Le secret d'Eleusis
pessimisme.
— Enfin, ça pourrait être pire, admit-elle en souriant.
— Je m’en réjouis.
Claire entraîna Nico un peu plus loin dans le couloir et se mit à lui décrire en détail les blessures d’Augustin, les soins qu’il recevait et l’évolution du pronostic. Elle parlait vite, avec un accent très marqué, et il avait d’autant plus de mal à la comprendre qu’elle employait des termes médicaux qu’il ne connaissait pas. Mais il devina que son rôle n’était pas tant de comprendre que d’écouter. Il hocha la tête, claqua la langue de temps à autre et la laissa dire tout ce qu’elle avait sur le cœur.
Quinze minutes s’écoulèrent avant qu’elle n’en ait terminé. Puis elle se retourna en direction des portes de l’unité des soins intensifs avec l’air de se demander si quelque chose ne s’était pas passé en son absence. Nico en déduisit que son tour de parler était venu. Il lui donna le DVD et le lecteur de DVD qu’il avait emprunté à un collègue de l’université et lui expliqua que Knox voulait qu’elle sache à quel point les travaux d’Augustin avaient été appréciés. Claire sentit les larmes lui monter aux yeux et les sécha rapidement. Il la regarda retourner à sa veillée solitaire et éprouva de nouveau le besoin impérieux d’avoir dans sa vie quelqu’un qui ait des sentiments aussi profonds pour lui.
L’homme en fauteuil roulant se trouvait toujours devant l’entrée de l’hôpital. Il avait allumé une cigarette, qu’il tenait au creux de sa main comme s’il s’apprêtait à lancer une fléchette.
— Alors cette visite, demanda-t-il, ça s’est bien passé ?
— Oui, répondit Nico, plutôt surpris. Très bien.
II
Mikhaïl sentit l’adrénaline monter en lui lorsqu’ils rattrapèrent la fourgonnette, à deux ou trois kilomètres de l’aéroport, et poursuivirent leur route. Cette sensation n’avait rien de désagréable. Elle était stimulante, au contraire, comme l’exercice physique. Il se tourna vers Nadia en souriant.
— Ne faites pas ça, lui dit-il.
— Quoi ? demanda-t-elle.
— Ce que vous projetez de faire.
— Je ne projette rien du tout.
Il la tira par les cheveux et lui plaqua la tête contre ses cuisses et son sexe. Puis il déboucla sa ceinture et la lui passa autour du cou.
— Alors continuez comme ça, lui conseilla-t-il.
La circulation commença à ralentir. Des hommes en uniforme, leur arme à portée de main, bavardaient jovialement. Mikhaïl entendit le grondement étouffé d’un décollage ; un jet de l’Olympic Airways apparut au-dessus du terminal principal et s’élança dans le ciel sans nuages. L’été approchait. Ce serait agréable de le passer en Géorgie, pour une fois. Mikhaïl en voulait un peu à son père et à son grand-père de l’avoir obligé à vivre en exil pendant toutes ces années, mais cette époque était presque révolue. Il reviendrait triomphant, avec la Toison d’or, qui allait assurer la victoire de son grand-père. Il deviendrait un héros national et n’aurait plus qu’à choisir son ministère. Bien sûr, la Défense rapportait gros, mais il avait un faible pour l’Éducation. Travailler avec les enfants s’avérait toujours profondément enrichissant.
Ils passèrent sous un autopont et longèrent une longue rangée de deux-roues. Le parking courte durée était sur la gauche. Il pouvait accueillir environ cent cinquante voitures, mais il n’y avait plus beaucoup de places libres. Les moutons rentraient tous chez eux pour Pâques ! La fourgonnette ralentit et se gara. Zaal trouva une place un peu plus loin. Il serra le frein à main. Mikhaïl lui tendit sa ceinture, qui retenait Nadia par le cou.
— Si elle crée des problèmes, n’hésitez pas à prendre les mesures nécessaires, dit-il avant d’ouvrir sa portière.
— Vous savez que vous pouvez compter sur moi, patron, affirma Zaal d’un air assuré.
III
L’après-midi était déjà bien avancé. Gaëlle décida donc de commencer ses recherches à l’extérieur, pendant qu’il faisait encore jour. Toutefois, il y avait bien trop d’humidité et de lumière dans les serres et les dépendances pour que celles-ci abritent une chambre noire. Du reste, elle n’y trouva aucun matériel de photographie.
Elle avait tant marché que sa cheville la faisait souffrir. Préférant ne pas aggraver sa blessure, elle résolut de prendre un peu de repos et de raconter toute l’histoire à
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