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Le quatrième cavalier

Le quatrième cavalier

Titel: Le quatrième cavalier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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j’avais pénétré dans le
château de Peredur.
    — J’avais rêvé de toi, grand et aux cheveux d’or.
    — Et tu ne rêves plus ? demandai-je, sachant que
ses pouvoirs de devineresse lui venaient en rêve.
    — Si fait, répondit-elle gravement. Mon frère me parle.
    — Ton frère ? m’étonnai-je.
    — Je suis née jumelle. Mon frère est venu le premier, et
mort quand je suis née. Il est parti dans le monde des ombres et me parle de ce
qu’il y voit.
    — Et qu’y voit-il ?
    — Il voit ton roi.
    — Alfred, dis-je aigrement. Est-ce bon ou mauvais ?
    — Je ne sais. Les rêves sont vagues.
    Iseult n’était point chrétienne. Elle croyait que chaque lieu
et chose abrite son dieu ou sa déesse. Une nymphe pour une rivière, une dryade
pour une forêt, un esprit pour un arbre, un dieu pour le feu et un autre pour
la mer. Le Dieu chrétien, comme Thor ou Odin, n’était qu’une divinité parmi cette
foule de puissances invisibles, et ses rêves, disait-elle, étaient comme d’en
écouter les chuchotements. Un jour qu’elle chevauchait avec moi dans les
collines au-dessus de la mer déserte, elle me déclara brusquement qu’Alfred
allait me donner du pouvoir.
    — Il me déteste, il ne me donnera rien.
    — Il te donnera du pouvoir, répéta-t-elle sans s’émouvoir.
(Je la fixai et elle se tourna vers l’horizon où le Ciel rencontre les vagues. Ses
cheveux dénoués flottaient au vent.) Mon frère me l’a dit. Alfred te donnera du
pouvoir, et tu reprendras ta terre du Nord et ta femme sera une créature d’or.
    — Ma femme ?
    Elle me regarda avec tristesse.
    — Voilà, tu sais.
    Elle talonna son cheval et galopa sur la crête, cheveux au
vent, les yeux embués de larmes. Je voulais en savoir davantage, mais elle
répondit qu’elle m’avait raconté son rêve et que je devais m’estimer heureux.
    À la fin de l’été, nous conduisîmes le verrat dans la forêt
pour qu’il se nourrisse de glands et noix tombées. J’achetai des sacs de sel, car
le moment de l’abattage était venu, et il faudrait saler la viande de nos porcs
et bœufs dans les tonneaux pour nous nourrir à l’hiver. Une partie de nos
vivres viendrait des hommes qui louaient de la terre en bordure de notre
propriété. J’allai leur dire que j’attendais paiement en blé, orge et bétail. Pour
leur montrer ce qui se passerait s’ils tentaient de me duper, j’achetai une
dizaine de bonnes épées à un forgeron d’Exanceaster. J’en armai mes hommes et
les y entraînai. Mildrith ne croyait peut-être pas à la venue de la guerre, mais
je ne remerciais pas Dieu d’avoir apaisé le cœur des Danes.
    La fin de l’automne, fort pluvieuse, amena le bailli à Oxton.
Le nommé Harald, chargé de maintenir la paix en Defnascir, arriva à cheval avec
six cavaliers, tous en cotte de mailles et casque, et armés de lances et d’épées.
Je l’attendis dans mon château, le forçant à descendre de cheval et à pénétrer
dans la pénombre enfumée. Il entra prudemment, craignant une embuscade. Puis il
s’habitua à l’obscurité et me vit devant l’âtre.
    — Tu es sommé à la cour de justice du comté, m’annonça-t-il.
    — Tu apportes des épées en ma demeure ? dis-je en
voyant les hommes qui l’avaient suivi.
    Il se tourna et aperçut mes hommes armés de lances et de
haches. Ayant vu approcher sa troupe, je les avais appelés.
    Harald avait la réputation d’un homme de bien, sensé et
juste. Il savait que des armes sous un toit peuvent mener au meurtre.
    — Attendez dehors, dit-il à ses hommes, tandis que je
faisais signe aux miens de poser leurs armes. Tu es sommé… reprit-il.
    — Je t’ai entendu, répondis-je.
    — Une dette doit être remboursée, dit-il, et la mort d’un
homme payée.
    Je ne répondis rien. L’un de mes chiens gronda doucement et
je le fis taire d’un geste.
    — La cour se réunira au jour de Tous les Saints. À la
cathédrale.
    — J’y serai.
    Il ôta son casque, révélant un crâne dégarni frangé de
cheveux bruns. Il avait bien dix ans de plus que moi et était fort robuste, avec
deux doigts manquant à la main du bouclier. Il s’avança en boitillant. Je
calmai les chiens et attendis.
    — J’étais à Cynuit, me dit-il à voix basse.
    — Et moi aussi, bien que certains prétendent que non.
    — Je sais ce que tu y as fait.
    — Et moi aussi.
    Il ne releva pas ma maussaderie. Il me témoignait sa
compassion, mais j’étais trop fier

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