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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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pucelle de Normandie… Pas le temps de causer…
    – Aurait mieux valu…
    – Tais-toi ! Woodstock et sa Jeanne sont là, derrière…
    – On sait : je les ai vus de la fenêtre. Elle le chevauche au petit trot.
    Gêné d’être en présence de la jouvencelle par ce que ces images suscitaient, Tristan l’interrogea :
    – Y a-t-il céans d’autres serviteurs ?
    – Je suis seule cette nuitée. La chambrière et le chambellan qui les servent s’en sont allés, ce matin, à Rochester. Ils ne reviendront que demain soir. S’ils ont besoin de moi, l’un ou l’autre remue une clochette… Mon nom est Luciane…
    – Alors, ma belle, dit Callœt, vous êtes la seule vivante… Et ça vaut bien…
    – Arrière, exigea Tristan, sa lame pointée sur le ventre du Breton… Je t’avais dit de veiller au pont-levis !
    – Rien à craindre.
    Tristan, excédé, fit front :
    – Oyez tous – et ce sera la dernière de ces parlures à voix basse qui nous auraient trahis si les deux autres, là, derrière, ne forniquaient comme… des sourds ! Luciane va crier et jupper 209 aussi fort qu’elle pourra. Édouard quittera les bras de son épouse et nous ouvrira ses portes… Mais nous sommes moult nombreux : nous nous gênerions…
    Il vit que du sang gluait sur les épées de quelques-uns et décida de les exclure :
    – Gueguen, Callœt, Raffestin, Pagès, Triphon… allez veiller au-dehors. Vous autres qui resterez près de moi, sachez-le, si l’un de vous lève sa lame sur le prince ou la princesse, il me trouvera du côté des Goddons…
    – Moi aussi, dit Paindorge.
    – Évidemment ! dit Gueguen, approuvé par Callœt, avant de disparaître.
    Tristan enlaça aussi doucement que possible la taille de Luciane.
    – N’ayez crainte, m’amie.
    – Emmenez-moi avec vous.
    – Impossible… Je crains que nous ne périssions tous, au retour… et ne puis, hélas ! vous assurer que je reviendrai pour vous sauver et vous ramener en Normandie…
    Il y avait longtemps qu’il n’avait pas étreint, même légèrement, un corps aussi flexible, tiède, juvénile. Les deux renflements des petits seins charnus reposaient sur son avant-bras, sans crainte, comme deux colombes sur une même branche. Il avait lu cette phrase-là dans un livre. Mélusine ou Garin de Montglave. Aliénor et Oriabel n’avaient pas plus de mamelettes. Mais à quoi bon, maintenant, évoquer ces trésors de femme, et d’autres plus émouvants ! Il chuchota : « Criez, m’amie ? », et Luciane obtempéra.
    Elle n’eût pas hurlé plus fort son horreur et sa détresse. Elle y mettait tant de sincérité qu’il sentait, sous sa paume, battre son cœur.
    Pas un bruit. Ils avaient pourtant dû suspendre leur embrassement !
    – Au secours !… Help !… Pitié, pitié !
    Nulle autre femme, sans doute, n’eût mieux exprimé par ces mots son sentiment de répulsion, d’horreur, de désespoir. Le cœur de Tristan s’affolait lui aussi à grands coups tandis qu’il regardait tantôt la porte close, tantôt les cheveux et les frisons qui moussaient sur le cou d’albâtre de Luciane. Les respirations saccadées de ses compagnons, la fébrilité de leurs doigts noués sur la fusée de leur épée lui disaient, elles aussi, leur fureur d’attendre. Tous observaient la porte. Allait-il apparaître ? S’étonnait-il de n’entendre aucune foulée précipitée, aucun pas sur les degrés d’un escalier ? Tristan, l’oreille tendue, essayait maintenant de percevoir un bruit, une voix. Rien. Il interrogea Luciane. Et se retourna :
    – Paindorge, ébaudis-toi très fort… Fais tomber ce pot, là, dans cette niche !… De la freinte 210 . Qu’ils croient qu’un de leurs sergents veut abuser de leur meschine 211  !
    – Grâce !… Grâce ! pleurnicha Luciane. Non, messire ! Non !
    Puis elle hurla, et il semblait qu’on l’eût lardée de toutes parts tandis que Paindorge riait et cassait tout ce qu’il voyait : un vase, une chaise, un candélabre.
    Cette fois, entre deux clameurs, le silence laissa filtrer des pas. Un grincement signifia qu’on ouvrait une porte. «  Luciane ? » demanda, inquiète, une voix d’homme.
    – Le voilà ! murmura Tristan.
    De sa paume, il imposa silence à la servante. Elle gémit comme peut-être Jeanne de Kent avait gémi avant que son époux se fût séparé d’elle.
    On tira un verrou : celui de la seconde porte.
    – Il ouvre, dit Paindorge.
    Tristan poussa

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