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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
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amphore grecque en miniature. Quel était donc le nom qu’on donnait à ces petits vases à parfum ? Voilà : des aryballes ! Celle-ci était de fabrication récente, sans doute byzantine.
    Il huma le parfum entêtant et sensuel qui s’exhalait encore de la fiole. Pas de doute, il s’agissait de la même essence qu’il avait sentie dans la chapelle qui abritait le corps d’Olga. Ce flacon constituait un indice de première importance ! Il était impératif de le soumettre à la perspicacité d’Artem, lequel suivrait alors cette nouvelle piste. Et lui, Philippos ? Certes, il était fier d’assister le boyard… Mais ce n’était pas en restant un élève appliqué qu’il susciterait l’admiration de Nadia ! Ne devait-il pas montrer plus d’initiative ?
    — Assez atermoyé, lâcha-t-il entre ses dents. Un peu d’audace, que diable !
    Il bondit sur ses pieds, rempocha le flacon et quitta la tonnelle. Sa décision était prise : il mènerait sa propre enquête ! Grâce à l’aryballe, il obtiendrait des résultats décisifs qui permettraient de résoudre l’affaire. C’était le moyen le plus sûr de gagner le cœur de Nadia tout en travaillant pour le droujinnik. En marchant vers la sortie de la résidence, il éprouvait encore un vague sentiment de culpabilité. Il secoua la tête pour se débarrasser des pensées importunes. Comme disaient les Anciens, on ne juge point les vainqueurs ! Artem finirait bien par lui donner raison. En attendant, il agirait à sa guise !

CHAPITRE XI
    Philippos sortit de la résidence et s’engagea dans la grand-rue. Ses pensées revenaient sans cesse à sa bien-aimée. Il voulait arriver chez Nadia peu après le déjeuner dans l’espoir de la surprendre seule, sans la surveillance de sa nounou. Et pour se faire pardonner cette visite contraire à la bienséance, il lui remettrait un joli présent en gage de son affection !
    Il avançait d’un pas léger, écoutant d’une oreille distraite la clameur joyeuse de la foule. Sur la place du Marché, il se mit à flâner entre boutiques et éventaires, puis s’engagea dans la galerie des denrées rares et chères pour admirer les marchands étrangers. Attirés par la réputation de Tchernigov, cette « perle du Sud », des commerçants arrivaient du Ponant, mais aussi de l’Orient et même de la lointaine Arabie. On rencontrait également Khazars, Bulgares de la Volga et Agariens 1 à la barbe teinte en rouge. Philippos finit par rejoindre le secteur des drapiers et merciers. Il voulait choisir quelque chose de joli et d’utile à la fois. Il examinait d’un œil critique coiffes de lin, dentelles, rubans de soie, passementeries, rouleaux de fil d’or et d’argent, fibules, anneaux ouvragés… lorsqu’il aperçut une mercière qui cherchait à attirer l’attention de deux élégantes coiffées de hauts kakochniks. La marchande remuait ses doigts boudinés aux extrémités munies d’un curieux petit étui cylindrique à surface piquetée. Elle appelait ces protège-doigts en os ou en argent « dés à coudre », affirmant qu’il s’agissait de la dernière mode venue de Byzance. Les deux passantes furent séduites par cette nouveauté, et Philippos acheta lui aussi un dé en argent.
    Il quitta le marché couvert et s’arrêta un instant, ébloui par le soleil qui inondait la place. C’est alors qu’il repéra une silhouette à la chapka de boyard, la cape rejetée en arrière. C’était Igor. Il se tenait près d’une carriole arrêtée au bord de la chaussée et discutait avec une religieuse installée sur le banc du conducteur. Elle était maigre et raide comme un piquet avec sa grande coiffe et sa robe noire empesée. Assise à côté d’elle, une bonne sœur beaucoup plus jeune, petite et potelée, tenait les rênes, surveillant le cheval qui attendait d’un air résigné.
    Philippos se demanda ce que pouvaient bien se dire le fringant boyard et l’austère moniale. Sa haute coiffe ainsi que la médaille d’or suspendue à son cou indiquaient son rang de mère supérieure. Elle devait avoir entre trente et quarante étés, encore que son visage lisse, sans pli ni ride, parût sans âge. Ses traits émaciés contrastaient étrangement avec ses yeux de braise et ses lèvres sensuelles. Elle fronçait les sourcils et parlait d’un ton irrité. Ses reproches ne semblaient pas impressionner le jeune homme qui l’écoutait avec une expression amusée. Philippos avança discrètement

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