Le retour

revenu, dit Richard, ému.
     
    - On s'est ben
ennuyés de vous, p'pa, poursuivit Carole, en faisant un effort pour ne pas
pleurer de joie.
     
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    Le souper fut pris
dans une ambiance de fête aisément compréhensible. Les enfants avaient beau
avoir fréquemment rendu visite à leur père au sanatorium, ce n'était pas comme
le revoir à la maison. Le chef de la famille Morin était définitivement de
retour. Même Jean-Louis, arrivé quelques minutes après les autres, semblait
moins distant ce soir-là. Pour la première fois depuis bien longtemps, il
paraissait être un membre à part entière de la famille.
     
    Ce soir-là,
Laurette savoura pleinement chacun des moments de leur intimité retrouvée.
Après avoir éteint la lumière et fait leur prière en commun, à genoux, de
chaque côté du lit, ils s'étaient couchés. Elle s'était immédiatement lovée
contre lui, impatiente de le sentir enfin contre elle après une si longue
attente. Elle avait oublié depuis longtemps à quel point le "devoir
conjugal ", comme l'appelait pudiquement le curé Perreault, lui avait pesé
parfois avant l'hospitalisation de son mari. Elle constatait maintenant qu'il
lui avait manqué.
     
    Quelques minutes
plus tard, Gérard lui murmura:
     
    - À cette heure
que je suis revenu, tu pourras lâcher ta job chez Viau quand tu voudras. Demain
avant-midi, je vais aller à la Dominion Rubber. Je suis certain qu'ils vont me
trouver quelque chose à faire. J'ai tout de même travaillé là vingt-deux ans
avant de tomber malade.
     
    - Ils ont dû te
remplacer au magasin, lui fit remarquer sa femme.
     
    - C'est sûr, mais
ils vont sûrement avoir quelque chose pour moi. Vingt-deux ans, c'est quelque
chose.
     
    - Si ça marche,
tu peux être certain que je lâche l'ouvrage à la fin de la semaine, lui promit
Laurette. J'ai hâte d'avoir juste à faire mon ouvrage de maison. En plus,
Carole a besoin d'être surveillée.
     
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    - Comment ça?
s'étonna son mari en se tournant vers elle dans le noir.
     
    - Les petits gars
ont l'air de l'intéresser un peu trop, lui dit sa femme sans entrer dans les
détails. Je sens qu'il va falloir lui serrer la vis. Les autres aussi ont
besoin que je sois là, prit-elle soin d'ajouter. Denise a l'air de s'être fait
enfin un nouveau cavalier et Richard devient un peu trop fantasque à mon goût.
Gilles est le seul qui m'inquiète pas trop.
     
    - Et Jean-Louis?
     
    - Lui, je sais
plus trop comment le prendre, avoua Laurette. Il continue à se tenir tout le
temps avec son Jacques Cormier. Je commence à trouver ça pas normal pantoute.
Il va falloir que tu lui parles, à ton gars.
     
    - Ouais,
acquiesça Gérard sans trop d'enthousiasme avant de jeter un coup d'oeil au
réveille-matin.
     
    A ce moment-là,
le chuintement provoqué par les pneus d'une voiture passant sur la rue Emmett,
devant la fenêtre de la chambre, apprit à Laurette que la pluie avait commencé
à tomber.
     
    - On est aussi
ben de dormir, dit-elle à son mari en se tournant sur le côté. Demain, je dois
me lever à six heures moins quart pour aller travailler.
     
    Chapitre 9
    Le travail
    Le lendemain
matin, Laurette s'éveilla quelques minutes avant que le réveille-matin ne sonne
et s'empressa de désactiver la sonnerie pour permettre à son mari de dormir un
peu plus longtemps.
     
    Elle se leva et
sortit de la chambre sans faire de bruit.
     
    A son entrée dans
la cuisine, elle vit par la fenêtre que le soleil brillait déjà dans un ciel
sans nuage.
     
    - Bonyeu, il
aurait pas pu faire ce temps-là pendant la fin de semaine! s'insurgea-t-elle en
ouvrant la porte intérieure pour laisser entrer une petite brise
rafraîchissante par la porte-moustiquaire.
     
    Ses enfants se
levèrent les uns après les autres dans les minutes suivantes. À chacun, elle
s'empressa de recommander à mi-voix:
     
    - Fais pas trop
de bruit. Laisse dormir ton père.
     
    - Qu'est-ce qu'il
va faire toute la journée? lui demanda Jean-Louis en finissant de nouer sa
cravate après avoir fait sa toilette.
     
    - Il est supposé
aller voir à la Dominion Rubber. Il est à peu près sûr qu'ils vont le
reprendre.
     
    - Avec quoi on
fait nos lunchs? demanda Carole au moment où sa mère rangeait le sien dans son
large sac à main.
     
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    - Il reste du
poulet pressé. En revenant de l'école, t'arrêteras chez Paré pour m'acheter
deux pains Weston.
     
    Toi, Richard,
oublie pas de sortir les poubelles. La semaine passée, Gilles les