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Le souffle de la rose

Le souffle de la rose

Titel: Le souffle de la rose Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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rassurée par le contact de l’épaisse
chaîne à laquelle pendait la clef qui ne la quittait jamais.
    L’altération soudaine de sa voix alerta Annelette, qui la
considéra, attendant la suite.
    — Il existe toujours trois clefs aux coffres des
abbayes afin de garantir leur sécurité. Le mécanisme de la porte ne fonctionne
que lorsqu’elles sont tournées en conjonction. La coutume veut que l’une
demeure avec l’abbesse, que la deuxième soit confiée à la gardienne du sceau et
la dernière à la grande prieure.
    — Blanche en garderait-elle deux, étant à la fois
gardienne du sceau et grande prieure ?
    — Non. L’affaiblissement des facultés de notre doyenne
m’a encouragé à récupérer l’une d’entre elles afin de la confier à la sœur
cellérière, qui dépend directement de moi et que sa position hiérarchique
désignait.
    — Cette fielleuse de Berthe de Marchiennes, entre les
mains de qui je ne remettrais pas ma vie !
    — Comme vous y allez, ma fille, tenta de la gronder
Éleusie.
    — Eh quoi ? Ne sommes-nous pas au-delà des
amabilités de convenance ? Je me méfie de cette femme.
    — Moi aussi, admit l’abbesse. Cependant, ce n’est pas
la seule.
    Après une seconde d’hésitation, Éleusie lui conta l’étrange
scène qu’elle avait surprise quelques semaines auparavant : l’échange
entre Emma de Pathus, la maîtresse des enfants, et ce Nicolas Florin qu’elle
avait été contrainte d’héberger en l’abbaye.
    — Emma de Pathus s’entretenait avec l’inquisiteur dont
nous avons supporté la présence ? répéta Annelette Beaupré, sidérée. Cet
homme est maléfique. C’est l’un de nos ennemis. Qu’avaient-ils à se confier ?
D’où le connaissait-elle ?
    — Je l’ignore.
    — Il nous faut donc garder l’œil sur elle. Surtout, il
nous faut au plus vite vérifier que l’on n’a pas dérobé la clef de notre
doyenne.
    — On ne pourrait ouvrir le coffre sans l’aide de la
mienne.
    La crispation du visage de sa fille lui fit entrevoir les
mots qu’elle retenait. Éleusie les prononça à sa place :
    — En effet... Si Berthe de Marchiennes... enfin, si la
meurtrière s’est déjà approprié deux des clefs, je reste la dernière à lui
faire obstacle, résuma-t-elle. Allons nous en enquérir auprès de Blanche... Mon
Dieu, pauvre Blanche... Quelle proie facile.
    Elles trouvèrent la vieille femme dans le chauffoir, ainsi
qu’elles s’y attendaient. Blanche de Blinot apaisait ses douleurs de membres
dans l’unique pièce chauffée en cette période de l’année. Elle s’était fait
installer un petit coin, juste un pupitre qui lui permettait de lire les
Évangiles assise, sans grimacer d’inconfort. La doyenne leva des yeux rougis de
chagrin vers elles en balbutiant :
    — Je n’aurais jamais cru devoir affronter une telle
épouvante, ma mère. Cette pauvre petite Adélaïde, une enherbeuse entre nos
murs, parmi nous. Est-ce la fin du monde ?
    — Non, chère Blanche, tenta de la rassurer Éleusie.
    — On croit que mon esprit m’abandonne de plus en plus
fréquemment, et c’est sans doute justifié. Pourtant, il s’attarde parfois en
moi. La tisane m’était destinée, n’est-il pas vrai ?
    L’abbesse n’hésita qu’une seconde avant d’approuver :
    — Si fait, chère Blanche.
    — Mais pourquoi ? Qu’ai-je commis pour que l’on
souhaite ma mort, moi qui n’ai jamais blessé, ni même offensé la plus petite
âme ?
    — Nous le savons, ma sœur. Annelette et moi avons
examiné chaque détail de cette monstruosité. Une conclusion s’est peu à peu
imposée à nous. Vous n’étiez pas visée en tant que personne. Avez-vous toujours
la clef que je vous avais remise ? Celle du coffre.
    — La clef ? S’agit-il donc de la clef ?
    — C’est notre supposition.
    Blanche se redressa sur son pupitre en réprimant une grimace
de douleur.
    — Pour qui me prend-on ! s’exclama-t-elle d’une
voix qui retrouvait la fermeté que lui avait jadis connue Éleusie. Mon esprit
vague peut-être parfois, mais je ne suis pas sénile, contrairement à ce qu’affirment
certaines. (Elle destina un regard noir à Annelette.) Bien sûr que je l’ai, et
je la sens à chaque instant.
    Elle tira une jambe de sous le pupitre et tendit son gros
soulier lacé de cuir à la sœur apothicaire.
    — Allons, vous êtes encore jeune, Annelette. Ôtez-moi
cette chaussure et roulez mon bas.
    L’autre s’exécuta. Elle

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