Le tombeau d'Alexandre
l’autre. Visiblement, il avait jadis été recouvert de feuille d’or, mais celle-ci s’était détachée par endroits, exposant ainsi la peau noircie, parcheminée, et les membres réduits aux os qui les soutenaient. Noir et or, comme les créatures les plus dangereuses du monde. Dans la lumière faible et vacillante, Knox chercha les cicatrices qui permettraient d’identifier le corps. Et même après tant de siècles, il put discerner, aussi discrètes qu’en fussent les traces, la blessure à la gorge de Cyropolis, les lésions à l’épaule de Gaza, causées par une catapulte, la marque à la poitrine de la flèche de Multan et la balafre à la cuisse d’Issos. Un frisson le parcourut. Il sentit ses jambes fléchir. Il n’y avait pas de doute possible.
— C’est lui, murmura-t-il. C’est Alexandre.
Dragoumis se tourna vers lui, les yeux humides.
— Alors il est temps de le ramener dans sa patrie, dit-il.
III
Il fut assez aisé, en répartissant les efforts sur la durée, de porter le couvercle du cercueil jusqu’au camion. Mais déplacer le cercueil lui-même s’avéra très compliqué. Il était bien trop lourd pour que les hommes puissent le soulever. Alors ils utilisèrent des cordes pour le faire descendre avec précaution le long des degrés de la pyramide, répandirent du sable sur le sol de la galerie pour qu’il glisse plus facilement et le traînèrent derrière eux en tirant tous ensemble, y compris Knox et Gaëlle. Malgré tout, ils progressèrent lentement, à raison de cinquante centimètres par traction concertée. Mais ils arrivèrent à la sortie, où Mohammed avait sans le vouloir créé une rampe lorsqu’il avait déversé du sable. Ils attachèrent une corde épaisse à la barre de remorquage d’un des 4 x 4 et tentèrent de tracter le cercueil, mais les roues tournèrent dans le vide. Ils utilisèrent donc le deuxième 4 x 4, poussèrent tous ensemble et parvinrent finalement à le hisser jusqu’au camion.
Mais il fallait encore le charger. Mohammed essaya de le soulever avec le bras hydraulique de la pelleteuse, mais il bascula contre l’engin. Au bout d’un moment, ce fut Philippe Dragoumis qui trouva la solution. Il demanda à Mohammed de creuser un trou dans le sable pour que le camion puisse descendre en marche arrière au-dessous du niveau du cercueil, puis de combler l’espace entre les deux pour ensuite tirer le cercueil à l’horizontale. Une fois l’opération achevée, il regarda sa montre. Ils n’avaient pas le temps d’emmener quoi que ce soit d’autre. Il faisait presque jour. Le soleil commençait à pointer à l’horizon. Il fallait qu’ils partent immédiatement. Peut-être pourraient-ils revenir prendre le reste un jour. Mais pour le moment, ils avaient ce qu’ils étaient venus chercher et mieux valait ne pas être trop gourmand.
IV
Elena se dirigea vers le 4 x 4 dans lequel elle avait laissé son sac. Elle avait acheté un pistolet la nuit précédente. Elle s’était contentée de héler le premier taxi qu’elle avait repéré au Caire et de jeter des billets au visage du chauffeur, jusqu’à ce que celui-ci comprenne qu’elle était sérieuse et passe quelques coups de fil. Deux heures plus tard, un revendeur était venu lui montrer son stock. Elle avait su quelle arme elle prendrait avant même qu’il ne la lui mette entre les mains. C’était un pistolet noir, imposant, et le simple fait de le regarder lui donnait de l’assurance. Lorsqu’elle le lui avait désigné, il avait hoché la tête avec enthousiasme. C’était un bon choix. Un Walther P99. Semi-automatique, deux chargeurs. Il avait commencé à lui expliquer comment il était assemblé, mais elle lui avait dit que c’était inutile. Alors il l’avait emmenée jusqu’à la cité des Morts et lui avait montré comment fonctionnait la sécurité. Elle avait tiré quatre balles dans un mur et éprouvé une sensation de chaleur dans le ventre. Elle l’éprouva à nouveau en prenant le pistolet entre ses mains.
Elle avait trois vies à prendre. Et sa dette de sang serait enfin réglée.
Elle se retourna. Mohammed enterrait à nouveau l’entrée de la tombe sous le sable. Knox et Gaëlle se tenaient près des voitures, sous l’œil vigilant de Bastiaan. Nicolas et les autres Grecs étaient dans le camion et répartissaient la charge de façon uniforme. Seuls Costis et Philippe Dragoumis regardaient le butin depuis l’extérieur. Costis avait son
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