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Le seigneur des Steppes

Le seigneur des Steppes

Titel: Le seigneur des Steppes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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hier
soir. Je dois suivre les ordres.
    — Tu laisserais Baotou brûler ? répliqua Chen Yi. Après
avoir prétendu pendant des années être son protecteur, tu t’enfuis dès qu’une
réelle menace se présente ?
    Lujan se sentit rougir.
    — Je suis un soldat. Quand mon général me dit de
marcher, je marche. Désolé.
    — Je vois que tu as autorisé tes hommes à emmener leurs
familles. Ta femme et tes enfants ne souffriront pas quand les Mongols
arriveront.
    Lujan regarda en direction de la colonne, vit que des
visages se tournaient déjà vers lui, attendant l’ordre du départ.
    — Même pour ça, j’ai outrepassé mes pouvoirs, mon ami.
    — N’appelle pas « ami » un homme que tu
abandonnes à la mort.
    La colère de Chen Yi était maintenant évidente et le
commandant détourna les yeux quand le petit homme poursuivit :
    — La roue tournera, Lujan. Tes maîtres paieront pour
leur cruauté comme tu paies pour cette honte.
    — Je dois partir, maintenant. Tu pourrais vider la
ville de ses habitants avant l’arrivée des Mongols. Beaucoup seront sauvés si
tu en donnes l’ordre.
    — Je le ferai peut-être. Après tout, il n’y aura plus d’autre
autorité dans Baotou quand vous serez partis.
    Les deux hommes savaient qu’il était impossible d’évacuer la
population, l’armée mongole n’était qu’à deux jours de cheval. Même en
utilisant tous les bateaux pour fuir par le fleuve, seule une petite partie des
habitants pourrait partir, le reste serait massacré. Lujan imagina les rizières
rouges de sang et soupira.
    — Bonne chance, murmura-t-il en regardant brièvement
Chen Yi.
    Il ne comprit pas la lueur de triomphe qu’il crut voir dans
les yeux du chef de triade et faillit lui en demander la raison avant de se
raviser. D’un pas rapide, il rejoignit l’avant de la colonne, où un soldat lui
gardait son cheval. Sous le regard de Chen Yi, les portes de la caserne s’ouvrirent,
le silence se fit dans les premiers rangs de la foule.
    Les habitants avaient laissé un passage pour les soldats
impériaux et leurs chariots mais leurs visages étaient glacés de haine. Lujan
ordonna à ses arbalétriers de se tenir prêts, d’une voix suffisamment forte
pour que la foule l’entende.
    Elle observait un silence déconcertant alors qu’il s’attendait
à une avalanche d’injures. Ses hommes serraient nerveusement leur sabre ou leur
pique en s’efforçant de ne pas voir les visages des gens qu’ils connaissaient. La
même scène devait se dérouler pour les unités des autres casernes qu’ils
rejoindraient hors de la ville avant de prendre la direction de Yenking et de
la passe de la Gueule du Blaireau. Baotou serait alors sans défense pour la
première fois de son histoire.
    Chen Yi regarda la colonne se diriger vers la porte du
fleuve. Lujan ne pouvait savoir qu’il avait posté tous ses hommes dans la foule
pour y maintenir l’ordre et empêcher les habitants les plus téméraires de
manifester leur colère. Il ne voulait pas que Lujan soit retardé, même s’il n’avait
pu résister à l’envie d’être témoin de sa honte. Pendant des années, il avait
trouvé de la compréhension chez cet homme qui n’était encore à l’époque qu’un
des capitaines de la garnison, mais ils n’avaient pas été amis. Chen Yi savait
que Lujan aurait beaucoup de mal à obéir à l’ordre d’évacuer et il avait
savouré chaque instant de son humiliation en s’efforçant de ne pas montrer sa
satisfaction. Quand les Mongols arriveraient, aucune voix discordante n’exhorterait
les soldats à se battre jusqu’au dernier. La trahison de l’empereur avait livré
Baotou aux mains de Chen Yi.
    Tout dépendrait du sens de l’honneur des deux frères mongols
qu’il avait aidés. Chen Yi aurait voulu être sûr de pouvoir faire confiance à
Khasar et à Temüge. Le peuple massé devant la caserne regarda en silence s’éloigner
les soldats tandis que Chen Yi adressait une prière aux esprits de ses ancêtres.
Pensant à son serviteur mongol, Quishan, il ajouta une prière au père ciel de
ce peuple étrange pour demander son aide dans les jours à venir.
     
     
    Appuyé à la barrière d’un enclos de chèvres, Gengis souriait
en regardant son fils Chatagai pousser des cris joyeux. Le matin même, il avait
offert au garçon, pour ses dix ans, une armure à ses mesures. Chatagai était
encore trop jeune pour se joindre aux guerriers pendant les combats mais, ravi
du cadeau,

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