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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Cobham et en revenir éprouvés, comment voulez-vous que le dauphin Charles accorde un soupçon de créance au récit que je lui ferai de notre mésaventure ?
    – Robert et moi saurons vous cautionner !
    Après ce qu’elle avait vu et subi, Luciane pouvait se courroucer contre ce que lui, Tristan, considérait comme une singulière injustice. Sa voix soudain plate – sa voix de vaincu – donna plus de poids sinon plus d’âpreté à sa consternation :
    – Paindorge, m’amie, ne peut-être un témoin digne de foi puisqu’il est mon écuyer. Quant à vous, personne d’autre que lui et moi ne peut attester que vous étiez là-bas… D’ailleurs, par sûreté, il est préférable qu’on ignore que vous avez servi les Anglais, même contre votre volonté, tout d’abord en Normandie, puis sur la Grande Ile. Un simple mot de trop vous préjudicierait.
    Assis côte à côte, hanche à hanche, cuisse à cuisse sur la seconde marche de l’escalier de proue, ils se tournaient parfois vers la côte, toujours pareillement merveillés de la voir si proche et de l’imaginer accueillante. Luciane tournillait une mèche de ses cheveux et son regard, son silence révélaient une inquiétude grandissante. Tristan percevait cet émoi avec d’autant plus d’acuité qu’il avait ressenti le même, quelques mois plus tôt, chez Oriabel. Des esseulées toutes deux ; toutes deux menacées des sévices des hommes. Il s’était refusé à imaginer le moment où ils devraient se séparer. Or, maintenant que la France toute proche déployait sous leurs yeux ses rives ennuagées des brumes du couchant, l’idée d’une séparation lui devenait insupportable.
    – Nous avons fait, par prudence, un long détour… Je crains le déchirement.
    – Que voulez-vous dire ?
    – Il ne faut pas que notre séparation soit un déchirement. Je vous dois mon aide.
    Luciane pâlit et serra les dents. Il la prit par l’épaule et la pressa contre lui, doucement et brièvement afin qu’elle ne se méprit pas… Sur quoi ? Il n’allait pas confondre l’amitié et l’amour, la sollicitude et la passion ! «  Menteur  » En quittant Mathilde, il avait pensé qu’il était à tout jamais guéri contre les tentations de sa propre volupté ; or, tout à coup, après les tumultes d’une action de guerre, les orages des sens lui semblaient aussi agréables et nécessaires que ceux du ciel après quelques journées torrides.
    – Je suis seule… Ma famille enterrée… Mon père disparu après sa dernière quarantaine (497) …
    – Le cœur nous faut 245 à parler ainsi, mais certains desseins nous sont sans doute interdits… Je suis comme marié…
    C’était, à son avis, la meilleure formule. Il regarda Luciane dans les yeux. Elle eut un cillement des paupières. Une larme tomba de chacune d’elles.
    – Ne vous méprenez pas, dit-elle. C’est le vent.
    Il sourit, calme et neutre en surface :
    – Même si ce n’était le vent, pourquoi auriez-vous vergogne ?
    Elle se leva et dit qu’elle allait voir Paindorge. Il la retint fermement par le poignet. Le vent auquel elle avait fait allusion ne manquait ni de vigueur ni de fraîcheur, et la lente tombée du jour semblait l’inciter à montrer plus d’ardeur encore que dans la journée. Ce n’était pas l’autan du pays de Langue d’Oc qui allumait partout des passions charnelles et soufflait la folie sur celles qui existaient déjà. Oriabel était-elle à Castelreng ? Il en doutait. Alors où l’attendait-elle ? Il ne commettait aucun parjure, aucune infidélité lorsqu’il contemplait Luciane ! et se montrait envers elle plus losengier 246 qu’il ne l’était d’ordinaire.
    – Le bleu de vos yeux semble celui du ciel de mon pays… Ces vêtements d’homme que Calletot vous a donnés paraissent avoir été faits pour vous… Nulle autre que vous ne les pourrait mieux porter.
    Il ne comprenait pas ce qui lui advenait : ce besoin sans cesse accru de lui être agréable. Sa destinée se trouvait liée à une autre, et les félicités qu’elle lui avait données imprégnaient encore tous ses sens. Cependant, chose étrange et bien qu’il y pensât toujours avec ferveur, il était moins pressé de la revoir, d’entendre sa voix, son rire, et de l’étreindre.
    – Vous venez de penser à elle.
    Les prunelles d’azur foncé brillaient d’intelligence entre leurs longs cils mouillés.
    – Pourquoi vous mentirais-je ? Oui, j’y ai pensé…
    La

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