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Le temps des illusions

Le temps des illusions

Titel: Le temps des illusions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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leDuc. Tout se joua en vingt-quatre heures.
    Le 11 juin 1726,Louis XV se montra particulièrement affable avec le prince. Il lui parla longuement et le pria de venir souper vers huit heures le lendemain à Rambouillet. Le 12 juin, vers sept heures du soir, leduc de Charost, capitaine des gardes du roi, se présenta chez M. le Duc prêt à partir rejoindre le roi et qui ne pouvait recevoir son visiteur. Ce dernier lui dit qu’il devait simplement lui remettre une lettre de S.M. Sans se troubler, M. le Duc prit le message, l’ouvrit et blêmit.Louis XV déclarait qu’il voulait désormais gouverner seul et qu’il supprimait la charge de Premier ministre. Il remerciait son cousin des soins qu’il lui avait apportés et lui ordonnait de se rendre sans tarder à Chantilly. Lepremier moment de stupeur passé, le prince entra dans une formidable colère. « Et mes papiers ? », hurla-t-il. M. de Charost n’ayant reçu aucun ordre à ce sujet, M. le Duc fit un tri rapide, brûla quelques feuillets, en mit quelques-uns dans ses poches et le reste dans un cassette à l’intention du souverain. Il griffonna un message pour sa mère : « Tous les jours se suivent et ne se ressemblent pas ; hier j’étais César, aujourd’hui je suis Pompée, je vais à Chantilly ; je compte, belle maman, que vous me conserverez toujours vos bonnes grâces. » Il donna sa parole qu’il obéirait à l’ordre royal avant de saluer gracieusement les courtisans qui l’attendaient dans l’antichambre. Hors de leur portée, il cria au postillon : « À Chantilly ! » Un exempt des gardes du corps l’accompagna et vint rendre compte au roi que le duc de Bourbon était bien là où il l’avait ordonné.
    Le même jourla reine reçut elle aussi un billet du roi qui ne ressemblait guère à une lettre d’amour : « Je vous prie, Madame, et s’il le faut je vous l’ordonne, de faire tout ce que M. deFréjus vous dira de ma part comme si c’était moi-même 12 . » La pauvre Marie se prépare des jours amers. Elle tremblera devant son mari et devant l’archevêque !
    Mme dePrie, qui avait rejoint son amant à Chantilly, a dû décamper. Le monarque ne veut plus en entendre parler et elle doit rompre avec M. leDuc. Il l’exile auprès de son mari dans son château de Courbépine en Normandie. Les célèbresfrères Pâris subissent le même sort. Enfin le roi a fait part de sa volonté à son Conseil : « Il était temps que je prisse moi-même le gouvernement de mon État et que je me donnasse tout entier à l’amour que je dois à mes peuples pour leur marquer combien je suis touché de leur fidélité. »
    1 - Cf. supra , p. 124-125.

    2 - Cf. supra , p. 142.

    3 - Voltaire à la marquise de Bernières vers le 10 juillet 1724, Correspondance , t. I (1704-1738), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », p. 123.

    4 - Charles Duclos, Mémoires secrets , vol. II : La régence du duc d’Orléans (1715-1720) , Paris, 1829, p. 34-35.

    5 - « Mémoire adressé au duc de Bourbon, premier ministre », Revue rétrospective , Seconde série, t. X.

    6 - Bourgade commerçante du nord de l’Alsace rattachée à la France depuis sa conquête en 1705.

    7 - Vie du maréchal duc de Villars, écrite par lui-même , t. III, Paris, 1784, p. 214.

    8 - Ibid ., p. 215-216.

    9 - Cité par René Pomeau, Voltaire en son temps , t. I, Paris, Fayard, 1995, p. 161.

    10 - Ibid. , p. 158-159.

    11 - Ibid. , p. 162.

    12 - Ibid.

Chapitre VIII
    Une main de fer dans un gant de velours
    Le roi et le cardinal
    Duboisrêvait d’être le successeur deRichelieu et deMazarin, mais cet honneur semble destiné à Mgr deFleury. Il jouit seul de la confiance du roi sur lequel il veille depuis dix ans. Il l’a formé et dirige sa conduite tout en ménageant son orgueil. Il lui a dicté la déclaration qu’il devait faire au Conseil et au Parlement après le renvoi de M. leDuc qu’ils ont préparé ensemble :Louis XV suivra l’exemple de son grand-père en gouvernant sans Premier ministre. Traduisons : le souverain conservera toutes les apparences du pouvoir, mais son mentor orientera ses décisions. Le monarque n’a que dix-sept ans ; le laisser réellement gouverner serait pure folie. N’ayant pas encore manifesté de goût pour le pouvoir, quoiqu’il assiste régulièrement aux Conseils, il s’en remet à son paternel pédagogue. L’abbé Vittement, son ancien sous-précepteur, assure que la

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