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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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poursuivit le récit.
    — J’ai eu aussitôt des soupçons. Sir Hugh, on évoquait partout le braconnage de cerfs, des cailles, des faisans abattus. L’un de mes verdiers {13} avait découvert une flèche fichée dans un tronc d’arbre. J’ai, par conséquent, décidé d’enquêter plus avant. J’ai envoyé mes chasseurs en forêt avec l’ordre de surveiller et d’observer les Frères du Libre Esprit. La plupart du temps, ils se livraient à leurs méfaits habituels et rôdaient dans Mistleham ou les fermes environnantes. Ils se rassemblaient parfois dans l’église du père Thomas. En apparence, ils étaient inoffensifs malgré les rumeurs à leur sujet, mais je restai vigilant. Enfin, un de mes verdiers me rapporta qu’il les avait aperçus s’exerçant à l’arc au fond de la forêt et, d’après ses dires, ils tiraient avec adresse et atteignaient souvent leur cible. Un doute en entraîne un autre. Je les ai fait épier de plus près. Vers la fin octobre, Adam, leur chef, a quitté le groupe en direction de la côte. Il s’est rendu à Orwell, où il a fréquenté une taverne, La Lanterne de corne, et s’est entretenu, seul à seul, avec Robert Picard, le capitaine d’une petite cogghe.
    Corbett leva les yeux.
    — J’ai déjà entendu ce nom.
    — C’est un contrebandier notoire, qui fait entrer dans le royaume, ou en sortir, sans licence, marchandises aussi bien que personnes. Quand on me l’a appris, je fus intrigué. Voilà qu’une bande d’hommes et de femmes, fauteurs de troubles et objets de méchantes accusations, était installée sur mon domaine ! Ils n’étaient point ce qu’ils prétendaient être. Bien armés, ils préparaient sans doute un assaut contre le manoir puis chercheraient à fuir pour trouver en Essex un port pour passer la mer. Pourquoi ? Ils étaient en Angleterre depuis plus de six mois dont ils avaient passé la plus grande partie à Mordern, à côté d’ici. J’en ai conclu qu’ils savaient que j’étais riche, que, peut-être, ils avaient entendu parler du Sanguis Christi. Ils complotaient d’attaquer le manoir de Mistleham, Corbett. J’ai le droit de défendre ce qui m’appartient. De plus, je suis responsable de la paix du roi dans ces parages. Les Frères du Libre Esprit étaient des filous, des débauchés et des hérétiques.
    — Des médisances, lança le père Thomas. Il y a toujours des médisances sur ceci ou cela !
    — Mais elles sont parfois vraies ! coupa Claypole. Beatrice, ma fille unique, s’était énamourée d’un des jouvenceaux du groupe, un nommé Seth. Il ne me plaisait pas. Elle profitait de toutes les occasions pour s’enfuir de la maison et le retrouver, que ce soit en ville ou dans les faubourgs, voire même dans la forêt. Qu’avait-il à lui offrir ? Que voulait-il si ce n’est satisfaire sa concupiscence ?
    Corbett lut la haine et la colère sur les traits du maire, les entendit vibrer dans sa voix. C’était là un homme que les Frères du Libre Esprit avaient profondément outragé.
    — Pourquoi ne pas les avoir juste désarmés, pris par surprise et emprisonnés pour les interroger ? s’enquit Ranulf.
    — Mais c’est ce que j’ai fait, murmura Scrope, c’est ce que j’ai fait, Maître Ranulf ! J’ai dépêché frère Gratian, ici présent, avec une sommation formelle leur enjoignant de se présenter soit céans soit à l’échevinage.
    — Qu’ont-ils répondu ?
    — Ils m’ont nargué, expliqua frère Gratian. Ils ont dit qu’ils me battraient comme un chien et s’occuperaient de leurs affaires. Ils ont prétendu n’avoir à se soumettre ni à une convocation ni à un seigneur.
    Corbett acquiesça, compréhensif. Scrope préparait une défense qui serait acceptable devant le Banc du roi, devant n’importe quelle cour de justice du pays. C’était le seigneur du manoir. Il avait de bonnes raisons de penser qu’une poignée d’hérétiques risquait de mettre la paix en danger. Il leur avait envoyé une assignation officielle à se présenter devant son tribunal pour répondre aux accusations. Non seulement ils avaient refusé, mais, de plus, ils s’étaient moqués de son messager.
    — Tôt, le matin de la Saint-Ambroise, j’ai battu le rappel de mes hommes, déclara Scrope, et des troupes de la ville. Nous en avons réuni environ cent cinquante. Nous sommes entrés dans la forêt avec prudence. J’avais emmené mes mastiffs, Romulus et Remus. Et ce pour être sûr que

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