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Le prince des ténèbres

Le prince des ténèbres

Titel: Le prince des ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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vide ton sac ! Que sais-tu de si épouvantable et mystérieux sur la mort de Lady Aliénor ?
    — Je n’ai pas dit « Lady Aliénor » ! chantonna l’autre. Je n’ai pas dit « Lady Aliénor » ! J’ai dit « mon secret ». Vous avez promis de jurer et de partager vos gains avec moi en échange de mon secret !
    Il s’immobilisa et ses traits avinés s’affaissèrent quand Ranulf le piqua sous le menton de la pointe de son arme.
    — Doucement ! Doucement ! plaida-t-il d’une voix embarrassée.
    — Ton secret, gredin !
    Le portier s’agenouilla et se mit à gratter la terre meuble près du poteau du gibet. Il écarta cailloux et mottes pour finalement extraire un sac en lambeaux.
    — Voici mon secret !
    Ranulf s’accroupit près de lui, trancha le cuir et déversa le contenu du sac dans le faible rond lumineux projeté par la lanterne. Pas grand-chose. Des os fins et jaunâtres, et un petit collier en cuir.
    — Qu’est-ce que c’est ? marmonna Ranulf.
    — Eh bien ! Vous avez entendu parler du meurtre ? répondit le portier. L’adolescent et la femme dont on a retrouvé les corps nus dans une fondrière ? Une semaine après, je braconnais dans les parages et je suis tombé sur le cadavre d’un petit chien de compagnie. La pauvre bête avait dû mourir de faim et de soif, peut-être, ou encore de chagrin pour sa maîtresse. Seules les grandes dames ont des petits chiens de compagnie comme celui-là ! Personne, dans le village, ne posséderait ce genre de chien, et au couvent, la prieure y est fermement opposée. J’en ai donc conclu qu’il devait appartenir à la jeune femme assassinée.
    Son rictus satisfait révéla des chicots jaunes qui luisaient étrangement dans la pénombre. Il montra le morceau de cuir élimé.
    — C’est le seul indice qu’on a sur elle.
    — Pourquoi ne pas l’avoir remis au shérif ou aux juges ? demanda Ranulf.
    — Parce qu’il y avait un fermoir en or, marmonna son interlocuteur. Je l’ai vendu à un rétameur. C’est pourquoi j’ai pensé que ce serait mieux d’enterrer la pauvre bête.
    Il lut la colère dans les yeux de Ranulf.
    — Prenez ce collier ! le pressa-t-il. Une devise y est gravée. Examinez-la soigneusement. Eh bien, voilà ! C’est mon secret ! geignit-il. Je ne sais rien de Lady Aliénor. J’étais saoul comme une grive le soir de sa mort. Il a fallu que je cuve mon vin avant que la prieure m’envoie à Woodstock. Dieu sait comment j’ai réussi à y aller ! J’ai donné le message à un chambellan et je suis revenu tant bien que mal.
    — Tu t’y es rendu à cheval ?
    — Non, il y a un raccourci par les champs, qui est très visible en plein jour. Allez de l’autre côté du prieuré, derrière la ferme. Vous verrez le chemin. Il faut moins d’une heure pour atteindre le palais.
    Ranulf empocha le collier de cuir avec un soupir et attendit que son compagnon réenterre les os. Puis ils revinrent au prieuré, Ranulf soutenant le portier et l’écoutant se décerner compliment sur compliment.
    — Personne n’aurait l’idée de chercher sous une potence ! ne cessait-il de bafouiller.
    Ranulf se gardait bien de le contredire, et une fois franchie la porte de Galilée, il lui tendit l’argent promis et rentra à l’hôtellerie.
    Corbett ne dormait pas. Il était assis par terre, des parchemins éparpillés tout autour de lui. Ranulf devina qu’il avait passé son temps à gribouiller des notes en s’efforçant de trouver une logique à l’énigme qui le préoccupait. Il lui raconta succinctement ce qui venait de lui arriver. Corbett grommelait avec impatience et le pressait d’en arriver au fait. À la fin, il s’empara du collier abîmé. Il ordonna à Ranulf de lever la chandelle et examina soigneusement l’inscription gravée sur le cuir défraîchi : Noli me tangere . « Ne me touchez pas ! »
    — Qu’en penses-tu, Ranulf ?
    — On dirait la devise d’une famille.
    — C’est possible.
    Corbett frotta le collier entre ses doigts et alla à la fenêtre, écoutant d’une oreille distraite les bruits de la nuit. Il avait l’intime conviction que l’assassinat de Lady Aliénor et les meurtres atroces et silencieux de cette mystérieuse jeune femme et de son compagnon dans les bois étaient inextricablement liés.
     
     
    Les cachots du Louvre étaient l’antichambre de l’Enfer. Peu, parmi ceux qui descendaient le sombre escalier de pierre, réapparaissaient pour raconter

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