. Ce
sont des corvées dont nous n’aimons pas beaucoup être chargés. Nous voulons
bien défendre l’ordre, mais nous ne voulons pas être des instruments de
vengeances politiques. Vous me comprenez, n’est-ce pas, monsieur Bridet ?
Chacun doit faire son travail.

11.
    Bridet demanda à un passant où se trouvait
l’hôtel des Étrangers. Il n’y avait pas de lune. Les étoiles étaient si
nombreuses que la première impression de Bridet fut que le ciel était caché par
de la brume. Ce ne fut qu’après un instant qu’il se rendit compte qu’au
contraire l’air était limpide et que cette brume était les étoiles elles-mêmes.
De temps en temps il se

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