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Le Pré-aux-Clercs

Titel: Le Pré-aux-Clercs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Seuls les corps des deux hommes que Bouracan avait balancés par la fenêtre gisaient, pauvres loques informes, à quelques pas de la porte de la maison.
    Ne voyant rien, il écouta. Il avait l’oreille fine. Il perçut le bruit sourd, encore lointain, d’une troupe de cavaliers en marche.
    François l’avait suivi et, penché à côté de lui, regardait et écoutait comme lui.
    Quant à lui, il était parfaitement fixé. Pourtant il essaya de se rassurer :
    « Après tout, rien ne prouve que c’est à nous qu’on en veut. Descendons toujours, nous verrons bien.
    – Descendons », fit laconiquement François.
    Au même instant, Strapafar parut en haut de l’escalier et répondant à une interrogation muette :
    « C’est une battue en règle et supérieurement organisée, je vous en réponds ! Ah ! milodious ! pour un guêpier, nous pouvons dire que nous sommes tombés dans un joli guêpier !… Des gardes, des sergents, des huissiers, des archers, des hommes d’armes à pied et à cheval, il y en a partout, monsieur : dans la rue de Seine, sur le Chemin-aux-Clercs, sur le chemin du Petit-Pré… Et tout cela vient ici, dans cette rue, et dans cette maison tout particulièrement.
    – Mais pourquoi ce déploiement de forces ? demanda François.
    – Eh bé ! contre les hérétiques donc !… Ne savez-vous pas, monsieur, que c’est ici ce que l’on appelle le Petit Genève ?… Le Petit Genève, comme le clos du Patriarche, près Saint-Médard, comme la Cerisaie du Temple, c’est comme qui dirait des nids à luthériens, à calvinistes, à parpaillots, comme on commence à les appeler, et que l’enfer les engloutisse !… Or, il paraît qu’on a décidé de détruire d’un coup tous ces foyers d’infection… ou tout au moins celui-ci où nous nous trouvons précisément, nous… Et c’est bien là la plus grande malchance qui pouvait nous arriver… Comprenez-vous, monsieur ?
    – Je comprends », dit François, qui écoutait avec une attention soutenue les explications de Strapafar.
    Flatté du compliment, Strapafar reprit :
    « Ce déploiement de forces, comme vous l’appelez, c’est donc à seule fin de prendre dans un vaste coup de filet tous les mécréants de ce quartier. Les exempts vont envahir et fouiller les maisons du haut en bas. Et ce qui m’inquiète, monsieur, c’est qu’ils en ont plus particulièrement à l’avant-dernière maison de cette rue… La maison où nous sommes… C’est qu’on n’est pas né d’hier, monsieur, et on sait ce que parler veut dire. S’il se trouve d’aventure quelques bons catholiques, comme nous, égarés dans la bagarre, si ces bons catholiques sont quelque peu gênants, comme je crois que nous le sommes… Eh bien, l’occasion sera bonne pour leur mettre la main au collet… ou les expédier tout à la douce.
    – Dio birbante ! vociféra Corpodibale indigné, reste à savoir si ces bons catholiques se laisseront bénévolement égorger comme moutons à l’abattoir !
    – Messieurs, intervint Trinquemaille de sa voix onctueuse, M. de Strapafar nous a très clairement exprimé le résultat de ses judicieuses observations. Cependant, il est un danger qu’il oublie de vous signaler et sur lequel je crois devoir appeler votre attention. Messieurs, on ne peut pas dire que les forces qui encerclent ce petit quartier sont quantité négligeable. Elles sont, ces forces, plus qu’imposantes, elles sont, énormes. Et cependant, cela n’est rien, absolument rien, messieurs, à côté de la foule qui les accompagne… Je la connais, la foule, messieurs et celle-là ne me dit rien qui vaille… J’ai reconnu aux premiers rangs certaines figures louches de ma connaissance qui paraissaient furieusement se démener… Il m’apparaît clair comme le jour qu’on l’a travaillée et qu’on la travaille sérieusement, cette foule… En sorte que mon opinion est celle-ci : malheur à ceux qui, ayant eu la bonne fortune d’échapper aux archers et aux soldats, tomberont au milieu de cette foule déchaînée !… Que saint Pancrace et saint Barnabé nous préservent de ceux-là… sans quoi, je ne donnerais pas un blanc de toutes nos carcasses. »
    Les explications de Trinquemaille, comme celles de Strapafar, avaient été écoutées avec la plus grande attention, non seulement par Beaurevers et François mais encore par Fiorinda. Et nous devons même dire qu’elle ne s’était pas montrée la moins attentive des

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