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Le spectre de la nouvelle lune

Le spectre de la nouvelle lune

Titel: Le spectre de la nouvelle lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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elle est ma sœur, entends-tu, seigneur, ma sœur !… Veuille me pardonner… Mais apprendre cela…
    — Ta sœur donc ? s’étonna Erwin.
    — Oui, fille de mon père et de ma mère ! Ma sœur cadette !
    Il demeura un moment silencieux, ressassant son indignation devant le Saxon qui le regardait avec bienveillance.
    — Oui, murmura-t-il, ma sœur qui a disparu…
    — Disparue, oui, mais en vérité, pourquoi, dans quelles circonstances ?…
    — La vérité, mon père… Elle n’est guère plaisante, je le crains, et j’ai beau lui chercher des excuses… Pourquoi Agnès, un beau jour, a disparu sans se préoccuper, selon toute apparence, de ce qu’allait devenir son commerce, de la peine qu’elle faisait à ses parents…
    — … et sans même emporter vêtements et parures ?… Ne peut-on craindre qu’il ne lui soit arrivé malheur ?
    — Ce qui est arrivé, répondit Médard avec un air affligé, est à la fois moins tragique, peut-être, et plus affreux.
    Comme l’homme paraissait hésiter à poursuivre, Erwin rappela, pour l’y encourager :
    — Nous avons tout lieu de croire que sa disparition, tragique ou non, a quelque rapport avec son éventuelle participation à d’étranges fêtes, des orgies nous a-t-on dit, voire des célébrations idolâtres qui se dérouleraient au cœur du marécage. Crois-tu qu’il s’agisse là de faits avérés ?
    — Je le crains, confessa le marchand.
    — Et Agnès participait-elle à de telles débauches ? Réponds sans crainte. Il y va peut-être de sa vie.
    — Oui de sa vie sur cette terre et de son salut éternel, hélas !… Elle a commencé à y prendre part il y a environ deux ou trois années.
    — Avec Thomas ?
    — L’un avec l’autre, en effet.
    — De temps à autre ? Assidûment ?
    — D’abord de temps en temps. Bientôt ils en devinrent les participants les plus assidus. Cela dura ainsi, sans drame, plus de deux ans. C’est alors que s’est produit, à ce que j’ai compris, un événement qui a entraîné les plus pénibles conséquences… Mais d’abord, seigneur, que je te dise ceci : celui qui dirige ces fêtes scandaleuses est un personnage mystérieux appelé le Baron et qui est secondé par un certain Flaiel… dont le nom dit bien ce qu’il veut dire.
    — J’ai déjà entendu cela.
    — Or, tandis qu’au début, Agnès et Thomas – j’ose à peine le préciser – s’adonnaient ensemble à des pratiques honteuses et abominables, ma sœur, peu à peu, s’est éprise du Baron au point de refuser à d’autres, y compris son époux, ce qu’elle avait accepté jusque-là, réservant ses faveurs au chef de cette bande. Bien que mon beau-frère ait continué sans vergogne à profiter des occasions que ces orgies lui offraient, il entra dans une grande colère en constatant qu’Agnès lui échappait pour devenir la compagne attitrée du Baron.
    — Les frasques de sa femme, y compris, affirme-t-on, à Mézières, auraient dû pourtant l’inciter à la résignation, fit remarquer Erwin. Selon toute apparence, s’il avait accepté qu’Agnès fût sa complice, il ne put supporter ce qui devait bien arriver un jour ou l’autre : qu’elle le rejette pour un autre.
    Médard réfléchit longuement avant d’admettre :
    — Sans doute en fut-il ainsi. Cependant j’affirme que toutes les rumeurs qui ont été répandues à l’envi sur l’inconduite d’Agnès à Mézières n’étaient que médisances et calomnies… On a dû te dire qu’elle était belle… et coquette.
    — On l’a dit.
    — Cela a suffi pour entretenir rumeurs et ragots… Alors, de se sentir ainsi surveillée, décriée, noircie, elle conçut contre Mézières et ses habitants une sorte de haine qui n’a pas pesé d’un faible poids dans sa décision.
    — Quelle décision ?
    — Au printemps dernier les attaques contre elle se multiplièrent. Elle en vint à ne plus les supporter. Comme elle était de plus en plus éprise du Baron, ses rapports avec Thomas devinrent tumultueux : il lui faisait sans cesse des scènes violentes ; il alla jusqu’à la frapper, à la menacer de mort. Leurs altercations ameutaient le quartier et chacun guettait le moment où le pire se produirait… C’est alors qu’elle résolut de quitter Mézières et son mari pour rallier définitivement la bande du Baron et de Flaiel… J’ai tout tenté pour l’en empêcher.
    — Et c’est pour cela que tu t’es rendu à Mézières ?
    — Si fait, seigneur, et à plusieurs

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