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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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sur la nuque de Tristan. « Ces Gallois ! » Jamais un archer de France n’eût osé manier son arc dans de telles conditions.
    – Retrahiez-vous (493) amis !
    Qui restait en vie ? Des hommes reculaient. Deux d’entre eux croisaient le fer avec trois ou quatre Goddons. Et d’autres ennemis survenaient, hurlant la seule expression française qu’ils connussent : « À la mort ! À la mort ! » Lâcher pied ? Un endroit devait bien exister par lequel une fuite honorable était possible.
    – Prince, haleta Tristan, rage et déception mêlées, j’aurais pu vous occire à Cobham… Et je le pourrais maintenant… Mais je n’y prendrais pas délices… S’il me plaisait de vous amener de l’autre côté de la mer sans une égratignure, il me plaît aussi, dans la déconvenue, de vous abandonner à vos hommes.
    – Je vous pourchasserai dès que j’aurai les mains déliées !
    – C’est votre droit… Mais si je suis vivant et qu’il vous plaît de croiser votre épée avec la mienne, j’oublierai aussitôt qui vous êtes et ne verrai en vous qu’un diable de Goddon !
    Il y eut un remous parmi les assaillants. Sans un cri, Pagès et Triphon tombèrent. « Ils cherchent à nous encercler ! » Tristan se détourna et aperçut un homme armé d’une masse d’armes. D’un bond, il sauta de côté. La pomme d’acier aux dents acérées passa entre son épaule et celle de son prisonnier.
    – À l’aide ! hurla Morsang.
    Il y eut deux échos : Sampanier et Beltrame.
    Il ne devait rester en vie que Raffestin. Et Paindorge.
    Les Goddons se montraient davantage. Par deux, par trois. Certains trébuchaient sur des souches.
    « Je vais périr, moi aussi ! »
    Un autre… Une épée… D’un coup du tranchant de sa main sur le bras de l’agresseur, Tristan le priva de son arme. Tous deux se crachèrent, grognant, soufflant, l ’Anglais voulant ramasser sa lame et le Français s’évertuant à l’en empêcher. La peur de mourir, l’amertume d’avoir assisté, impuissants, au trépas de quelques-uns de leurs compères, grossissaient leurs forces et leur vivacité. Stimulé par la fureur de vivre, l’Anglais se défendait énergiquement : il écumait, grognait, tâchait de griffer aux yeux ce Franklin téméraire dont son prince essayait de saisir le cou entre ses mains liées.
    Tristan parvint à prendre une distance suffisante pour bourrer son adversaire de coups de poings dans la face, mais ce guerrier obstiné tenait bon. Il commençait à renvoyer les coups lorsque Paindorge, libéré d’un attaquant, lui rompit l’épaule d’un taillant frénétique et précis.
    Effrayé, Édouard de Woodstock disparut en courant, les mains levées, criant dans les ténèbres les noms d’un capitaine et de quelques sergents :
    –  Venable… Masterson !… Parvyng… Help me…
    –  Filons, messire ! conseilla Paindorge.
    – Les autres ?… On ne peut pas…
    – Ils sont tous morts, hélas !… Vivre, c’est les venger… Cette haie…
    – Mais ensuite…
    – Filons !
    Paindorge commandait et c’était bien ainsi.
    Ils gagnèrent l’ombre d’une roncière, sautèrent dans ce qui semblait être un fossé. Des pas, derrière, les informaient qu’une douzaine de gens d’armes s’étaient lancés à leur poursuite. Quelque chose miroita tout près. Une rivière.
    – Allez, messire, sautons dedans…
    Tristan obéit. Bien qu’il ne se fût guère abusé sur les difficultés d’un rapt sans précédent, il souffrait dans son honneur. Tout s’en était mêlé : un homme de Cobham qu’aucun des siens n’avait occis et cette venue, de Rochester, d’une compagnie importante pour assurer la sécurité du prince de Galles. Son éton nement et sa vergogne lui tourmentaient le cœur, les poumons. Sa conscience en feu refusait cette défaite. Il mesurait le formidable intervalle qui le séparait de cette berge sableuse au-delà de laquelle la Goberde ou plutôt Calletot attendait. Ils pouvaient, si Paindorge et lui survivaient, courir jusqu’à ce petit havre où dansotaient deux barques. Mais que faire ? Aller de l’avant, c’était périr.
    L’eau clapotait entre ses jambes. L’eau les trahissait, Paindorge et lui. L’écuyer s’arrêta et le prit par l’épaule :
    – Il faut revenir à Cobham.
    – Mais…
    – Rober deux chevaux et galoper… Nous avons le temps : la lune est encore haute… Si rien ne vient nous contrarier, croyez-moi, nous reverrons

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