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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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l’épée qui le déhanchait un peu, se sentit envahi par une colère pareille à celle qu’il avait éprouvée lorsque ce guépin 68 l’avait accusé de trahison.
    – Que nous veux-tu, Salbris ?… Ou mieux : que me veux-tu ?
    Enfoui sous ses paupières mi-closes, le regard du marmouset eut un étincellement qui ne devait rien au soleil :
    – Ce que je veux ? Te voir périr de ma main… Venger Thomas d’Orgeville. Je t’ai vu l’occire…
    – J’ignorais que c’était lui comme il ignorait que c’était moi. Et c’est lui qui m’est rentré dedans, si j’ose dire, mais pas à la façon dont tu conçois cela !
    Mathilde émit un petit rire et Salbris porta sa main à son épée.
    – Dommage que tu n’aies pas vu rôtir tes compères, Castelreng. Tous hurlaient, sauf le moine comme je voudrais que tu hurles !
    – Ils n’étaient pas mes compères. Des témoins l’ont hautement affirmé : Jean Doublet et Gérard de Thurey. Si tu mets la parole du maréchal de Bourgogne en doute, tu peux mettre en doute celle du roi Jean qui m’envoya en Lyonnais, quasiment devant toi, pour épier les routiers… Ils m’ont pris… Je te l’ai dit pour sauver ma vie, j’ai dû me résoudre à me défendre contre les hommes de Bourbon qui m’assaillaient. Qu’il y ait eu Orgeville avec eux, j’en ai regret sincère et j’informerai le roi Jean…
    – Tu ne lui diras rien !… Je suis venu à Montaigny pour t’occire.
    Mathilde poussa un cri, Tristan se mit à rire. Elle crut qu’il prenait son angoisse en dérision alors que c’était l’arrogance de son ancien compagnon qui le réjouissait. De basses injures emplissaient sa tête ; les lancer à la face de cet outrecuidant titubant dans son fer ne l’eût aucunement apaisé. Les yeux secs, regarda les compagnons de Salbris. « Un troppelet 69 de hallefessiers ! » Tous les cinq semblaient gênés, pourtant, d’assister à pareille scène et leurs yeux se portaient davantage sur Mathilde que sur leur chef. Il y avait trois cranequiniers, un picquenaire, et le cinquième, pour arme d’hast, arborait au bout d’une hampe gainée de cuir, couverte de bossettes d’acier, une feuille que, sans doute, il avait maniée dans une boucherie avant de s’engager dans le métier des armes.
    – En quelque sorte, Guillonnet, tu viens me provoquer chez moi… As-tu songé qu’il y a céans une trentaine d’hommes, donc une bonne archerie, à commencer par les six gars, là-bas, sur le pont ? Ils nous avaient suivis et vous ferment le passage… N’est-ce pas, Panazol ?
    Interloqué, le sénéchal bafouilla : « Oui, bien sûr. » Sa confusion devenait aussi plaisante pour Tristan que celle de Salbris. « Deux coquins qui me haïssent ! La même race que ceux de Brignais ! » D’instinct, il regarda ses mains, grandes, puissantes tout autant sinon plus que celles de ces malebêtes. Dommage qu’il les eût employées dernièrement à des jeux et attouchements sans profit pour son énergie. Relevant les yeux, il vit les soudoyers de Montaigny, l’arc en main, couronner le chemin de ronde.
    – Que décides-tu, Salbris ?… Qu’as-tu dit à tes hommes ? Ils se trouvent en péril de mort par ta faute. Nos murailles à présent sont fort bien bataillies !
    – Je te connais : jamais tu ne commanderas le tir à ces archers !
    – Moi si, dit Mathilde.
    Et, haussant le ton :
    – Olivon, Vouillon, Fèvre, Pradeau, Gaudin et Bouteville, mes compères, encochez la sagette et attendez mon signe !
    Elle se tourna vers les tours d’entrée où le bossu veillait, armé d’une arbalète :
    – C’est bien, Hugonin… S’ils nous veulent du mal, il vous faut les occire.
    Une louve défendant son mâle blessé n’eût pas eu un regard différent du sien.
    – Tudieu ! s’écria-t-elle, nous ne sommes mariés que depuis samedi dernier. Nous voilà à la veille Pâques 70 et il vous faut encore troubler notre ruse et nous embrener 71  !
    Tristan regarda ce fâcheux qui se considérait comme un prud’homme le jour et une gente dame la nuit. Mesurant, comme à Lyon, l’abîme qui les séparait, il préféra la circonspection à la jactance :
    – Tu m’as offensé malement, Guillonnet. Tu le déprécierais, toi, un chevalier, en affrontant un malandrin tel que moi !… Tu me juges vil : tu souillerais ton épée en la mouillant d’une seule goutte de mon sang si tu m’atteignais, bien sûr.
    Peut-être avait-il tort

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