Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate
Syriens !
Le vieil homme se tourna vers son garçon, un enfant chétif aux yeux pâles, et posa son bras autour de ses épaules.
Après lui avoir lancé un regard rassurant, il s’adressa de nouveau aux légionnaires :
— Voici mon fils, Diaduménien. Je souhaite l’associer au pouvoir et lui donner, avec votre accord, le surnom d’Antonin. Vous constatez, compagnons, que je suis déjà d’un âge avancé. Mais Diaduménien, lui, avec la protection des dieux, sera pendant longtemps votre empereur !
La foule se souleva et des cris d’enthousiasme saluèrent l’enfant, sous les titres de César et d’Auguste.
Le petit garçon, si frêle dans son lourd manteau de pourpre, trembla légèrement. Son père l’encouragea à prendre la parole.
— Soyez remerciés, soldats, dit l’enfant d’une voix fragile. Soyez remerciés de bien vouloir m’accorder la dignité impériale et de nous avoir jugés, mon vénérable père et moi-même, dignes de recevoir de vous le titre d’empereurs romains et la charge du gouvernement de l’État. Je m’efforcerai de ne pas faillir à mes responsabilités et de ne pas trahir le nom des Antonins, ce nom illustre qui fut celui de Marcus Aurelius, de Commode, de Caracalla et de Geta.
Macrin se pencha vers lui et posa une main sur sa tête blonde :
— C’est très bien mon fils, murmura-t-il à son oreille avec fierté.
Puis il s’adressa de nouveau aux légionnaires du camp albain.
— Je vous le répète, poursuivit-il lorsque l’ovation fut terminée, la rébellion a été matée ! Le camp de Raphanae est tombé sous le glaive de mes prétoriens ! Ulpius Julianus a vaincu les transfuges !
Les soldats, de nouveau, s’étaient tus et écoutaient attentivement.
— Je n’aime pas les traîtres, déclara encore Macrin en prenant un air dégoûté, et je vous avoue que j’ai pensé punir les révoltés de Raphanae de telle sorte que plus aucun d’entre vous ne songe désormais à me trahir. J’ai pensé les condamner à une mort lente et cruelle, à assouvir une vengeance légitime. Oui, j’y ai pensé ! Et j’ai souhaité que leurs cris d’agonie vous parviennent jusqu’à Apamée.
Il marqua une pause pour récupérer. Sa gorge le brûlait d’avoir tant parlé.
— Mais je ne suis pas impitoyable et je ne suis pas inflexible. Je consens à pardonner à ceux qui se sont laissé abuser par d’habiles tromperies. Je n’ordonnerai aucune exécution, ni aucun supplice infamant. Les soldats de la légion gauloise ont compris qu’ils s’étaient fourvoyés et ont décidé de faire allégeance. Je suis prêt à leur ouvrir les bras et à faire preuve de clémence. Car à présent, une seule et unique chose m’importe : que la paix revienne enfin dans l’armée !
Pour galvaniser ses troupes, il termina sa harangue par une phrase pompeuse, une phrase que lui avait habilement suggérée Épagathos, son favori :
— Il n’y aura pas de répression. Car celui qui frappe l’armée frappe le cœur même de Rome. Et oublie à qui il doit la grandeur et la gloire de l’Empire !
Des acclamations frénétiques fusèrent de toutes parts. Ému, Macrin saisit discrètement la main de Diaduménien et la serra très fort dans la sienne.
Il avait réussi. Les soldats de la légion parthique lui étaient définitivement acquis. Et bientôt, son fidèle Julianus lui confirmerait qu’il avait effectivement vaincu les rebelles de Raphanae.
Il descendait de son estrade, le visage réjoui et radieux, lorsqu’un cavalier arriva au camp et mena son cheval jusqu’à sa hauteur.
L’empereur le vit mettre pied à terre et se diriger vers lui en tenant dans ses mains un paquet de linges ficelés.
— Pour toi, César, lui dit le prétorien, en lui tendant son colis.
— D’où viens-tu ? interrogea Macrin en faisant signe à son légat de prendre l’objet.
— De Raphanae, César.
— Ainsi tu m’apportes des nouvelles de Julianus ?
— Oui, César, fit le soldat en s’inclinant respectueusement, avant d’ajouter : les dieux ont donné la victoire à celui qui la méritait.
L’empereur n’eut pas le temps de lui demander autre chose que déjà le soldat enfourchait son cheval et repartait à toute allure. Il regarda le paquet dans les mains du légat avec un air satisfait, sans prendre la peine d’interpréter la phrase pour le moins sibylline du prétorien.
Ainsi il ne se trompait pas en affirmant que les soldats conduits par
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