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Le talisman de la Villette

Le talisman de la Villette

Titel: Le talisman de la Villette Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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casquette.
    — Le meurtrier aurait eu le temps de changer de couvre-chef.
    — Pourquoi ? Il ignorait que j’étais là, et s’il l’avait su, vous le présumez stupide au point de rappliquer ?
    — On cède à l’affolement, en de telles circonstances.
    — Vous êtes rudement documenté, normal… Martin Lorson ricana.
    — Puisque vous avez cru primordial de me débucher au terrier, c’est que ma parole a une certaine valeur, tout poivrot que je sois. Fiez-vous donc à mon flair. Serrez-m’en cinq, et adieu ! A force de vous amener chez moi, vous allez m’apporter le guignon.
    Victor se retira, satisfait que Lorson eût confirmé son intuition. Il se retourna un bref instant et s’imagina que l’ombre tourmentée d’une danse de Saint-Guy frénétique se muait en une kyrielle de poupées gigognes emboîtées à l’intérieur d’une silhouette démesurée.
     
    Djina descendit de l’omnibus. Quelqu’un la bouscula et elle s’excusa. La ville se jetait sur elle de tous côtés. Un océan d’attelages venant de l’Arc de triomphe roulait au long des Champs-Élysées. Le spectacle était tumultueux, avec un aspect de retour de bataille.
    Le décor chavirait, elle s’adossa à un arbre. Il lui fallait coûte que coûte échapper à cette foule, retrouver la sécurité de son logement. Elle vit son reflet dans la vitrine d’un joaillier et se jugea laide. Sur le trottoir passaient d’élégantes femmes maquillées avec soin, des hommes jeunes et vieux aux mines blasées. « Personne ne te connaît, semblaient-ils lui dire. Personne ne sait qui tu es, personne ne sait rien de ce que tu désires, ni de la solitude que tu as endurée, ta place n’est pas ici. » Elle eut honte de ses vêtements, honte d’avoir vécu tant d’années et de posséder si peu d’expérience.
    La pâtisserie Gloppe ressemblait à un palais de contes. Elle fut saisie de panique. Jamais elle n’oserait franchir le seuil d’un tel lieu !
    Elle respira profondément.
    « Je ne veux pas être effarouchée. Je ferai ce que j’ai à faire. »
    Elle resta un moment en retrait, luttant contre elle-même. Elle déplorait de s’être conduite en midinette, pourtant il était bon de savoir qu’un homme tel que Kenji Mori existait, il était bon de s’être donné l’illusion de lui plaire.
    — Vous êtes perdue ? Je suis navré, il y a beaucoup trop de monde, c’est le jour des courses de Longchamp, vainqueurs et vaincus paradent.
    Il était là, souriant, naturel. Elle le regarda. Il ne trichait pas. Il émanait de lui une sagesse apaisante qui ne laissait rien paraître de ses conflits intimes.
    — Je suis ravi que vous soyez venue, dit-il. Prenez mon bras, ma chère.
     
    Joseph se morfondait devant l’Hôtel de Belfort. Il déambulait sur le trottoir et consultait fréquemment sa montre comme s’il appréhendait que sa dulcinée ne lui pose un lapin. Il regrettait de ne pas avoir mangé davantage au bouillon Duval et, pris d’un pressant besoin d’uriner, se serait damné pour un chalet de nécessités. À ce jeu-là, il allait mourir de faim et de froid, et, en prime, mouiller son bénard. Il persévéra. À deux reprises, il aperçut un homme affligé d’une légère claudication qui s’approchait de la réception et s’entretenait avec l’employé. La troisième fois, l’homme écrivit un billet et exigea sûrement qu’on le remît à un des résidents car une clochette fut agitée et un groom accourut.
    Le boiteux gagna vivement la rue. Joseph se plaqua à la vitrine d’un marchand de meubles en sifflotant. Du coin de l’œil il épiait l’individu, qui s’écarta de quelques mètres et prétendit se passionner pour une devanture de papetier. Physionomie agréable, une pointe de dureté, chevelure fournie, favoris, la quarantaine sonnée, bel homme, nota mentalement Joseph.
    Il revint sur ses pas d’une allure nonchalante et marqua un arrêt, le temps d’un regard à l’intérieur de l’hôtel. Il entrevit une ravissante jeune femme brune, au teint hâlé et aux lèvres charnues, indécise au milieu du hall. Elle déplia un papier serré dans sa main gauche, en prit connaissance et releva aussitôt la tête. Son expression demeurait figée, comme retenue par une vision qui l’effrayait.
    Intrigué, Joseph suivait son manège. Était-ce Sophie Clairsange ?
    Sophie Clairsange avisa un groom planté près de l’ascenseur.
    — Qui a déposé ce message ? lui

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