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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
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contente… Oh, ne fais pas cette tête ! Bouder ne servira à rien, il tient à bénir le Feu nouveau.
    — Tu as pourtant promis de l’éloigner l’espace de deux ou trois heures, gémit Marfa. Si on veut vraiment profiter de la fête…
    Nadia haussa les épaules.
    — Mon père ne m’a jamais empêchée de m’amuser tout mon soûl !
    — Cela dépend de ce que « s’amuser » signifie pour toi, observa Marfa. Et comme tu n’as pas d’amoureux… Oh, je ne parle pas de tous ceux qui te courtisent ! Enfin, libre à toi de rester pucelle jusqu’au jour béni où tu ceindras la couronne du mariage.
    — Ce n’est pas mon intention, répliqua sèchement Nadia. Mais ce n’est pas une raison pour tomber dans les bras du premier venu, comme certaines.
    Marfa plissa les lèvres dans une moue ironique.
    — Quand tu auras découvert le véritable plaisir, tu n’auras plus guère l’occasion de le goûter ! Ton seigneur et maître t’enfermera dans le térem, et il finira par venir te voir la semaine des quatre jeudis. Alors, n’attends pas trop longtemps ! Quant à moi…
    La jolie blonde se pencha vers elle et se mit à lui chuchoter quelque chose à l’oreille. Nadia rougit jusqu’à la racine des cheveux.
    — Par la très sainte Vierge !… Et qui est ce veinard ?
    — Je lui ai juré de ne point trahir notre secret.
    — Dis-moi au moins comment c’est arrivé !
    — Je rêvais de lui depuis bien longtemps, confia Marfa. La nuit, je l’imaginais tout près de moi. Je prenais mon oreiller pour le serrer contre moi, je fermais les yeux et je pensais à lui… Je laissais libre cours à ma fantaisie ! Enfin, il y a quelques jours, nous nous sommes retrouvés en tête à tête. J’avais le sentiment de lui appartenir déjà, corps et âme…
    Nadia s’empourpra de plus belle et pressa ses paumes sur ses joues.
    — Continue ! murmura-t-elle. Tu l’as donc revu, et… ?
    — Il m’a pris la main et il s’est mis à me caresser le poignet, puis le bras… J’ai alors senti chaque parcelle de ma peau s’embraser comme par magie ! Et ensuite… c’est arrivé, voilà tout. Ah, ce plaisir ! Je n’ai aucun remords, au contraire !
    Nadia voulut lui poser une question mais, à cet instant, un son de clochettes leur parvint du côté du portail.
    — Sois gentille, Marfa, va prévenir Philippos ! lança-t-elle. Il peut commencer le rituel des adieux au vieux feu, c’est mon père qui donnera le signal. Moi, je vais m’occuper des nouveaux arrivants !
    Sur ces mots, elle s’élança vers l’allée pour accueillir un groupe de jeunes gens qui s’avançaient à sa rencontre.
     
    Deux heures plus tard, la fête battait son plein. Nadia avait toutes les raisons d’être heureuse : ses invités s’amusaient à cœur joie, et son père lui avait confirmé que sa réception était une réussite. Philippos s’était honorablement acquitté de son rôle. Marchant en tête du cortège traditionnel, le petit père Domovoï avait transporté une pelletée de tisons flamboyants pris dans la cheminée jusqu’au bûcher qui trônait au milieu de la cour. Quand les flammes se furent élevées, le maître de maison avait béni le Feu nouveau. Le génie du foyer avait alors ramené et disposé quelques bûches dans l’âtre. Pendant que des langues de feu montaient, Philippos s’était mis à réciter une formule incantatoire, une invocation obscure que, Nadia était prête à le jurer, il venait d’inventer. Puis il avait imposé quelques instants de silence, tandis qu’une colonne de fumée et d’étincelles partait en grondant dans le noir, à travers la cheminée, vers le ciel étoilé.
    Oui, son nouveau soupirant savait se rendre utile ! Pendant toute la durée du repas, le garçon avait amusé les convives, rivalisant en bagout avec d’autres beaux parleurs. Philippos avait aussi été le premier à sauter par-dessus le feu de joie qui brûlait dans la cour débarrassée des tables et des bancs. Par miracle, sa longue touloupe ne s’était pas enflammée. Il avait alors jeté sa tenue de domovoï aux orties et ne quittait plus Nadia d’une semelle. Mais la belle n’avait d’yeux que pour celui qui faisait battre son cœur plus fort.
    Soudain, elle l’aperçut qui souriait en lui faisant signe d’approcher. Voulait-il qu’ils se joignent à la ronde que garçons et filles dansaient sur la pelouse ? Ou bien allait-il lui demander de sauter par-dessus le bûcher ?

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