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Le souffle de la rose

Le souffle de la rose

Titel: Le souffle de la rose Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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car, et c’est une nouvelle preuve de notre grande tolérance, ces hérésies ne
sont pas comparables.
    Mathilde réprima un soupir de soulagement. Deux jours plus
tôt, elle serait restée dans l’incapacité de répondre, ignorant le sens de ces
termes. Son oncle l’avait éclairée, se doutant que la question ne manquerait
pas de lui être posée. Il avait insisté sur l’extrême gravité du crime de culte
de latrie. C’était donc de celui-là que devait être accusée sa mère, en plus
des autres charges pesant contre elle.
    — À devoir vous le rapporter, mon cœur saigne. Ils
invoquaient les diables, récitant d’exécrables prières au cours de la messe en
y mêlant des mots de langue impie, ainsi que je l’ai écrit. Ils s’agenouillaient
alors et chantaient leurs louanges.
    — En votre présence ?
    Les lèvres de la jeune fille tremblèrent et elle parut sur
le point de fondre en larmes lorsqu’elle balbutia :
    — Je crois que ma mère souhaitait m’entraîner sur les
sentiers infernaux.
    Un nouveau murmure scandalisé monta des hommes serrés sur le
banc.
    Mathilde laissa échapper un pesant soupir et précisa :
    — Un jour... la servante que mon oncle Eudes avait eu
la bonté de nous offrir est venue me trouver, si bouleversée qu’elle parvenait
à peine à s’expliquer. Je l’ai suivie jusqu’à la petite sacristie de la
chapelle. Il y avait là, entassées, je ne sais combien de poules égorgées.
    — Ainsi, ils offraient des sacrifices animaux ! s’exclama
Florin, qui s’amusait comme un fou depuis le début de l’interrogatoire.
    Cette petite était une merveille que son oncle devrait
montrer dans les foires.
    Mathilde hocha la tête et résuma :
    — Il s’agit donc d’un culte de latrie, et cet aveu est
sans doute le plus pénible que j’aurais jamais à prononcer.
    Frère Anselme la considéra quelques secondes puis demanda :
    — Pensez-vous que cette Sybille Chalis soit l’impardonnable
origine des crimes de foi commis par madame de Souarcy ?
    — Ma mère m’a, maintes fois, exprimé la tendresse qui
la liait à cette fille, ainsi que le chagrin que sa mort lui avait causé. Au
demeurant, elle a toujours montré une affection disproportionnée à son fils
posthume, Clément.
    Florin intervient :
    — Fils qui a disparu avant même la fin du délai de
grâce accordé à madame de Souarcy, preuve indiscutable de sa grande
culpabilité. Poursuivez, damoiselle, je vous prie.
    — Je crois que cette Sybille a semé les germes de l’hérésie
en ma mère et pour cela, elle sera maudite. Son fils les a ensuite entretenus
avec toute la perversité dont il était capable.
    La porte de la grande salle s’entrouvrit à cet instant et
Agnan se faufila, rasant les murs, jusqu’au fauteuil du seigneur inquisiteur.
Il se pencha à son oreille pour lui murmurer que madame de Souarcy grimpait les
marches qui menaient à la chambre de procédure. Nicolas acquiesça d’un petit
signe de tête et se leva :
    — Mademoiselle, votre bravoure n’a d’égale que votre
pureté. C’est pourquoi, je ne crains pas de vous confronter à l’ennemie de
votre âme. Je ne doute pas que l’échange qui s’ensuivra éclaire tout à fait
 – et s’il en était encore besoin  – les nobles membres de ce
tribunal.
    Mathilde le fixa, cherchant la signification de ce qu’il
venait de dire. Son incompréhension fut de courte durée. Sa mère pénétra d’un
pas lent dans la salle. Frère Anselme et frère Jean échangèrent un long regard
dont nul ne perçut toute la désolation.
    Sans trop savoir pourquoi, Agnès avait obéi à la dernière
recommandation d’Agnan, après avoir engouffré les seuls véritables aliments qu’on
lui eut offerts depuis son incarcération. Le lard et les œufs gobés avaient
fait monter en elle une chaleur qu’elle avait oubliée depuis des jours et
apaisé un peu ses tremblements. Elle était parvenue à se laver sommairement,
tressant ses cheveux emmêlés et collés de saleté.
    Lorsqu’elle découvrit Mathilde, un sourire, le premier
depuis son arrivée, aviva son visage livide. Elle s’élança vers sa fille, mains
tendues. La jeune fille détourna les yeux et fit un pas en arrière. Agnès s’immobilisa,
incertaine. Une vague de panique la suffoqua. Avaient-ils également arrêté sa
fille ? Eudes avait-il organisé un deuxième crime de même scélératesse ?
Elle le tuerait pour cela, même si elle devait être maudite à

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