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Le temps des illusions

Le temps des illusions

Titel: Le temps des illusions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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s’enduire le corps de mercure, d’autres encore qu’il suffisait de boire du vin…
    Dès le 25 août, on compta 1 000 morts par jour. On ne trouvait plus personne pour enlever et inhumer les cadavres qui s’amoncelaient dans les rues. On eut recours aux forçats, qui se signalèrent par le pillage des maisons abandonnées et par quelques crimes perpétrés sur des malades. On dit même qu’ils entassèrent sur des chariots des morts et des agonisants. Bientôt les fosses ouvertes hors les murs de la ville ne suffirent plus. On dut ouvrir les caveaux des églises. L’évêché restait environné de cadavres qui pourrissaient et dégageaient une odeur pestilentielle.
    Au début de l’épidémie, Mgr deBelzunce ordonna des prières publiques et un jeûne général. Il clamait que le fléau était un châtiment du ciel causé par la survivance du jansénisme et il en profita pour fustiger les évêques appelants. C’était prêcher dans le désert. Les dévotions de toutes sortes se multiplièrent. On inventait des prières. Des visionnaires réclamaient des processions en l’honneur de certains saints pour conjurer le mal. La crédulité n’avait d’égal que le désarroi des populations.
    Il fallut attendre le mois d’octobre pour que le fléau se calmât. Alors que l’on comptait encore une centaine de morts par jour, Mgr de Belzunce organisa une procession de pénitence. Il sortit de sa maison pieds nus, la corde au cou, tenant une croix et se dirigea vers un autel érigé près de la porte d’Aix. Le peuple accourut de toutes parts pour rendre grâce au Seigneur comme s’il n’y avait plus à craindre la contagion. Hélas ! l’épidémie reprit avec une vigueur nouvelle. Elle ne cessa qu’à la fin du mois de décembre…
    La peste n’est pas restée circonscrite à Marseille. Cinquante-neuf communes proches ont été touchées ainsi que Aix-en-Provence, Toulon, Apt, Avignon et même Montpellier. Le reste de la France ne fut pas exempt de calamités. Un incendie ravagea le centre de Rennes et plusieurs villes de Champagne et de Normandie furent victimes des intempéries.

    Le triomphe du plus mauvais prêtre qu’il y ait au monde
    L’abbéDubois poursuit sa carrière dans l’ombre du Régent, qui ne peut se passer de lui. Jusqu’alors il a mené de main de maître la politique extérieure du royaume. Il veut désormais devenir Premier ministre, mais ne croit pouvoir parvenir à cet honneur que revêtu de la pourpre cardinalice, comme le furent jadis Richelieu et Mazarin. Cependant, sa vie privée milite peu en faveur d’une telle promotion. Débauché et blasphémateur il demeure. Ses tentatives pour obtenir le chapeau de cardinal se sont soldées par un échec, leRégent ne lui ayant pas accordé son soutien. L’abbé s’est pourtant juré de l’emporter.
    Le 9 janvier 1720, la mort du cardinal de laTrémoille, archevêque de Cambrai et ambassadeur auprès du saint-père, a éveillé chez lui un fol espoir. Il brigue sa succession et quelle succession ! Il s’agit de l’archevêché le plus riche de France, encore auréolé de la gloire de Fénelon et qui, de surcroît, fait de son titulaire un prince d’Empire. Pour voir ses vœux exaucés, il lui faut l’accord du Régent. Dubois a l’habitude de manœuvrer le prince. Il avait rêvé, lui dit-il, qu’il était archevêque de Cambrai. Le Régent ne répondit rien. Un peu gêné, Dubois poursuivit son discours et lui demanda pourquoi il n’obtiendrait pas la succession de Mgr de La Trémoille. « Quoi, toi archevêque de Cambrai ! », s’esclaffa le Régent.
    Dubois ne se découragea pas : il fit intervenir en sa faveur l’ambassadeur de l’empereur et celui duroi d’Angleterre au nom de leurs souverains respectifs. Le premier rappela au Régent que l’archevêché était situé sur les terres impériales et que Dubois serait ainsi très bien placé pour entretenir l’harmonie et la bonne intelligence entre les alliés. Le roi d’Angleterre, tout d’abord surpris par la demande de son ambassadeur, plaida, lui aussi, la cause de Dubois pour les mêmes raisons que l’empereur. Le 4 février 1720, Philippe d’Orléans reçut une lettre du roi d’Angleterre recommandant Dubois pour l’archevêché de Cambrai. Un monarque anglican soutenant les prétentions d’un diplomate français à devenir archevêque sur des terres d’Empire, c’était un comble ! L’appui du souverain britannique et celui de

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