Le retour
paquet de paperasses à remplir pour le garage.
Laurette remplit
la bouilloire d'eau et la déposa sur le poêle après avoir allumé le brûleur.
Les deux hommes avaient pris place autour de la table. Elle était toute
bouleversée de revoir enfin son mari à la maison après une si longue absence.
Il était bien revenu à deux ou trois reprises depuis son entrée au sanatorium
Saint-Joseph, mais ce n'étaient que de courtes visites de vingt-quatre heures
qui lui avaient fait souvent plus de mal que de bien.
- T'es vraiment
revenu pour de bon? lui demandât-
elle en déposant
les tasses de café sur la table. J'ai de la misère à le croire, ajouta-t-elle,
les larmes aux yeux.
- Oui. C'est ben
fini, se contenta de répondre Gérard avant de prendre une première gorgée de
café. Cybole que ça fait du bien d'être chez nous! Je pensais jamais sortir de
là sur mes deux pieds, précisa-t-il à l'intention de son beau-frère.
- Comment ça se
fait que t'arrives avec Rosaire? fit Laurette, curieuse.
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- Le docteur m'a
appris la nouvelle seulement hier après-midi. Ça fait que comme je savais que
c'était au tour de ma mère, Colombe et Rosaire de venir me voir aujourd'hui, je
leur ai téléphoné hier soir de pas se déranger, que je sortais de Saint-Joseph.
- Je lui ai dit:
" Grouille pas avant demain avant-midi.
Je vais passer te
chercher et te ramener chez vous avec ta valise", l'interrompit Rosaire
Nadeau.
- T'aurais pu me
téléphoner pour m'annoncer la nouvelle, fit Laurette avec une pointe de
reproche dans la voix. Là, je t'ai rien préparé de spécial pour souper.
- C'est ben
correct comme ça. Rosaire est venu me chercher après la messe et il m'a amené
dîner à la maison.
Colombe avait mis
les petits plats dans les grands et ma mère m'avait fait cuire un rôti de boeuf
comme ça faisait longtemps que j'en n'avais pas mangé.
Sa femme piqua un
fard en entendant ces paroles.
- C'est sûr que
c'est pas ce que j'aurais pu te faire manger pour dîner, dit-elle, un rien
amère. En tout cas, Rosaire, t'es ben fin d'être allé le chercher,
ajouta-t-elle en se tournant vers son beau-frère.
- C'est ben beau,
tout ça, mais je dois partir, dit le petit homme gras en se levant avec un air
affairé. Même si c'est dimanche, j'ai de l'ouvrage qui m'attend. Prends ben
soin de toi, Gérard, conseilla-t-il à son beau-frère après avoir embrassé
Laurette sur une joue.
Ses hôtes le
raccompagnèrent jusqu'à sa voiture stationnée devant la porte. L'énorme
Cadillac noire avait attiré quelques gamins de la rue Archambault ainsi que le
jeune René Beaulieu. Ils étaient une demi-douzaine en train de l'examiner
malgré les quelques grains de pluie qui commençaient à tomber.
Le couple rentra
dans l'appartement après avoir salué Rosaire une dernière fois.
219
Aussitôt,
Laurette se mit à ranger les vêtements fraîchement repassés après avoir replié
sa planche à repasser.
Sans dire un mot,
Gérard demeura un long moment debout devant la porte-moustiquaire de la cuisine
avant de s'asseoir dans sa chaise berçante en poussant un profond soupir de
contentement.
- Content d'être
chez nous? lui demanda sa femme.
- Ça fait
longtemps que j'attends ça, reconnut-il en s'emparant de l'exemplaire de La
Patrie qu'un des garçons avait déposé sur le rebord de la fenêtre.
Laurette examina
son mari à la dérobée. Son Gérard ne faisait pas ses quarante-cinq ans. Malgré
son teint un peu pâle, il avait l'air en bonne santé et reposé.
La porte de la
chambre des filles s'ouvrit sur le visage ensommeillé de Denise. La vue de son
père la réveilla tout à fait. Tout heureuse de le revoir, elle se précipita
vers son père pour l'embrasser sur une joue.
- Je suis bien
contente que vous soyez là, p'pa. Êtesvous revenu pour de bon? lui
demanda-t-elle. Je vous ai même pas entendu entrer.
- Ben oui. Ma
valise est déjà sur mon lit.
- Si c'est comme
ça, je vais aller la défaire pendant que m'man va finir de s'occuper du linge
repassé.
Quelques minutes
plus tard, Carole rentra en compagnie de ses deux frères. Ils demeurèrent
d'abord figés en apercevant leur père assis dans sa chaise berçante. Puis les
trois plus jeunes de la famille s'élancèrent vers lui en manifestant bruyamment
leur joie de le voir de retour définitivement à la maison.
- On est ben
contents que vous soyez
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