Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate
faites bien comprendre aux soldats que leur vie dépend de l’issue de cette bataille ! Si certains d’entre eux s’imaginent pourvoir sauver leur misérable peau en refusant le combat, ils n’y gagneront rien ! Macrin ne fera pas de quartier ! Que le sens de l’honneur les porte au-delà du courage qu’on attend du commun des mortels ! Et qu’ils sachent bien que leur mort ne sera pas inutile ! Si, avant de mordre la poussière, ils ont tué au moins quatre soldats ennemis, Élagabal leur offrira l’immortalité !
Et tandis qu’il renvoyait d’un geste de la main ses officiers, il s’adressa à Comazon à mi-voix :
— Ce soir, nous serons morts ou vainqueurs. Macrin, nous arrivons !
La bataille débuta vers la huitième heure. Voyant que l’armée rebelle restait campée sur ses positions, Quintus Tarsino donna l’ordre à ses soldats de se mettre en mouvement. Dix mille fantassins de Macrin avancèrent lentement sur la plaine brûlante. Le bruit de leurs caligae, frappant le sol en cadence, s’éleva comme un grondement sorti des profondeurs de la terre.
Les premiers tirs de l’artillerie adverse fusèrent aussitôt. Des milliers de flèches, de pierres et de billes de plomb tombèrent en pluie drue et firent de nombreuses trouées dans leurs rangs, immédiatement refermées par les fantassins qui, avec une discipline remarquable, resserrèrent la formation et n’en continuèrent pas moins, stoïques et farouches, d’avancer au même rythme.
Arrivés à vingt-cinq pas de l’adversaire, ils s’immobilisèrent.
Les rebelles découvrirent alors avec stupeur que les légionnaires des quatre premiers rangs avaient dissimulé des sarisses (54) et qu’ils les inclinaient, l’extrémité du manche en appui sur le sol, de manière à leur présenter une redoutable herse de pointes.
Les fantassins des rangs suivants levèrent ensuite le bras comme un seul homme et, avec toute la force dont ils étaient capables, lancèrent, dans une même volée, leurs lourds pila et leurs plumbatae (55) . Ils vinrent ensuite s’arc-bouter contre les premières lignes tandis que les hommes de l’arrière, à leur tour, firent siffler dans les airs leurs lanceae (56) .
Cet ouragan de projectiles frappa bon nombre de soldats de l’armée de Varius. Les bêtes et les hommes s’écroulèrent ou commencèrent à refluer dans le désordre.
Les officiers encouragèrent les cavaliers galates à aller au contact de l’infanterie ennemie pour opérer une percée, mais les chevaux, effrayés, refusèrent de se lancer vers cette énorme masse compacte, protégée derrière la ligne dense des pointes.
Lorsque, enfin, les flèches des archers crétois vinrent s’abattre sur les insurgés, ceux-ci abandonnèrent toute idée d’enfoncer le front des armées régulières.
Alors que l’anarchie et l’indécision s’installaient dans les troupes de l’adversaire, les légionnaires des cohortes impériales reçurent l’ordre de charger.
Ils se ruèrent sur les partisans de Varius, en hurlant leur cri de guerre, accompagnés dans leur course par le son assourdissant des buccins (57) .
Mais leur élan fut arrêté net par les ravages que causèrent les deux volées de pila des rescapés des premiers rangs, et la bataille qui s’ensuivit prit alors l’allure d’un terrible corps à corps.
Les hommes, avec une férocité inouïe, s’assommaient à coups de bouclier, avant de s’éventrer avec leur glaive. Certains utilisaient leur javelot comme un épieu pour l’enfoncer dans le corps de l’adversaire. On n’entendit bientôt plus, dans cette mêlée confuse et sanglante, que les cris et l’immense fracas causé par le trépignement des caligae et le bruit métallique des scuta qui s’entrechoquaient.
Le tribun Decimus Aleanus se fit surprendre par un Galate qui trancha net les jarrets de son cheval. Désarçonné, il s’écroula avec un bruit sourd, évitant de justesse de se faire écraser par l’animal. Deux soldats rebelles s’élancèrent vers lui, mais d’un grand rond de bras, il trancha net la tête du premier et passa la pointe de son glaive au travers de la gorge du second. La violence des frappes qu’il venait de porter le fit chanceler. Il tituba, recula d’un pas, détourna d’un coup de bouclier le poignard d’un légionnaire. Mais tandis qu’il repoussait son assaillant, une flèche l’atteignit en plein cou.
Après une heure de combat seulement, l’armée de Varius
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