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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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s’ouvrit.
    – Oh ! fit-il reculant d’un pas.
    Devant lui, devant eux, se tenait un fantôme. Quel âge ? Quinze ou seize ans ; blond-roux si la lueur du candélabre à trois branches qui éclairait ce vestibule ne trahissait pas la couleur de ces cheveux longs, rassemblés en queue de cheval, et qu’un fronteau d’orfroi orné d’une petite perle empêchait, si soyeux qu’ils fussent, de nuire à la pureté d’un front d’une pâleur de lis.
    – Une belle fille ! chuchota Paindorge.
    – On n’est pas des Maures, dit Beltrame afin de rassurer l’inconnue.
    – N’ayez crainte, damoiselle, si vous comprenez notre langage. Nous ne vous ferons aucun mal. Le fard qui vous effraie n’est rien que de la suie.
    C’étaient les seuls mots que Tristan eût trouvés, mais ils lui semblaient rassurants et de bonne texture. Il se donna un répit en posant son index sur sa bouche. Elle comprit et acquiesça.
    – Défiez-vous d’un piège, messire ! souffla Morsang.
    La jouvencelle eut un mouvement de tête négatif.
    Elle était vêtue d’une robe de tiretaine bise, serrée à la taille par une ceinture de fils de cuir tressés. La simplicité de sa mise révélait une naissance plébéienne. Mais fallait-il se fier à cette apparence quand la beauté se révélait princière ? Elle les regardait tous sans ahurissement, et plus hardiment et ardemment ce chef au visage maculé de ce qui, pour elle, semblait une bourbe noirâtre. D’une voix basse, presque compassée, elle révéla qu’elle les avait vus paraître sur la muraille.
    – J’allais clore ma fenêtre et me coucher… Anglaise comme tous ceux de Cobham, j’aurais crié… Mais je ne le suis pas…
    Les gouttelettes dont son front se couvrait avaient la même nacre que les larmes qui glissaient sur ses joues. Par quelle étrange absurdité du destin, songea Tristan, ses hommes et lui découvraient-ils cette beauté une nuit pareille ? Sous les lacets entrecroisés de ses manches ridées as las il voyait ses épaules opulentes, et, du coude au poignet, les fuseaux de ses avant-bras d’une blancheur et d’une pureté qui ne pouvaient que lui rappeler Oriabel. Mais était-ce bien le moment… ?
    – Vous n’êtes pas en sécurité pour longtemps, dit-elle en s’adressant à tous. Chaque soir, les hommes d’armes sont relevés, mais cette nuit, ceux que vous avez dû… écarter de votre voie en attendaient une trentaine… Des soudoyers de Rochester… Ils doivent compagner…
    La voix lui manqua soudain. Elle ajouta, plus curieuse qu’inquiète :
    – Que faites-vous céans ? Que venez-vous chercher ?… Vous savez que messire Édouard de Woodstock est à Cobham ?
    – Oui, dit Paindorge.
    – Vous voulez rober son butin ?
    – Nous voulons nous saisir de sa personne. Vous êtes avec nous ?
    – Je suis de Normandie… Il est là, au fond, avec son épouse… Deux portes proches l’une de l’autre et closes de l’intérieur vous en séparent… C’est une chambre si l’on veut… Ils aiment à se rouler sur des peaux de bêtes… devant la cheminée… Le feu dans l’âtre et dans le corps… Quand ils font cela la nuit, les hommes montent sur le toit de la grange ou sur la margelle du puits et les épient…
    Elle parlait trop et sa voix se haussait. Paindorge impatient dit : « Merdaille, hâtons-nous ! » et Tristan acquiesça, puis s’adressa uniquement à la pucelle :
    – Je vais vous tenir ainsi : votre dos appuyé à ma poitrine et mon bras senestre ceignant votre taille… De ma dextre j’appuierai cette lame sous votre menton. Ainsi, l’on ne pourra vous suspecter de nous avoir aidés… Vous allez crier comme si l’on vous tourmentait. Le prince sortira et ne pourra refermer les deux huis parce qu’à peine nous sera-t-il apparu que nous aurons pris notre escousse 208 et pénétré dans son refuge !
    – Je ferai cela… Si vous réussissez, emmenez-moi aussi !
    Elle le considérait sans crainte, avec une admiration qui semblait pénétrer son onguent de suie pour le voir tel qu’il était.
    – On vient, murmura Paindorge, exigeant le silence et l’immobilité.
    Péril extérieur : on marchait dans la cour à petits pas de feutre. Callœt et ses hommes apparurent, puis Gueguen et les siens. C’était trop. Leur présence mettait en péril le maigre subterfuge que Tristan venait d’imaginer.
    – Qui c’est ? dit Callœt en montrant la pucelle.
    – Une prisonnière… Une

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