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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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les
prêtres continuaient à alimenter une douzaine de bûchers tandis que notre
vacarme s’élevait dans la nuit tel un défi aux spectres qui s’étaient faufilés
pour maudire les couches de Norwenna.
    Morgane,
Sebile, Nimue et une fillette entrèrent dans le château. Norwenna hurla. Mais
criait-elle pour protester contre l’arrivée des femmes de Merlin ou parce que
l’enfant têtu déchirait son corps en deux, nous ne pouvions le dire. D’autres
cris s’élevèrent lorsque Morgane chassa les servantes chrétiennes. Elle lança
les deux crucifix dans la neige et jeta au feu une poignée d’armoise commune
apportée par l’herbière. Nimue me raconta par la suite qu’elles placèrent dans
la couche humide des pépites de fer pour effaroucher les mauvais esprits qui
s’y étaient déjà nichés et disposèrent sept crocs de faucon émerillon autour de
la tête de la femme en contorsion pour faire venir des Dieux les esprits
bienfaisants.
    Sebile,
l’esclave de Morgane, plaça une branche de bouleau au-dessus de la porte et en
agita une autre au-dessus du corps souffrant de la princesse. Nimue s’accroupit
à la porte et pissa sur le seuil pour éloigner du château les méchantes fées
puis, ayant recueilli un peu de son urine dans la paume de sa main, elle la
porta jusqu’au lit de Norwenna pour en asperger la paillasse : la
précaution n’était pas inutile pour éviter que l’âme de l’enfant ne soit
subtilisée à l’heure de la naissance. Son masque d’or resplendissant à la lueur
des flammes, Morgane obligea Norwenna à desserrer les mains afin de placer une
amulette d’ambre entre les seins de la princesse. Terrorisée, la fillette, qui
était l’une des enfants trouvés de Merlin, attendait au pied du lit.
    La fumée qui
s’élevait des brasiers masquait les étoiles. Réveillées, les créatures des bois
qui s’étendaient au pied de Caer Cadarn hurlaient, surprises par le vacarme qui
s’était déchaîné au-dessus d’elles, tandis que le Grand Roi Uther levait les
yeux vers la lune mourante et implorait le ciel qu’il n’eût point trop tardé à
envoyer quérir Morgane. Morgane était la fille naturelle d’Uther, la première
des quatre bâtards que le Grand Roi avait eus d’Igraine de Gwynedd. Uther eût
sans doute préféré que Merlin fût là, mais Merlin avait disparu depuis des
mois, il était parti pour nulle part, il avait à jamais disparu, nous
semblait-il parfois, et Morgane, qui tenait de lui ses talents, devait officier
à sa place en cette nuit glaciale tandis que nous martelions nos récipients et
hurlions jusqu’à en être enroués pour chasser de Caer Cadarn les ennemis
malveillants. Uther lui-même se joignit au concert bien que le bruit de son
bâton frappant le bord du rempart fût en vérité très discret. Mgr Bedwin était
agenouillé, en prière, tandis que sa femme, chassée de la chambre de la
parturiente, sanglotait et gémissait, implorant le Dieu des chrétiens de
pardonner les sorcières.
    Mais la
sorcellerie opéra, car un enfant naquit, et il vivait.
    Le hurlement
que poussa Norwenna à cet instant était pire encore que tout ce qui l’avait
précédé. C’était le cri perçant d’un animal aux abois, une lamentation à faire
sangloter la nuit entière. Nimue me confia plus tard que Morgane avait provoqué
cette douleur en plongeant sa main dans le vagin pour en extraire l’enfant de
force. L’enfant sortit maculé de sang du ventre de sa mère au supplice, et
Morgane cria à la fillette effarouchée de prendre l’enfant dans ses bras
pendant que Nimue nouait et coupait le cordon ombilical. Il importait que le
bébé fût d’abord dans les bras d’une vierge, et c’est pourquoi la fillette
était demeurée au château, mais elle était effrayée et n’osait approcher de la
paillasse ensanglantée sur laquelle Norwenna haletait et où gisait maintenant
le nouveau-né, barbouillé de sang, comme mort-né.
« Prends-le ! » hurla Morgane, mais la fillette fondit en
larmes, et c’est Nimue qui arracha l’enfant à sa couche et lui dégagea la
bouche pour libérer sa respiration encore hoquetante.
    Tout s’annonçait
si mal. Le halo de lune pâlissait et la vierge avait fui le bébé qui commençait
maintenant à vagir. Uther l’entendit, et je le vis fermer les yeux en priant
que les Dieux lui eussent donné un garçon.
    « Dois-je ?
demanda Mgr Bedwin d’une voix hésitante.
    — Va »,
aboya Uther, et l’évêque

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